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28 février 2017

Le Carême avec Saint François et Sainte Claire d'Assise

Le Carême avec Saint François et Sainte Claire d'Assise

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Avant Propos

 

La Famille Franciscaine se prépare à célébrer les 800 ans de son arrivée en France

 

« 800 ans et après… », tel est le slogan qui a été choisi par la Famille Franciscaine pour célébrer, en cette année 2017, l’arrivée des franciscains en France. C’était en 1217, du vivant de François, l’Ordre tout juste créé se structure devant l’afflux de nouveaux frères. Les frères rassemblés en chapitre à la Pentecôte décident d’aller porter l’Evangile au-delà des frontières. Saint François demande au frère Pacifique, poète et l’un de ses plus chers compagnons, de partir pour la France. Frère Pacifique fondera la première implantation franciscaine à Vézelay. Dans une lettre datée du 15 novembre dernier, les membres du comité des supérieurs de la Famille Franciscaine annonçaient l’ouverture du Jubilé et les premiers temps forts de celui-ci : « nous sommes héritiers des frères et des sœurs qui ont engagé leurs vies avec Jésus pauvre et crucifié, sur les chemins ouverts par François et Claire d’Assise. Nous sommes aussi des passeurs et avons à regarder devant nous. Nous sommes heureux de vous inviter à célébrer le Jubilé marquant ce 8ème centenaire de l’arrivée des premiers frères mineurs en France. Il se déroulera du 1er mars au 4 octobre 2017 ».

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L'arrivée des Frères Mineurs en France

 

C'est avec l'approbation de la Règle par le Pape Innocent II que la Fraternité des Mineurs, au nombre de 12 Pénitents venus d'Assise est reconnue officiellement. Elle ne cessa dès lors de s'accroître en nombre jusqu'à devenir un Ordre important. Au chapitre de la Pentecôte 1217, ils sont environ 5000 Frères. On décide alors d'envoyer des Frères hors d'Italie (Espagne, Allemagne, Hongie, Terre Sainte). Saint François, pour donner l'exemple, projette d'aller dans le pays dont il porte le nom et admire les troubadours, usant parfois de leur langue. Il veut connaître aussi les théologiens de Paris qui parlent si bien de l'Eucharistie.

Arrêté à Florence par le Cardinal protecteur Ugolin de Segni, sur son conseil, François décide de rester en Italie pour assurer la pérénité de son Ordre, critiqué par certains cardinaux pour son radicalisme évangélique proche des Vaudois dissidents de l’Église. Il délègue alors la direction au Frère Pacifique, une de ses premières recrues, couronné avant sa conversion en 1212, roi des poètes par le futur empereur Frédéric II. Il connaissait probablement quelques rudiments de la langue des troubadours. Par la suite, il aura des fonctions importantes dans l'Ordre comme fondateur de plusieurs couvents de Frères et visiteur des Clarisses. On le considère comme le premier Provincial de France.

Durant l'été 1217 le groupe remonte par la vallée du Rhône et de la Saône jusqu'à Vézelay, à la frontière du Royaume de France et du comté de Nevers, dont l'abbatiale bénédictine est réputée avoir les reliques de Sainte Marie-Madeleine, patronne des pénitents. Après avoir séjourné, selon leur coutume à la léproserie de la Maladrerie, les Frères sont en quête d'un lieu stable et remarquent sur le flanc nord de la colline, le long du chemin des pèlerins qui mène à l'église de Saint Jacques d'Asquins à l'abbaye de Vézelay couronnant la colline, un petit ermitage abandonné par les moines, proche de la chapelle romane mémorial de la prédication de Saint Bernard en 1146. Ce lieu convenant à leur genre de vie, ils en obtiennent de l'abbé la cession. Quelques Frères vont y rester, tandis que Pacifique part pour Paris, ou plus exactement pour Saint Denis où l'Abbé Suger avait fait construire 70 ans auparavant une magnifique abbatiale, près de laquelle se déroulaient des foires trs réputées.

Comme ils en avaient l'habitude, les Frères allèrent trouver l'Abbé pour solliciter sa protection et obtenir de sa générosité une maison afin de s'établir près de l'église Saint Pierre. Grégoire de Naples le rappelle dans une lettre adressée à l'Abbé de Saint Denis en 1231. On sait par ailleurs que le Clergé et l'évêque de Paris étaient très méfiants et qu'une délégation fut envoyée au Pape pour savoir si leur Règle était approuvée.

Afin de bénéficier des enseignements de l'université puis d'y enseigner, les Frères s'installèrent aussi sur la montagne Sainte Geneviève, à l'emplacement du Lycée Henri IV, derrière le Panthéon. On en a le témoignage par un legs fait en leur faveur devant l'official de Paris en janvier 1224. Au nombre d'une trentaine, ils firent construire ensuite vers 1229 un vaste couvent à Vauvert où résidaient des Chartreux, dans le jardin actuel du Luxembourg, non loin de l'école des Mines. Ce couvent s'écroula avant même d'être habité.

