Le Mois du Cœur de Saint Joseph
Le Mois du Cœur de Saint Joseph
Le Cœur de Saint Joseph ouvert à ceux qui l'implorent
Huitième jour
Le type consolateur des époux
L’apôtre enseigne que le mariage est un grand Sacrement, en ce qu’il représente l’union de Dieu et de l’Église. Mais combien plus parfaitement le mariage de Saint Joseph avec Marie, représentait-il cette union mystérieuse,dit saint Bonaventure ? Écoutons le saint Chancelier Jean Gerson, qui avait fait de ce magnifique sujet une étude toute particulière, comme il paraît par les belles choses qu’il en a écrites dans ses Considérations sur saint Joseph, « Jésus-Christ, comme vierge, est conjoint vierge pareillement à l’Église », dit ce dévot Docteur. On trouve en ce virginal mariage de Marie et de Joseph, qu’un homme vierge est joint à la vierge; et comme Jésus-Christ et une lignée spirituelle de la sainte Église, pareillement Saint Joseph et Notre-Dame ont eu ce bel enfant, ce béni fruit de vie, Jésus.
« Toute la cour du paradis et les Anges bienheureux, dit encore Gerson, tressaillèrent de joie de ce saint et sacré mariage. Car la virginité est la sœur des Anges, et ils virent que par ce mariage leur nombre serait réparé. Egalement les anciens Pères qui étaient dans les limbes, et qui, comme on peut le penser eurent connaissance des grâces spéciales de cette solennité, en furent tout joyeux, car leur rédemption approchait. On peut croire aussi que plusieurs des âmes détenues dans le purgatoire, en furent délivrées et élargies, en l’honneur et considération de ce joyeux, saint et glorieux mariage. De plus, nous pouvons religieusement penser que toutes les fois que nous, pécheurs, faisons mémoire honorable de ce mariage, nous en recueillons les biens et les aumônes de grâce et de pardon, de spirituelle joie et de dévotion. Car c'est pour nous pécheurs, et principalement pour notre salut que fut célébré ce mariage. Ainsi nous devons y avoir singulière confiance, amour, honneur et révérence, de quelque état, de quelque âge, et de quelque sexe ou condition que nous soyons, et quelque grâce que nous veuillons solliciter, et spécialement pour demander la paix et l'union. Car ici est signifiée l’union de la sainte Église à Jésus, son époux, et de l’âme à Dieu.
Ainsi s'exprime le saint Docteur Gerson sur cet ineffable mystère, auquel il fut on ne peut plus dévot. Par où l'on voit que les époux ont a la fois un beau modèle à étudier et une efficace protection à espérer du saint mariage de Joseph et de Marie, les deux plus saints époux qui seront jamais.
Saint Joseph est le modèle le plus accompli des époux, comme la vierge sainte est l’idéal le plus sublime des épouses. Son mariage a été l’ouvrage de l’Esprit-Saint, observe le vénérable Silveira, uni en Dieu à sa sainte épouse ils ne faisaient qu’un esprit et qu’un cœur pour aimer et servir Dieu plus parfaitement. Prédestiné pour être uni à la plus parfaite des créatures, il avait des dispositions et des vertus qu’aucun époux n’a pu jamais avoir à égal degré. Sous ce rapport, notre Saint a possédé des éléments de perfection dans le mariage, que nul autre ne saurait posséder. Mais il n’est pas moins certain que la grâce n’a pas tout opéré en lui sans son acquiescement et sa fidèle correspondance, et que, par conséquent, il a eu des peines, des combats intérieurs à surmonter pour vivre en paix et en toute douceur, avec la plus paisible et la plus douce des vierges, comme la nomme l’Église. C’est principalement sous ce rapport que le Cœur virginal de Saint Joseph-doit être présenté à l'admiration et à l’imitation des époux chrétiens.
