Le Mois du Saint Sacrement
Le Mois du Très Saint Sacrement
Vingt-troisième jour
Le Mardi de la quatrième semaine après l'Octave de Pentecôte
Venez Esprit Saint,
Repoussez bien loin l'ennemi
Et donnez-nous vite la paix :
Qu'ainsi, sous Votre conduite,
Nous évitions tout mal.
Je Vous salue Marie.
Nous lisons au chapitre 7 de la 13e session du saint Concile de Trente : « Pour ce qui est de porter la Sainte Eucharistie aux malades, outre que c'est parfaitement conforme à la raison et à l'équité, on le trouve prescrit par plusieurs Conciles, et observé très anciennement dans l'Église Catholique. C'est pourquoi le Saint Concile a ordonne qu'il faut absolument retenir cette coutume si salutaire et si nécessaire. Si quelqu'un dit qu'il n'est pas permis de conserver la Sainte Eucharistie dans un lieu sacré, ou qu'il n'est pas permis de la porter avec honneur aux malades ; qu'il soit anathème ». La Divine Eucharistie portée aux malades qui sont en danger de mort prend le nom de Saint Viatique. Voilà pourquoi le prêtre qui donne la communion au malade prononce ces paroles : « Recevez le Viatique du Corps et du Sang de notre Seigneur Jésus-Christ ». Or, le mot « Viatique » signifie provision pour le voyage. Celui qui part et qui a l'intention de marcher longtemps serait regardé comme un insensé, s'il oubliait de faire des provisions pour son voyage. Un navire qui va traverser l'Océan ne quitte jamais le port sans être pourvu abondamment de tout ce qui est nécessaire pour la nourriture de l'équipage et des passagers. Un homme qui se propose de monter sur le sommet d'une haute montagne qui paraît presque inaccessible, s'il a tant soit peu de prévoyance, ne manque pas de prendre avec lui du pain et du vin pour soutenir ses forces. S'il agissait différemment, il s'exposerait à périr de lassitude et de faiblesse.
Nous avons tous un grand voyage à faire, c'est celui du temps à l'éternité. Tant que nous sommes dans notre corps, dit Saint Paul, nous voyageons loin de Dieu. Mais le moment arrive, l'heure va sonner, où cette âme doit briser les liens qui la retenaient captive ici-bas; il faut gravir la montagne, traverser un fleuve aux eaux écumantes et rapides, il faut s'élancer dans les profondeurs de l'éternité, paraître au pied du tribunal redoutable, devant la majesté de celui qui jugera avec équité les vivants et les morts. Certes, si jamais le courage et la force furent nécessaires, c'est bien dans ce moment suprême ! Le Prophète Elie après avoir marché pendant toute la journée, s'arrêta accablé de lassitude sous un térébinthe. Il demanda à Dieu de le faire mourir, tant il était triste, tant la vie lui paraissait amère ! Tout-à-coup il s'endormit. Pendant son sommeil, un Ange le loucha et lui dit : « Levez-vous, et mangez, car il a vous reste un grand chemin à faire ». Elie s'étant levé, vit auprès de lui un pain cuit sous la cendre et un vase d'eau; il mangea et but, et fortifié par cette nourriture, il marcha quarante jours et quarante nuits, jusqu'au pied d'Horeb, la montagne de Dieu. L'âme chrétienne serait tentée de s'abandonner au découragement, lorsqu'elle considère la grandeur et la majesté infinie de celui qui va la juger. Le Démon redouble en ce moment ses efforts pour la perdre. La nature est faible, le danger est grand. Tout à coup, le Sauveur sort de Son Tabernacle ; il vient visiter Lui-même son enfant, il lui apporte avec Son Corps et Son Sang, le pain qui fortifie et qui devient son Viatique pour le dernier des combats, pour le voyage de la terre au Ciel. Gage de la bienheureuse immortalité, la Sainte Eucharistie donnée au chrétien mourant, est comme le sceau divin imprimé sur son front, le signe des Élus ; c'est l'armure la plus puissante contre les derniers traits de l'ennemi. Oh ! Qui dira la générosité de Jésus-Christ ? Qui dira le bonheur d'une âme qui reçoit avec foi et amour le Saint Viatique ?