Grâce à la générosité de l'Abbé Odon, ils purent s'installer par la suite contre le mur d'enceinte de Philippe-Auguste sur les terres des bénédictins de Saint Germain des Prés. Du couvent commencé en 1230 et sans cesse agrandi, il ne reste aujourd'hui que le réfectoire du XVIe siècle dans l'enceinte de la Faculté de Médecine. Ce fut le foyer de l'enseignement théologique de Paris. Plusieurs autres couvent verront le jour dans Paris au fur et à mesure des réformes Franciscaines : Observants, Récollets, Capucins, Frères de l'Ave Maria.

Frère Jean-Baptiste Auberger, historien et spécialiste des Sources Franciscaines

 

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Introduction

 

Saint François et Sainte Claire sont deux figures majeures de l’Église. Connaître la vie des saints fait partie de mon chemin de sainteté. Je ne dois pas le négliger et j'ai pour responsabilité de faire connaître la vie de ces aînés dans a Foi à mes enfants, petits-enfants, filleuls, aux plus petits d'entre nous.

Se plonger dans leur vie est un enseignement riche pour un chrétien, même pour moi aux XXIe siècle. Les vies de François et de Claire semblent parfois teintées de merveilleux. Elles ressemblent même à des contes extraordinaires, féeriques, fantastique ! Que je ne m'y trompe pas : n'est-ce pas le propre de la vie des saints, c'est « illuminés » de Dieu, d'avoir une relation privilégiée avec le Christ, et ainsi de bénéficier de grâces extraordinaires dépassant mon entendement ? Il en est ici comme dans les Actes des Apôtres : l'Esprit Saint est présent à chaque page et guide sans cesse François et Claire. Le surnaturel est omniprésent dans leur vie.

Je peux alors me poser la question suivante : où sont les saints prophètes et thaumaturges aujourd'hui ? Il y en a eu (Saint Jean Paul II, Sainte Teresa de Calcutta) et il y en a encore, c'est à n'en pas douter ! Mais si la question est posée, c'est parce que c'est toi, c'est moi, c'est nous qui devons nous ouvrir à la sainteté, à l'action de l'Esprit Saint en nous, à nous laisser être les instruments du Seigneur. Nous sommes les saints d'aujourd'hui et de demain... si nous le voulons. Voilà quel peut être mon chemin de Carême avec François et Claire : atteindre ou approcher au maximum dès ici-bas les lauriers impérissable de la sainteté.

Avec François et Claire, je vais réapprendre à vivre l'Evangile, à me dépouiller du superflu, à retrouver le goût de la Parole, à aimer l’Église et participer à sa construction continuelle... Je vais les suivre pendant tout ce temps de conversion,parce que ces « illuminés de Dieu » ne vont pas me conduire à eux, mais ils vont éclairer le chemin qui mène au Christ... pour autant que je le veuille bien !

Cédric Chanot

 

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Mercredi des Cendres

Jeunesse

 

Pietro Bernardone, riche commerçant en tissu à Assise, et Dame Pica, originaire de Provence mettent au monde un fils. Sa date de naissance ne nous est pas connue avec précision. Elle est supposée vers 1181 ou 1182. son père parti en voyage pour affaire, l'enfant est d'abord appelé Jean. À son retour, Pietro le prénomme Francesco. Il devient un jeune homme gai, généreux, à l'esprit vif, exerçant le métier de son père, mais préférant promenades diurnes et nocturnes, chansons et divertissements. Il dépense sans compter en fêtes et vêtements extravagants, assuré dans ses excès, par ses riches parents qui l'aiment sans condition.

 

À l'école de Saint François

 

« Que nous aimions nos proches comme nous-mêmes, en les attirant tous à ton amour selon notre pouvoir, en partageant leur bonheur comme s'il était le nôtre ; en les aidant à supporter leurs malheurs ; en ne leur faisant nulle offense ». (Louanges du Seigneur, ou Pater Paraphrasé).

Parole de Dieu : « J'étais encore inachevé, tu me voyais ; sur ton livre, tous mes jours étaient inscrits, recensés avant qu'un seul ne soit ! » (Psaume 138, 16).

 

Dans ma vie

 

François est un « gosse de riche » comme on dirait aujourd'hui. Cela lui permet de dépenser sans compter, de faire la fête... et d'avoir toujours ses parents à ses côtés pour rattraper ses errances. Ce qu'il fait dans sa jeunesse, même s'il se convertit un jour et abandonne le vieil homme qui est en lui, le marque à jamais. François éprouvera même par la suite de l'amertume lorsqu'il se remémorera cette période pleine de débauche et d'excès. Rien n'est anodin, ni pour moi ni pour les autres, dans ce que je fais ou dis.