La paix, la justice, la charité ont formé la sainte alliance de Joseph et de Marie et ont très intimiment uni leurs Cœurs en Dieu. Aussi bien, si la soumission de Marie est volontaire, la domination de Joseph est respectueuse ; si elle l'honore comme chef de la famille, il la respecte comme chef du mystère. Leur reconnaissance est mutuelle, et tous leurs intérêts sont saints, parce qu'ils n’ont qu’un objet, qui est Jésus-Christ. Voyez quelle union dans ce mariage ! Faut-il sur l'édit d'un superbe empereur, faire profession publique de soumission et de servitude, ils vont, ensemble confondre leurs noms avec les noms de tout l’univers. Dans tous les mystères de l’enfance du Christ, Joseph se rencontre toujours avec sa très sainte Épouse, dans une communauté de pensées et de sentiments, d’affections et de volontés.
Les époux qui honorent comme il convient, par leur vertus dans le mariage, l’union de Joseph et de Marie, ont de grands motifs d’espérer de ces deux très Saints Époux secours et protection dans toutes leurs nécessités, ainsi que de bien douces consolations dans les peines cuisantes du mariage. Qu’ils viennent donc avec une entière confiance aux pieds de notre bon Saint Joseph qui les comprendra d’autant mieux et les aidera d’autant plus efficacement que, quoiqu'il fut marié à la plus douce et la plus accomplie des épouses, qu’il soit possible d’imaginer, il connût néanmoins les peines et les tribulations inséparables des unions les mieux assortie, ainsi qu'on le voit par l’Evangile. Son tendre et béni Cœur est donc en état de compatir plus vivement aux épreuves des époux qui l’implorent, de pouvoir les leur rendre plus acceptables, plus douces et plus mémoires pour la bienheureuse éternité, et même pour cette vie temporelle.
Oh ! qu'un mariage est heureux, quand l’époux et l’épouse s'animent à servir Dieu, à le prier, à le louer par l’union des sentiments de piété et de vertu ; quand un époux chérit son épouse d'une affection aussi pure que celle avec laquelle Saint Joseph aimait l’incomparable Marie pour sa modestie, pour sa simplicité, pour sa chasteté ; quand l'un et l’autre s’efforcent, comme Joseph et sa virginale Épouse, de marcher dans les voies du Seigneur d'une manière ferme et irrépréhensible ; qu’ils se consolent dans leurs afflictions inévitables ; qu’ils ont les mêmes vues, une même espérance, les mêmes désirs, une même règle, celle de l’Evangile. Au contraire, un mariage devient comme un enfer, quand les époux vivent sans union, sans esprit de paix, sans but honnête e.t chrétien, en un mot sans vertu, sans lois, sans frein. La bénédiction de l’éternel n’y est pas, car elle ne demeure pas dans le trouble, le désordre et les disputes ; c’est donc sa malédiction qui y séjourne. De tels époux ne comprennent pas la dignité du mariage, et ils n’y répondent pas non plus. Semblables à cette herbe, dont parle David, qui trompe la main qui la moissonne, ceux qui seront près d'eux, qui verront ou entendront ce qui se passe dans leur demeure, ne diront point : « Que la bénédiction de l’Eternel soit sur vous. nous vous bénissons au nom du Seigneur ». J’ajouterai que ces époux n’auront pas les faveurs particulières de Saint Joseph, à moins qu’ils ne s’amendent et qu'ils reviennent avec sincérité de leurs égarements. Pourtant, ils ont un si pressant besoin de consolations, de secours spirituels !
Voyez dans ce ménage cette femme éplorée, les cheveux épars, et toute décomposée ; elle a pour époux un ivrogne, un dissipateur, un méchant ; elle vous montre les plaies encore saignantes qu’il lui et faites. Peut-être y a-t-il de sa faute à elle même, mais enfin le mal existe ; elle souffre beaucoup et en désespérée. D’autre part, je vois un époux triste, affligé, déconcerté, la face noyée dans ses pleurs, pourquoi gémit-il ? de quoi se plaint-il ? Il est brave, honorable, chrétien, bon chrétien et par conséquent bon époux : Qu’a-t-il donc ? soit imprévoyance, soit entraînement, soit imprudence il a pris pour compagne une des cousines de Satan, une femme prétentieuse, insoucieuse, acariâtre, négligente, incapable d’élever comme il convient, ses enfants, de gouverner la maison par ce qu’elle est à la fois sale, paresseuse, dissipatrice. Voilà pourquoi ce mari soupire, pourquoi il gémit et se plaint aux portes d’autrui. Voir pleurer un homme, c'est chose triste. Avec une femme plus convenable, plus douce, plus soumise, plus diligente, plus chrétienne, en un mot mieux élevée, il eut coulé des jours heureux et joui en quelque sorte du bonheur de saint Joseph dans la compagnie de Marie, sa sainte épouse. Tout est-il donc perdu pour lui ? Non ! Mais qu'il s’adresse à Saint Joseph qui lui obtiendra la résignation, cette vertu, la plus belle auréole de l’homme souffrant, le plus digne hommage dû à la divinité, comme la plus propre à le purifier et à lui faire gagner le ciel ; qui peut être même, car il est si bon Saint Joseph, convertira, ou du moins réformera par les grâces qu’il lui procurera son épouse infortunée.