Premier point
L'Amour de Jésus-Christ se donnant en Viatique
Quand le Disciple bien-aimé a écrit cette grande parole : « Il les aima jusqu'à la fin », ne dirait-on pas qu'il désignait ce grand acte d'amour par lequel Jésus-Christ consomme toute choses en faveur de ses amis, en venant à eux pour être lui-même leur Viatique, dans ce douloureux passage du temps à l'éternité ? Il savait, cet adorable Maître, toutes les angoisses de l'agonie, toutes les amertumes de la mort, toutes les horreurs du tombeau. Notre cœur lui était connu. Comment alors eût-il pu l'abandonner à sa faiblesse dans ce moment solennel de la mort? Non, il nous aimait trop pour cela.
Vous êtes malade, privé de la consolation d'aller avec vos frères, vous asseoir à la table sainte, attendez et ne craignez rien ; voici l'Époux, allez au devant de Lui par vos soupirs, et attirez-le chez vous par la vivacité de votre amour. Il vient. Pour vous procurer les consolations dont votre âme sera inondée, il s'expose à des outrages, à des mépris Sans nombre. Il sera insulté dans les rues qu'il lui faudra parcourir pour arriver chez vous. N'importe, il a dit à ses ministres : « Notre ami est malade, allons, nous, pour le visiter ». Encore si le Sauveur n'allait que chez ses fidèles amis ! Mais voici le sublime de l'amour. Cet impie, ce blasphémateur, cette femme scandaleuse, se trouvent au lit de la mort. La grâce a remué fortement une conscience chargée de crimes. Le prêtre a prié, il a consulté Dieu. « Oui, J'irai, dit Jésus-Christ, et Je guérirai cette âme. Déjà Ma grâce est descendue sur elle avec l'absolution. Il faut nourrir, fortifier ce pauvre cœur. O pécheur ! Tu mangeras la chair du Fils de l'Homme, tu boiras Son Sang, et tu auras la vie éternelle !... O amour incompréhensible ! ô Jésus, qui pense à cet amour ! Qui s'en occupe ! Moi, Seigneur ; oui, je Vous loue, je Vous bénis, je Vous rends grâces, je vous aime !...
Bonheur de l'âme qui reçoit le Saint Viatique
Il est certains Mystères que l'on ne peut sonder, ce sont les opérations de la grâce dans quelques âmes d'élite qui ont depuis longtemps consacré à Jésus-Christ toute leur existence. Pour ces âmes, dire ce qu'elles éprouvent lorsque la voix de l'Eglise vient se faire entendre : « Partez, âme chrétienne, au Nom du Père qui vous a créée ; au Nom du Fils qui vous a rachetée ; au Nom du Saint Esprit qui vous a sanctifiée » ; c'est une chose qu'il ne faut pas tenter. Le prêtre, qui plusieurs fois dans sa vie a été chargé de porter le Saint Viatique à des âmes pures, aimantes, détachées de tout ce qui est périssable, unies à Jésus-Christ par la plus parfaite conformité de toutes les pensées et de tous les sentiments, pourrait à peine soulever un coin du voile qui cache des choses si ineffables !
Ô Jésus, ce que vous dites à cette âme lorsque Vous la visitez en ce monde pour la dernière fois ! Ce qu'elle éprouve en vous voyant entrer dans sa propre demeure où vous venez la chercher ! Qui me le fera comprendre ? C'est bien alors, que le juste s'écrie : « Vous avez consolé mon âme à proportion des tristesses de mon cœur ». Le voilà, mon Rédempteur. Un voile le cache, mais ce voile va tomber ! Venez, Jésus, encore quelques instants, et je Vous verrai face à face, et je serai rassasié de Votre Gloire. Je me représente Saint Thomas d'Aquin lorsqu'il aperçut de son lit de mort la Divine Eucharistie, et qu'il s'écria dans l'extase de son amour reconnaissant : « Jésus, que j'aperçois à travers le voile du Sacrement, accordez-moi ce que je désire avec une si grande ardeur ; faites que je Vous contemple face à face, et a que je sois éternellement heureux par la vue de votre gloire ».