Effet de conversion : Aujourd'hui débute le Carême. Je profite de cette journée pour faire un point : ai-je des comportements extravagants, impulsifs ? Je prends des résolutions pour changer et demande à mon ange gardien de m'y aider.

 

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Jeudi après les Cendres

Naissance de Claire

 

Ortulana, noble et dévote dame, épouse de messire Favarone Offreduccio, chevalier de haute lignée, revient de pèlerinage en Terre Sainte et à Rome. Encore pleine des grâces de ses périples, la Providence leur confie un troisième enfant. Arrivée au terme de sa grossesse, dans la prière ; elle dépose ses angoisses aux pieds du Seigneur, devant le Crucifix. « Ne crains rien, car t enfanteras saine et sauve une lumière qui resplendira dans tout le monde ». Telle est la parole que reçut la pieuse Ortulana. Ainsi naît Claire troisième de cinq enfants, venue briller dans la ville d'Assise en l'an 1194.

 

À l'école de Sainte Claire

 

« La plus grande de toutes les grâces que nous avons reçues et que nous recevons chaque jour de notre grand Bienfaiteur, le Père des Miséricordes, celle dont nous devons lui être le plus reconnaissantes, c’est notre vocation ; et nous devons témoigner à Dieu d’autant plus de gratitude que l’état auquel il nous a appelées est plus grand et plus parfait. C’est pourquoi l’Apôtre dit : Prenez conscience de votre vocation ! » (Claire d'Assise, Testament, 1).

Parole de Dieu : C'est toi qui as créé mes reins, qui m'as tissé dans le sein de ma mère ». (Psaume 138, 13).

 

Dans ma vie

 

Le Seigneur a un projet pour chacun de nous. Cela ne fait pas de moi sa marionnette, son pantin ! Dans son amour, Dieu m'a donné la liberté. Ainsi je peux ouvrir mon cœur ou le garder sourd à la voix du Seigneur. Je peux dire oui ou non à la vocation à laquelle il m'appelle. Cette vocation m'a pour seul but que de me conduire à la sainteté, donc à la vie éternelle. Claire le comprend bien, et elle reste fidèle à l'appel entendu très tôt dans son enfance. Elle s'attache à maintenir un oui ferme et définitif, résolue à servir le Christ contre vents et marées.

Effet de conversion : La vie conjugale, consacrée ou sacerdotale me conduit à la sainteté. Si je n'avais pas encore choisi, je garde mon cœur ouvert. Si j'ai déjà un état de vie, j'ai besoin du Seigneur tous les jours. Je le laisse me parler dans la prière et la méditation de Sa Parole.

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Vendredi après les Cendres

Le soldat François

 

Malgré ses excentricités et son goût de la fête, François est un jeune homme courtois, bannissant la grossièreté et les injures. Il n'a pas encore le sens de l'aide spontanée au miséreux et le lépreux le rebute encore. Engagé dans la guerre opposant Pérouse et Assise, il est fait prisonnier. Ses nobles manières le font enfermer avec le chevaliers. Sa captivité dure un an. De retour, il souhaite embrasser la carrière des armes et repartir au combat dans les Pouilles, mais visions et songes lui font comprendre que sa place n'est pas celle-ci. Obéissant, bien que prêt à un nouveau daprt au combat, il retourne au pays qui l'a vu naître.

 

À l'école de Saint François

 

« Seigneur, fais de moi un instrument de ta paix. Là où est la haine, que je mette l’amour. Là où est l’offense, que je mette le pardon. Là où est la discorde, que je mette l’union. Là où est l’erreur, que je mette la vérité. (...) Là où est le désespoir, que je mette l’espérance. Là où sont les ténèbres, que je mette la lumière ». (François d'Assise, Prière pour la paix).

Parole de Dieu : Si donc quelqu’un se purifie des travers dont j’ai parlé, il sera un instrument pour ce qui est honorable, sanctifié, utile au Maître, prêt à faire tout ce qui est bien. (2 Timothée 2, 21).

 

Dans ma vie

 

Se faire l'instrument, cela peut revêtir deux sens : l'instrument de musique, qui laisse l'Esprit Saint le faire retentir, résonner de l'Evangile, vibrer de l'amour de Dieu ; l'instrument-outil, qui se laisse manier par le Créateur en vue de façonner un monde meilleur. Il n'est pas aisé de se laisse faire ! Il s'agit de ce qu'on appelle le « lâcher-prise », l'abandon. En Dieu, je peux tout et je veux être acteur de la paix, de l'amour que nous annonce le Christ. Je dois donc me mettre en quête de qui est ce Christ et ce qu'il prêche, afin de ne pas me fourvoyer en suivant un Christ que j'aurai créé.

Effet de conversion : En quoi consisterait pour moi de devenir « l'instrument de Dieu » ? Comment abandonner ma volonté au Seigneur tout en continuant de vivre dans le monde ? Je chante des refrains à l'Esprit Saint toute la journée pour qu'il m'éclaire.