Exemples
Un père de famille vivait depuis longues années dans l’oubli de ses devoirs religieux. Au mois de mars, son épouse et ses enfants entreprirent une neuvaine à saint Joseph pour obtenir sa conversion. La clôture en fut fixée au 19 mars, jour de la fête du Saint. Au même jour, cet homme, ignorant ce que les siens faisaient à son intention, entra par hasard dans une église; il y entendit une instruction qui le toucha, et se confessa avant de sortir. Il a persévéré depuis dans les meilleures dispositions.
Une femme pieuse souffrait avec résignation les rudes traitements de son mari, qui vivait contre toutes les lois de l'honnêteté et de la morale. L'épouse fidèle essaya de tous les moyens pour ramener dans le bon chemin l’époux infidèle, mais tout fut inutile. Enfin elle eut recours au modèle des époux, à saint Joseph, qui la consola aussitôt et l’exauça ; car ce malheureux reçut de Dieu de si grandes grâces, qu’il détesta ses péchés, répara les scandales qu’il avait donnés, s’appliqua à vivre chrétiennement et saintement, à la consolation de tout le monde et en particulier de sa pieuse épouse (Bollandistes).
Oraison du bienheureux Gerson en mémoire du mariage de Saint Joseph
Vierge sainte et sacrée, veuillez m'obtenir cette grâce de votre cher et doux Enfant Jésus, qu’on puisse en votre dite église de Notre Dame de Paris, et toutes les autres de la chrétienté célébrer dignement sans superstitions, le virginal mariage du saint, juste et vierge Joseph avec vous, lequel vous aima d'un amour si pur, vous garda et vous gouverna avec tant de soins vous, et le béni Enfant Jésus, vous accompagna toujours, vous honora chastement et saintement, comme vous le fîtes à son égard avec tant de bonté et d’humilité, de sorte que maintenant il jouit avec vous de la gloire. Que par les mérites et les intercessions votre chaste Époux, le très doux et glorieux Jésus qui vous est né, que.vous avez nourri en ce mariage sacré, nous fasse être participant des noces célestes et de la gloire éternelle, lui qui est l'Epoux de l’église triomphante, et Dieu béni dans tous les siècles. Ainsi soit-il.
Pour recevoir chacune des méditations du Mois de Saint Joseph par mail,
abonnez-vous à la newsletter d'Images Saintes
Le Carême avec la Vénérable Benoîte Rencurel
Le Carême avec la Vénérable Benoîte Rencurel
Mgr René Combal, actuel chapelain et ancien recteur du sanctuaire Notre-Dame du Laus, nous propose de vivre le Carême en compagnie de la Vénérable Benoîte Rencurel. A l'occasion de l'année jubilaire du 350e anniversaire des premières apparitions, afin de vivre le Carême, retrouvez, chaque jour de la sainte quarantaine, une méditation pour vous plonger dans la Grâce du Laus.