On comprend alors cette parole dite par plusieurs Saints : « Je ne croyais pas qu'il fût si doux de mourir !... » Tel est donc l'effet du Saint Viatique du corps et du sang de Jésus-Christ. Il rend la mort douce, calme, heureuse ! Mon Dieu, aurai-je ce bonheur ? Peut-être non, parce qu'il peut m'arriver de mourir subitement. Eh bien ! Je vais m'occuper du Saint-Viatique. Tous les mois je consacrerai un jour pour me préparer à la mort. Ce jour là, je me représenterai ma dernière heure et Jésus-Christ venant à moi comme mon Viatique ! Je le recevrai avec les dispositions et les sentiments que je voudrais avoir au moment de mourir. Ô Jésus, mettez le comble à toutes Vos grâces, en m'accordant encore celle que je Vous demande aujourd'hui. Que je meure fortifié par cette divine nourriture qui me rendra capable de m'élever jusqu'à la montagne de Dieu !...
Accompagner le Saint Viatique
Quand le Sauveur était sur la terre, Il parcourait les villes et les bourgades de la Judée accompagné de Ses plus fidèles amis. On voyait, après les Apôtres, de saintes et pieuses femmes qui ne le quittaient jamais. Leur dévouement était pour le Cœur de Jésus une consolation bien douce, au milieu de l'indifférence des uns et de la malice des autres. L'Eglise veut que Jésus-Christ allant visiter ses enfants malades et les nourrir de son propre corps, reçoive les hommages et les adorations des fidèles. C'est la raison pour laquelle, le son des cloches donne le signal de cette auguste visite. La Sainte Eucharistie est portée sous un dais ; des cierges allumés, symbole de Foi et d'amour, doivent précéder le prêtre chargé de cette fonction divine. On récite des Psaumes et des Hymnes pour adorer le Dieu fait Homme caché sous le voile du Sacrement, et le son d'une clochette annonce à tous ceux qui passent, le grand Mystère de l'amour d'un Dieu.
Ici je dois examiner ma conduite passée, et voir en même temps ce que je dois promettre à mon adorable Sauveur pour l'avenir. Quel a été mon empressement et mon zèle pour accompagner Jésus-Christ porté aux malades ? Ai-je obéi à l'Eglise qui m'invitait à cet honneur par le son de la cloche ? Le respect humain, la paresse, l'indifférence ne m'ont-ils pas retenu souvent ? Hélas ! Le respect humain ! Grand Dieu, où est ma foi ? J'ai donc rougi de suivre Jésus-Christ ? Cet honneur ne l'ai-je pas abandonné à quelques pauvres enfants sans instruction et sans piété, dont la présence est devenue un objet de raillerie pour le mondain ?
Ô Jésus, qui sait s'il ne faut pas attribuer à ce respect humain, à cette indifférence, les morts subites qui privent un si grand nombre d'âmes du Saint Viatique ? Mais il en est temps encore. Je puis réparer mes négligences coupables, et par mon zèle ardent, contribuer à la gloire que l'Eglise désire Vous rendre, quand elle Vous porte chez les malades. Je Vous suivrai, Seigneur, partout où Vous irez. Le réduit obscur où se trouve le pauvre, la mansarde étroite et sale où Vous ne dédaignez pas d'entrer Vous-même, j'y entrerai avec Vous. Hélas ! Vous êtes bien souvent reçu dans ces pauvres demeures, avec une Foi plus vive, et un amour plus ardent, que celui que Vous rencontrez dans les appartements somptueux des riches du siècle !
Se nascens dedit socium,
convéscens in edulium,
Se móriens in prétium,
se regnans dat in præmium.
Enfant, Il se fait notre compagnon,
À la Cène, notre nourriture,
Au Calvaire, notre rançon,
Aux cieux, notre récompense.
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