 

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Samedi après les Cendres

Claire, une vocation précoce

 

La foi et la piété de Claire son cultivées par sa maman. En Claire croissent de saintes vertus telles la Charité, l'aumône, la crainte de Dieu. Ainsi, par de discrets intermédiaires, elle fait remettre aux pauvres et nécessiteux le fruit de ses privations alimentaires. La prière l'édifie, et au fil de ses cœur-à-cœur avec le Seigneur, elle éprouve, alors qu'elle n'a pas encore douze ans, le désir d'offrir sa vie et sa virginité au Christ. Les choses du monde, qu'elle considère comme « pourriture et mensonge » la dégoûtent. Les biens célestes la réjouissent quand les futilités terrestres l'ennuient.

 

À l'école de Sainte Claire

 

« J'ai appris, sœur très chère, qu'avec la grâce du Seigneur tu avais été assez heureuse pour échapper à la boue de ce monde. (…) Sois fidèle jusqu'à la mort, sœur bien-aimée, à Celui auquel tu t'es consacrée, car tu recevras un jour de lui la couronne de la Vie. (…) Ne te laisse pas séduire par les splendeurs d'un monde qui fuit comme l'ombre. Ne te laisse pas prendre aux apparences d'un siècle trompeur(...) ». (Claire d'Assise, Lettre à Ermentrude de Bruges).

Parole de Dieu : « Il y en a qui ont choisi de ne pas se marier à cause du royaume des Cieux. Celui qui peut comprendre, qu’il comprenne ! » (Matthieu, 19, 12).

 

Dans ma vie

 

L'intégralité de l'humanité courrait à sa perte si la virginité était érigée en idéal : le renouvellement des générations ne se ferait plus ! La virginité est une vocation, réservée à certains seulement, qui l'ont choisi librement, répondant en cela à un appel particuliers, et la vivent en offrande pour le Christ. Ces âmes humaines (hommes ou femmes) sont des âmes-épouses du Christ. Le seul objectif, encore une fois, dépasse le cadre de notre vie terrestre : cette virginité, dont nous parlent Claire et Jésus, est en vue du Royaume, de la vie éternelle dans le cœur de Dieu. C'est pour cette raison que les biens terrestres ne sont que futilité.

Effet de conversion : Suis-je attaché aux biens terrestres ? Suis-je capable de me passer de certaines choses (télévision, ordinateur, argent...) pendant ce Carême, de m'en séparer définitivement ? Je prévois de donner les biens matériels qui m'encombrent spirituellement.

 

Texte extrait du hors série de Parole et Prière « Mon Carême avec Saint François et Sainte Claire d'Assise », publié en 2016

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Téléchargez ces méditations (pdf) en cliquant ici

 

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22 février 2017

Le Mois du Coeur Agonisant de Jésus

Le Mois du Cœur agonisant

Christ-Gethsemane

Huitième jour

« Mon âme est triste ».

 

« Mon âme est triste, tristis est anima mea » (Matthieu 26, 38), dit le bon Maître à Pierre, Jacques et Jean, pour les réhabiliter à leurs propres yeux. En l'entendant lui-même parler de sa tristesse, ils n'ont plus honte d'éprouver une telle tristesse, que saint Luc l'alléguera bientôt comme excuse à leur sommeil, dormientes prœ tristitia (Luc. XXII, 45).

 

Méditation

 

I. Comment peut-il être éclipsé par la tristesse ce soleil divin, qui fait briller de célestes splendeurs et surabonder de joies ineffables toute âme qui s'attache à lui ? Sa tristesse vient de sa charité. On s'attriste de ce qui est désavantageux à celui qu'on aime, et dans le cœur des hommes le poids de l'affliction est égal au poids de l'amour. Plus le Cœur de Jésus nous aime, plus il s'attriste de nos fautes, plus il s'attriste de nos maux. Notre aimable Sauveur n'est-il pas un médecin charitable ? Au chevet d'un malade chéri, auquel il donne les meilleurs remèdes, il s'attriste de l'indocilité de ce malheureux, qui rend tous les remèdes inutiles. N'est-il pas un père compatissant ? A côté de son enfant coupable, condamné mais impénitent, il se désole doublement et à cause du crime et à cause du supplice. N'est-il pas un époux tendre et jaloux ? En face de nos âmes, ses épouses bien-aimées, dont il voit toutes les infidélités, il est rempli de dégoût pour le présent, et de crainte pour l'avenir. stérilité de l'agonie de mon Maître, que tu es déchirante pour son Cœur si tendre et si aimant ! Quelle est mon affliction des péchés d'autrui ?...