Troisième semaine de Carême
Troisième dimanche de Carême
Dimanche 8 mars
Suite de l’apparition du 29 août 1664 au Vallon des Fours
En ce dimanche de Carême nous continuons le récit de la dernière apparition au Vallon des Fours, le 29 août 1664 qui nous renvoie à la fin du récit de la Transfiguration. Voici venu l’instant décisif où ce mystère va peut-être s’éclairer : ce récit limpide en marque bien l’atmosphère religieuse :
« Tandis que je priais Dieu, mais ardemment et de toute l’étendue de mes forces, de me faire connaître sa sainte volonté, récitant l’office de la Sainte Vierge à genoux sur une pierre, distant seulement de cinq à six pas de notre bergère… elle m’avertit avec un ton de joye tout-à-fait extraordinaire, en me disant ces paroles : « Eh ! M. le Juge ! vous… la damoiselle… je la vois… venez vittement ! ». Il ne faut pas dire si je m’y rends à grands pas, où estant je lui dis : « Où est-elle ? Sur quoi ? ». Elle me répondit, regardant dans l’antre avec joye et estonnement tout ensemble : « Quoy ! Monsieur le Juge ! vous ne la voyez pas ? » Et sur ce que je lui dis que je n’étais pas homme de bien pour mériter un tel honneur, elle me dit : « Monsieur ! elle vous tend la main… ». Ce qui m’obligea le chapeau au poing et à genoux de tendre la main dans l’antre pour savoir si quelque chose d’invisible me toucherait. Mais la, vérité, je ne touchai rien. Et dans ce temps la bergère me dit que la demoiselle disparaissait et s’enfoncait dans l’antre ».
Ceci fait, je m’escartai encore un peu de notre bergère pour prier Dieu, et lui dit de demeurer encore là, et de prier aussi Dieu. Comme je continuais l’office de la Sainte Vierge, Dieu m’inspira de dire à Benoîte de demander à la demoiselle, qu’elle voyait, comment elle s’appelait. Elle le fit sur le champ, regardant dans l’antre, et elle me répondit d’abord [aussitôt] qu’Elle s’appelait « Dame Marie… et qu’elle ne la verrait de quelque temps ». Paroles qui me surprirent fort, et me confirmèrent tout à fait dans ma première croyance, savoir que la Sainte Vierge daignait bien paraître à cette pauvre et simple bergère. Et dès lors je conclus de très bonnes expériences de cette apparition et ceux que Dieu voulait favoriser, et celui de quelque grand bonheur. J’exhortai notre bergère de tout mon pouvoir de bien prier Dieu, et de se mettre en état de grâce, puisque la Sainte Vierge la comblait d’une faveur singulière. Comme Elle lui avait dit qu’Elle ne la verrait de quelque temps, notre bergère en estait inconsolable et fort affligée ; elle en pleurait même à chaudes larmes, parce que sa vue lui causait une joie inexprimable, ainsi que j’avais pu lire sur son visage estant au-devant de l’antre. »
La vision disparaît comme à la Transfiguration : « Jésus s’approcha, les toucha et leur dit : relevez-vous, n’ayez pas peur ! Levant les yeux, ils ne virent plus que Lui, Jésus, seul ».
Troisième semaine de Carême
Lundi 9 mars
Nombre et importance des guérisons obtenues
En ce lundi de la 3e semaine de carême, la première lecture de la messe nous raconte la guérison de Naaman le Syrien, qui fut guéri de la lèpre en se plongeant sept fois dans le Jourdain, pour obéir à l’ordre d’Élisée. C’est l’occasion pour nous de parler du nombre et de l’importance des guérisons obtenues par l’intercession de Benoîte.
Pour dire le nombre et l’importance des guérisons miraculeuses qui ont eu lieu durant la vie de Benoîte, il suffit de prendre en main la copie de Galvin (1850) qui retranscrit les quatre manuscrits originaux des XVIIe et XVIIIe siècles : ceux du juge Grimaud, de Jean Peythieu, du frère Aubin et de Pierre Gaillard, auteur de « la grande histoire ».
Si nous prenons en main la copie du manuscrit du juge Grimaud datant de 1665, que remarquons-nous ? Sur les dix-sept pages de cette copie, onze pages sont consacrées à la relation des guérisons. Nous avons deux pages d’introduction, une page et demi qui relatent les apparitions du début du mois de mai au 29 août 1664 au Vallon des Fours, l’apparition de Pindreau et celle de la chapelle de Bon Rencontre, ensuite une demi-page qui évoque le mouvement des foules de Pentecôte 1665 à janvier 1667 affluant vers le Laus. C’est tout. Tout le reste est consacré au récit des guérisons.