II. Jésus s'attriste pour ses disciples, qu'il chérit plus qu'une mère ne chérit ses enfants, et qu'il va laisser comme des brebis sans pasteur, dispersés, exposés au scandale, livrés à la tentation. Il s'attriste plus encore pour la Vierge Marie, dont l'insondable douleur vient de la sienne, et reflue sans cesse vers son Cœur filial. Il s'attriste pour ses persécuteurs eux-mêmes, dont il voit déjà les châtiments terribles, et pour sa patrie aussi aveugle qu'obstinée. divin Sauveur des sociétés et des âmes, sur la pente de cette même montagne des Oliviers, avant de faire votre entrée triomphale dans Jérusalem, vous vous étiez arrêté pour considérer cette grande capitale, pleurer sur elle et en prédire la complète destruction (Luc. 19, 37-44). Quelle doit être votre tristesse en ce même lieu, à l'heure où vous savez qu'on va venir vous prendre, pour vous entraîner dans cette ville coupable, impatiente de consommer le déicide qui causera sa ruine! Et moi, comment ai-je prouvé mon amour à ma patrie malheureuse ?...

III. Le Cœur de Jésus fut crucifié sur le mont des Oliviers, avant que son corps le fût sur la colline du Calvaire ; la croix du jardin fut même plus rigoureuse, pour lui, que celle du Golgotha. Car la compassion est proportionnée à l'amour, à la connaissance, à la sensibilité. Qui sentit comme Jésus ? Qui connut comme Jésus ? Qui aima comme Jésus ? Il sent, il goûte, il savoure toutes nos peines ; il prend sur lui le détail des douleurs de chacun, la somme des douleurs de tous ; il endure à la fois toutes les croix des apôtres, tous les tourments des martyrs, toutes les mortifications des confesseurs et des vierges, toutes les austérités des religieux, toutes les afflictions des justes calomniés ou persécutés. Âmes délaissées, cœurs ulcérés, pauvres moribonds, Jésus agonisant jette sur vous un regard plein d'amour et de tendresse ; son Cœur est plus attristé de vos maux, que la Vierge-Mère n'était émue des douleurs de son Fils unique. Ai-je un peu de cette compassion pour le prochain ?...

Lisez dans L'Agonie de Jésus, Liv. v, ch.VIII. Motifs de la tristesse de Jésus

 

Pratique : Si nous sommes tristes, ne parlons pas davantage aux hommes par nos plaintes, mais parlons davantage à Dieu par la prière. Aimons notre patrie, comme Jésus-Christ aimait la sienne, jusqu'à nous offrir en victimes pour en préparer le salut ou la conversion.

 

Exemple

 

Saint Paul éprouva l'agonie du patriotisme, en voyant les Juifs refuser l'Évangile, et courir ainsi à leur perte. C'est pour moi, dit-il, une grande tristesse tristitia mihi magna, c'est pour mon cœur une douleur continuelle, continuus dolor cordi meo, à tel point que j'eusse désiré devenir anathème, à l'égard de Jésus-Christ, pour les Israélites qui sont mes frères selon la chair (Romains 9, 1-4). Que dites-vous, ô grand apôtre ! S'écrie Saint Jean Chrysostome ? Vous demandez maintenant à être séparé de ce Christ tant désiré, dont vous affirmiez que rien ne vous séparerait jamais (Romains 8, 35-39). N'avez-vous plus le même désir ? Je vous entends me répondre : Mon désir n'est que plus ardent. C'est parce que je suis brûlant d'amour pour Jésus-Christ, que je demande d'en être séparé, non pas séparé de son amour, mais seulement de sa jouissance et de sa gloire. J'y consentirais pour que mon Maître ne fût pas blasphémé, pour qu'on ne dise plus : Il a promis aux uns et donné aux autres. Oui, volontiers, pour que l'on ne parlât point ainsi, bien que ce soit injustement, je renoncerais au royaume des cieux et à l'ineffable gloire, j'endurerais toutes les souffrances, estimant une grande consolation dans mes peines, de ne plus entendre blasphémer celui que j'aime si ardemment.

 

Neuvième jour

« Jusqu'à la mort ».

 

« Jusqu'à la mort », dit Notre-Seigneur, « mon âme est triste, usque ad mortem » (Matthieu 26, 38.) Cet aveu nous rappelle et le royaume sans fin qu'un ange lui avait prédit (Luc 1, 33), et l'amour qu'il nous témoigna jusqu'à la fin (Jean 13, 1). Son règne commencé par la mort s'accroîtra par la mort ; des douleurs sans limites et un dévouement sans réserves seront une semence de nouveaux sujets.

 

Méditation

 

I. Jusqu'à la mort, c'est la rigueur de la justice. Pour satisfaire surabondamment à la justice de Dieu, le Sauveur veut s'attrister, à cause de la mort qu'il doit subir en expiation de nos crimes, mort ignominieuse et cruelle, mort précédée de mille affronts et de mille tourments. Il aura beau prier son Père, il aura beau suer du sang, il devra bientôt s'humilier et obéir jusqu'à la mort, jusqu'au crucifiement ; il devra passer entre toutes les hontes et toutes les douleurs, comme une victime expiatoire, jusqu'à ce qu'il embrasse la croix et meure entre ses bras. Quelles répugnances en son humanité il lui faudra dompter auparavant ! « Mon âme sera triste, dit- il à ses trois apôtres privilégiés, jusqu'à ce que j'aie vaincu mes répugnances naturelles, jusqu'à ce que ma volonté soit morte à elle-même et ne vive plus qu'à Dieu ». Sommes-nous tristes, nous aussi, jusqu'à la mort de la nature ? Ne cherchons-nous de vraie joie que dans la mortification parfaite des appétits et des passions ?...

II. Jusqu'à la mort, c'est l'excès de l'amour. Un prodigieux amour fait que Jésus s'attriste de tous les délais, de tous les retards apportés à sa mort, parce que retarder son supplice c'est retarder notre Rédemption. « Oh ! que je souffre, s'écrie-t-il, jusqu'à ce que ce grand mystère soit accompli, quomodo coarctor usque dum perficiatur ! » (Luc 12, 50) ! Combien ce retardement me cause d'anxiété, d'impatience et de tristesse ! N'est-ce pas ainsi qu'un vaillant soldat s'afflige de voir retarder le signal de la bataille ? Ne pouvant plus tolérer ce délai, notre charitable Rédempteur s'abandonne lui-même à une si profonde tristesse, que tous les efforts de ses ennemis n'eussent jamais pu lui en causer une pareille, parce que la haine qu'ils ont contre lui, ne peut égaler l'amour qu'il a pour nous. Avons-nous cette sainte impatience de nous signaler au service de Dieu, de l'Église et de l'humanité ?...

III. Jusqu'à la mort, c'est la mesure de l'intensité. Suivant l'Écriture, un esprit triste dessèche les os (Proverbes 17, 22), et il est une tristesse qui fait mourir (2, Corinthiens 7, 10.) Incomparablement plus intense, plus accablante, plus excessive que toutes les autres, la tristesse de Jésus agonisant aurait dû mille fois lui donner la mort. « Mon âme est aussi triste, disait-il, que si je mourais déjà, que si j'expirais en ce moment. Cette tristesse serait même capable de m'ôter la vie, si je ne faisais un miracle e toute-puissance pour soutenir ma vie, jusqu'à ce qu'il me plaise de la sacrifier au milieu des tourments extérieurs, sur le Calvaire. Je puis dire encore que mon âme est triste, comme on est triste dans la mort éternelle ou dans l'enfer, non pas avec une rigoureuse égalité, mais avec une juste proportion. Je ressens la perte de chaque réprouvé, comme la perte d'un de mes membres, et je conçois une indicible tristesse de son malheur éternel ! » Sommes-nous disposés à faire pénitence pour les âmes, que nous voyons courir à leur damnation ?...

Lisez dans L'Agonie de Jésus, Liv. v, chap. VII « Jusqu'à la mort »

 

Pratique : Ne nous attristons jamais comme ceux qui n'ont point d'espérance ; mais faisons de notre tristesse même, comme le Sauveur en agonie, une expiation féconde. Sachons renoncer aux consolations, accepter la douleur et le sacrifice, pour la délivrance de nos chers défunts, pour le salut éternel des mourants de chaque jour.

 

Exemple

 

Les religieuses du Cœur agonisant de Jésus forment, à Lyon, une communauté contemplative et cloîtrée, qui ressemble d'autant plus au jardin des Oliviers, qu'on s'efforce d'y représenter matériellement, moralement et mystiquement l'agonie du divin Maître. Aux trois vœux ordinaires de religion, on ajoute le vœu particulier d'immolation, c'est-à-dire le vœu de s'offrir en sacrifice à Dieu le Père, en union avec le Cœur agonisant du Sauveur, pour le salut des moribonds. Il oblige chaque religieuse à l'offrande quotidienne de sa vie, et cette offrande sincère et formulée extérieurement fait écho à celle que le divin agonisant réitéra plusieurs fois, en s'attristant et en obéissant jusqu'à la mort pour notre salut. Voici cette formule abrégée :

« Dieu éternel et tout-puissant, quoique je sois très-indigne de paraître devant vous, me confiant néanmoins en votre infinie bonté, je m'offre très-humblement en victime à votre divine Majesté, en l'honneur et union du Cœur agonisant de votre très cher Fils Jésus. Daignez disposer de ma vie, de mes prières et de mes souffrances, selon votre bon plaisir, pour le salut de tous les mourants, spécialement des mourants de ce jour. Ainsi soit-il ».

De saints prêtres ont demandé et obtenu de mourir aussitôt après avoir dit la messe, afin que le sacrifice de leur vie, uni à celui de l'Agneau sans tache présent en eux, fût plus agréable au Seigneur.