Troisième semaine de Carême
Mardi 10 mars
L’Annonciation
« L’ange Gabriel fut envoyé par Dieu dans une ville de Galilée appelée Nazareth, à une jeune fille, une vierge accordée en mariage à un homme de la maison de David, appelé Joseph. Et le nom de la jeune fille était Marie. » En ce jour nous allons méditer sur l’Annonciation de l’Ange à Marie nous pouvons faire mémoire d’une annonciation dont bénéficia Benoîte : celle des apparitions de la Vierge. Cette annonciation eut lieu sur la « montagne de Saint Maurice » au-dessus du village de Valserres : le saint lui-même, qui était vénéré en ce lieu, annonce à Benoîte au début du mois de mai 1664, que le lendemain, au lieu appelé « Vallon des Fours », elle verra la Mère de Dieu.
Voici le texte : « Elle vit un vieillard tout blanc habillé de rouge, une bonne mine, une longue barbe, une belle taille… Le vieillard lui apparaît, s’approche d’elle, lui demande ce qu’elle fait :« Je garde mes moutons, prie Dieu, cherche de l’eau à boire. » Elle prend son pain et l’invite à manger ; il répond qu’il n’en a pas besoin. « Il faut bien que vous mangiez », dit-elle. « Non ma fille, je ne vis pas du pain terrestre, je ne mange que du pain céleste… Je suis Maurice… » Et il lui dit qu’elle aille dans le vallon qu’il lui montre, qui est au-dessus de Saint-Étienne, où elle verra la mère de Dieu. » Le lendemain, au Vallon des Fours, Benoîte rencontre pour la première fois la « Belle Dame » qui va lui apparaître en ce lieu durant quatre mois, presque tous les jours, « du matin aux étoiles, jusqu’au soir aux étoiles. »
Troisième semaine de Carême
Mercredi 11 mars
Premières guérisons
Nous avons évoqué lundi le nombre et l’importance des guérisons qui se sont opérées au Laus au temps de Benoîte. Aujourd’hui nous rapporterons quelques exemples significatifs et la première gerbe de guérisons.
La première guérison du Laus est celle d’un estropié du village de Lazer qui a lieu durant le premier pèlerinage, en avril 1665. Le juge Grimaud nous fournit un abrégé des procès-verbaux de dix-huit guérisons, survenues entre le dimanche 28 juin 1665 et le 8 septembre, et consignés par lui-même du 12 août au 8 septembre. Il les transcrit, nous dit-il, dans le but apologétique de confirmer les fidèles dans leur confiance envers la Vierge du Laus, et aussi de faire réfléchir les calvinistes : « nous pouvons dire qu’un grand nombre sont ébranlés dans leur âme, quelque mine qu’ils fassent ». Cette liste de guérisons, Grimaud la poursuit jusqu’à fin juin 1667 dans le compte rendu qu’il a préparé pour Monseigneur d’Aubusson, l’Archevêque d’Embrun alors à Madrid, et dont le texte se trouve aux archives du Laus.
Les huit premiers cas concernent des familles gapençaises bien connues. Les autres se répartissent dans le Bas-Champsaur, les cantons de Chorges et de Savines. « Le premier est arrivé le 28 juin, en la personne du fils de messire Anthoine de Cazeneuve, chirurgien de Gap, appelé Pierre, âgé d’environ onze ans ; il avait sept ulcères à la jambe gauche, trois à la cuisse et quatre depuis le genou jusqu’en bas ; Cela durait depuis environ quinze mois. Une grande fluxion sous l’œil gauche, lui enlevait de temps en temps la vue. Son père, voyant que tous les remèdes de son art de chirurgien étaient comme inutiles, se résolut avec sa femme à le vouer à Notre Dame du Laus. L’ayant mené avec beaucoup de peine, et ayant fait leur dévotion, au sortir de la chapelle l’enfant dit qu’il était guéri. Il revint en effet dans la ville de Gap tout seul, marchant sans douleur, et en moins de trois jours les ulcères furent tout consolidés sans rien y faire et il fut aussi guéri de la fluxion, au grand étonnement de tous ceux qui l’avaient vu en pitoyable état. Le père et la mère l’ont déclaré et signé le 12 août 1665 ».