 

Dixième jour

« Veillez en priant ».

 

Dès le début, le Sauveur dit aux trois disciples choisis : « Veillez et priez » (Matthieu 24, 38 ; Luc, 22, 40) ; dans le cours de son agonie, il le leur répéta (Matthieu 26, 41 ; Marc 14, 38). Il nous le répète aussi, parce que la vigilance et la prière forment tout le fond de la conduite chrétienne, sont un remède et un préservatif, conviennent à tous les âges et à toutes les conditions.

 

Méditation

 

I. Le divin Maître ne veut pas que la veille qu'il recommande à ses disciples, soit un temps employé à des choses profanes ; il veut qu'elle soit consacrée à la prière, à l'oraison, aux élévations de l'âme vers Dieu ; il veut qu'à sa passion ses apôtres les plus aimés unissent leur vigilante compassion, leur instante prière, vigilate et orate. Cet exemple apprend aux supérieurs à ne pas dédaigner le secours, si faible qu'il soit, que peut leur procurer la prière de leurs inférieurs, quand même ceux-ci sont visiblement imparfaits. Sans doute la pressante exhortation du Sauveur parut d'abord être sans effet sur Pierre, Jacques et Jean, puisqu'ils s'endormirent presque aussitôt ; mais plus tard elle porta son fruit pour eux, comme pour les vrais fidèles, en leur faisant prendre l'habitude de veiller avec Jésus et de veiller en priant. Avons-nous cette habitude ?...

II. Ce n'est pas la première fois que Notre-Seigneur exige cette union de la vigilance et de la prière ; car nous voyons dans saint Marc qu'il avait déjà dit : « Veillez et priez » (Marc13, 33), et dans saint Luc : « Veillez donc en priant toujours, vigilate itaque omni tempore orantes » (Luc 21, 36). Partout il met la vigilance avant la prière, parce qu'on prie mieux et plus volontiers, quand on sait veiller. La vigilance est une préparation à la prière, et on retrouve avec plaisir dans l'oraison les yeux du Maître, à qui l'on vient de donner par la vigilance une marque éclatante de fidélité. Pour aimer à prier, il faut veiller ; dans les entretiens avec Dieu, les goûts et les consolations ne sont accordés qu'au recueillement, et aux sacrifices de la vigilance. D'où vient ma sécheresse fréquente dans l'oraison ? N'est-ce point de mes égarements et de mes distractions volontaires ?...

III. Cette fois « Vigilate mecum, veillez avec moi et priez », est une harangue brève et militaire, que Jésus adresse à ses soldats, avant de livrer le dernier combat. C'est le discours d'un général, qui dispose à une grande bataille sa petite armée, affaiblie, fatiguée, vaincue par le sommeil et la tristesse, avant de l'être par l'ennemi. Il ranime son courage et lui promet la victoire, mais à la condition de faire, par la vigilance, tout ce qu'elle peut, et d'obtenir de Dieu par la prière ce qu'elle ne pourrait pas. Toute la tactique du combat spirituel est là. Qui arme l'esprit ? La prière. Qui désarme la chair ? l vigilance. Le soin de veiller sur nos pensées entretient la pureté du cœur, qui produit une prière enflammée ; à son tour, l'oraison rend l'esprit plus prudent à se garder lui-même. Prier sans veiller, c'est présumer de la grâce ; veiller sans prier, c'est présumer de ses propres forces. Cette double présomption n'a-t-elle pas préparé mes défaites ?...

Lisez dans « L'Agonie de Jésus », Liv, IX. chap. VI Union de la vigilance et de la prière.

 

Pratique : Cultivons la vertu de prudence, et accusons-nous d'y avoir manqué. Soyons fidèles à la pratique quotidienne de l'examen de conscience, général ou particulier. Que notre vigilance mette tout en œuvre, afin que les secours de la religion soient offerts aux mourants et aux malades ; que notre prière s'efforce d'obtenir que ces secours soient acceptés avec empressement.

 

Exemple

 

Après avoir tout repoussé, un moribond sort d'un profond assoupissement et s'écrie : « Quelqu'un a prié pour moi, car je suis tout changé ; amenez-moi un prêtre ! » Sa petite-fille avait prié au pied de son lit, et s'était offerte à tout souffrir pour son salut. À Lyon un fervent laïque, qui visitait souvent un vaste hôpital, faisait circuler chaque semaine une liste des personnes qui s'y trouvaient en danger de mort, afin qu'on priât à leur intention : aucune ne mourut sans être convertie. A Paris un curé disait : « Depuis que j'ai établi sur ma paroisse cette sainte ligue de la prière et de la vigilance, pour le salut des agonisants, personne n'y est mort, à moins que ce ne fût subitement, sans être réconcilié avec Dieu ». Formons partout de semblables ligues, redoublons de vigilance et de prière pour nos chers moribonds. Récitons même souvent, pour les quatre-vingt mille mourants de chaque jour, cette courte invocation qui, comme un germe précieux fécondé par la bénédiction du Pontife suprême en 1850, a été répandue par le souffle divin dans le monde entier, pour y faire croître et s'épanouir la dévotion au Cœur agonisant du Sauveur, et qui maintenant monte sans interruption vers le ciel, de tous les points du globe et en toutes les langues :