Le Carême est un temps de guérison. Voilà pourquoi dans les jours suivants nous continueront ces récits de guérisons obtenues par l’intercession de la mère de Dieu, par la foi des pèlerins et l’intervention de Benoîte.
Troisième semaine de Carême
Jeudi 12 mars
D’autres guérisons
En ce jeudi 27 mars, Jésus expulse un démon qui rend un homme muet… et il proclame : « Si c’est par le doigt de Dieu que j’expulse les démons, c’est donc que le règne de Dieu est survenu pour vous ». Le vicaire général Antoine Lambert, après la guérison de Catherine Vial qui avait retrouvé l’usage de ses jambes, s’était écrié à plus de vingt reprises : « le doigt de Dieu est là, le doigt de Dieu est là ! »
À deux reprises, dans les manuscrits du Laus, on voit Benoîte participer à la délivrance de deux personnes possédées en septembre 1710 et en octobre 1716. Il s’agit de Madeleine Petet de Saint Martin de Queyrières (Hautes-Alpes). Nous avons le procès-verbal fait au Laus le 8 septembre 1710 à deux heures de l’après midi, signé par Gaillard qui est prêtre et deux autres personnes. Madeleine était victime d’un maléfice. Le 7 septembre 1710, elle arrive au Laus sur les huit heures du matin. « Elle aboit comme un chien, si fort que les prêtres la firent sortir de l’église parce qu’elle empêchait tous le monde de prier Dieu. Après ma messe, la sœur Benoîte prie les assistants de dire les Litanies de Notre Dame pour elle. Sitôt après, cette bonne femme se trouve délivrée de ce maléfice et elle parle comme auparavant. » On est en droit de penser que cette délivrance subite est due à la qualité de la foi et de la prière de Benoîte qui rejaillit sur l’assistance.
On trouve le même type de délivrance avec Catherine Hermite, la possédée de Seynes les Alpes que Benoîte accueillit et fit entrer dans la basilique. Elle est guérie en mangeant du pain béni à la sacristie et par une confession générale qui la libère complètement. Benoîte la fit diner avec elle et elle repartit calme et paisible. À Seynes les Alpes, les gens étaient dans l’admiration de la retrouver dans cet état. Ils exprimèrent leur confiance et leur vénération envers la Vierge du Laus et sa messagère.
Ce récit est le dernier où Benoîte apparaît en action auprès des pèlerins. C’est elle qui aurait encouragé cette fille à faire une confession générale. Ce trait final manifeste clairement son charisme et de sa mission.
Troisième semaine de Carême
Vendredi 13 mars
Les guérisons d’un chartreux et d’un archevêque
En ce vendredi de la troisième semaine de carême, nous mentionnons les guérisons étonnantes de Jean Barthélémy, prieur de la Chartreuse de Durbon, et celles de l’archevêque d’Embrun, Monseigneur d’Aubusson de la Feuillade.
« Jean Barthélémy, prieur de la Chartreuse de Durbon, était fort incommodé des jambes depuis longtemps, sans pouvoir s’en soutenir. Un de ses religieux lui dit de se vouer à Notre Dame du Laus, qui faisait tant de miracles. Il répondit qu’il leur était interdit de faire aucun vœu, mais que si néanmoins il plaisait à Dieu que l’intercession de sa Sainte Mère le soulage de son mal, il s’en irait célébrer la Sainte Messe dans son oratoire du Laus, dès qu’il pourrait monter à cheval. La veille de la Saint Martin, il eut la pensée que la Vierge lui disait de se lever, et qu’il était guéri. Il se lève, tout étonné de ne point sentir de mal à ses jambes ; il croit rêver, marche par sa chambre librement et sans bâton, appelle ses religieux, les avertit du miracle arrivé en sa personne, les conjure de rendre grâces à Dieu et à la Sainte Vierge d’un tel bienfait et fait dire l’office De Beata. Puis il fait préparer un cheval pour partir au Laus. Il rencontre en chemin le sieur Bonnet, médecin de Gap, qui venait avec un plein panier de drogues pour le soulager ; il lui dit qu’il avait trouvé un autre médecin que lui ! Le lendemain, deuxième jour de la foire de Saint Martin, il quitte Gap pour le Laus où il vient célébrer la messe, et revient coucher à Gap. Il témoigne de toute sa guérison en place publique, en présence d’un grand nombre de notables et de représentants de la religion calviniste. »
« Monseigneur l’Archevêque d’Embrun, ambassadeur pour le Roy en Espagne, a été guéri instantanément d’une très grave maladie à laquelle il n’espérait point réchapper. Cela sur l’avis qui lui avait été donné qu’une nouvelle dévotion arrivait dans son diocèse et après s’être voué à la Vierge du Laus : ceci l’obligea de donner ordre de faire dire une neuvaine de messes en action de grâce, de faire présent à ladite chapelle de 300 livres pour la bâtisse en attendant ses plus grandes libéralités ».
Troisième semaine de Carême
Samedi 14 mars
La nature de ces guérisons
En ce samedi de la troisième semaine de Carême, nous évoquons la nature des guérisons opérées en deux ans du temps de Benoîte. Nous citerons d’abord en synthèse un texte de l’historien Juvénis, contemporain de Benoîte, dans sa chronique historique : « On y faisait des vœux, des processions et des offrandes. Les ulcéreux, les phtisiques, les perclus, les impotents, les autres malades y recevaient la guérison. Les pécheurs invétérés et rebelles y trouvaient par des confessions très douloureuses une salutaire pénitence ».
Le Père de Labriolle note que, de l’automne 1665 à l’hiver 1669, les guérisons des yeux sont les plus fréquentes avec celle des ulcères ; puis ce sont les paralysies des membres, les cas dits désespérés ; ensuite les maladies digestives ou nerveuses et enfin les grosses fièvres et les surdités. Pierre Gaillard note entre 1701 et 1703 : « ceux qui ont mal aux yeux offrent des cœurs d’argent après leur guérison ; ceux qui sont guéris de chancre au nez, au visage, au sein, etc… offrent aussi des présents. »
En 1669 et 1684, des guérisons nombreuses et variées sont signalées chaque année par Gaillard. Également en 1673, 74, 75, 76 ; après avoir énuméré six cas de guérison, il ajoute : « qu’on juge des autres miracles par ce petit nombre cité en si peu de temps, par les autres guérisons dont on n’a pas parlé et qui sont continuelles. » En 1677 et 1678 il cite une nouvelle liste de guérisons ; en 1679 une autre guérison est signalée ; et presque chaque année dans son manuscrit, Gaillard répète comme un refrain : « quel dommage qu’on ait recueilli que quelques miettes. »
Peythieu n’avait-il pas écrit en 1671 : « je m’accuse de négliger à recueillir les guérisons qu’on m’a rapportées, aussi extraordinaires qu’on pourrait imaginer, parce que dans les commencements je n’avais pas assez de piété pour les croire. » Nous relevons vingt-huit guérisons en 1684 et 1685 et seize dans les trois années suivantes. En tout, cinquante et une guérisons durant ces cinq années. Neuf autres cas sont signalés de 1701 à 1703. Le Père de Labriolle relève dans le manuscrit de Gaillard neuf guérisons de 1709 à 1711.
Si nous revenons un peu en arrière pour prendre conscience du nombre de guérisons, nous avons un total de quatre-vingt guérisons signalées du printemps 1665 à la fin de l’année 1669, donc presque une centaine de guérisons en moins de cinq ans. Et Gaillard fait remarquer qu’il y en a eu une infinité d’autres qu’on n’a pas eu le soin d’observer ou d’écrire. On a, en effet, consigné par écrit surtout les guérisons des gens du voisinage, mais il y en a sûrement eu d’autres, de gens plus éloignés qui n’ont pas été rapportées, non seulement de la France mais des pays étrangers.
Pour recevoir les méditations du Carême avec Benoîte Rencurel par e-mail,
abonnez-vous à le newsletter d'Images Saintes