« Très Miséricordieux Jésus, plein d'amour pour les âmes, je vous en conjure par l'agonie de votre sacré Cœur, et par les douleurs de votre Mère immaculée, purifiez dans votre sang tous les pécheurs de la terre qui sont maintenant à l'agonie, et qui aujourd'hui même doivent mourir. Ainsi soit-il ».

« Cœur agonisant de Jésus, ayez pitié des mourants ! »

 

Onzième jour

Les séparation du Cœur

 

Notre-Seigneur s'avança dans le jardin des Oliviers, en laissant derrière lui, à la distance d'un jet de pierre, les trois apôtres qu'il aimait. Il s'en écarta par charité; mais cette séparation, prélude et présage de tant d'autres, fut si douloureuse pour son Cœur, qu'il fut comme arraché, et ipse avulsus est ab eis (Luc 22, 41).

 

Méditation

 

I. Combien plus douce est l'expression employée par l'Évangile, en parlant de la mort du Sauveur qu'en parlant de sa séparation ! S'il meurt, c'est lui-même qui rend son esprit, emisit spiritum (Matthieu 27, 30), qui donne son âme ou sa vie, pono eam a me ipso (Jean 10, 18) ; on n'a pas besoin de les lui arracher. S'il se sépare, ce n'est qu'en faisant effort pour s'arrachera ses disciples et aux hommes, avulsus est. Aussi le disciple bien-aimé ne dit pas l'heure de la mort, mais l'heure de la séparation, hora ejus ut transeat ex hoc mundo (Jean 13, 1). I1 avait reposé sur le Cœur du divin Maître, il était entré dans ce Cœur, il avait vu quelle place y tenait chacune de ces deux affections, chacun de ces deux amours, l'amour de la vie et l'amour des hommes, la crainte de la mort et la crainte de la séparation. Cette heure suprême était incomparablement plus dure au Sauveur du monde, comme heure de la séparation, que comme heure de la mort. Ce qui nous sépare de Dieu, le péché mortel, nous est-il aussi plus amer que le trépas ?...

II. Nous séparer des créatures nous est parfois, comme à Jésus, une dure agonie. Notre cœur ne tient-il pas à ses affections, comme notre corps à ses membres ? Quand le vaisseau qui nous porte, veut quitter le rivage du temps, pour nous déposer sur la rive inconnue de l'éternité, notre cœur se sent retenu à la terre par de suaves et fortes affections ; il s'y rattache par tous ses membres. Une lutte s'engage entre nos attachements et nos devoirs, nous avons une heure, plusieurs heures peut-être d'agonie. Il faut que le maître du vaisseau, l'arbitre de la vie, Dieu même, frappe un coup de hache qui coupe les membres de notre cœur, nous détache du rivage, et mette par la mort un terme à notre agonie. Ah ! N'attendons pas cette heure décisive, pour trancher dans le vif, pour rompre des liens coupables ou dangereux ; arrachons de suite notre cœur aux affections terrestres, excessives et despotiques...

III. Survivre à la séparation, survivre à un être uniquement aimé, devient parfois une agonie et une tentation. C'est une agonie, parce que c'est un rapide abaissement de la foi contre ces émotions et ces souvenirs, qui nous plongent dans la tristesse et nous noient dans les larmes. C'est une tentation, parce que le vide qui se fait autour d'un cœur, accoutumé à se sentir aimé et appuyé, l'expose à se refroidir pour son Dieu, à murmurer contre la Providence, à trancher même le faible et dernier fil de sa vie. Cette épouse, cette mère, qui a perdu tous les siens, ne sent-elle pas que son existence n'est plus qu'une lente agonie ? Son cœur est sans élan, sa piété sans joie, et sa vie considérablement abaissée se consume et s'éteint, dans d'obscurs combats, pour rester fidèle à la vertu. Avons-nous du moins profité de cette agonie de la séparation, comme le bon Maitre, pour prier davantage, prolixius orabat (Luc 22, 43) ?...

Lisez dans « L'Agonie de Jésus », Liv. I, chap. III L'agonie du Jardin

 

Pratique : Me conduire en homme convaincu que d'être appelé au christianisme, c'est être appelé à la séparation, et que toute vocation à l'apostolat ou à la perfection religieuse, est une vocation à une séparation plus complète. M'estimer heureux et me montrer empressé d'adoucir, pour les moribonds et les survivants, toutes les douleurs de la séparation.

 

Exemple

 

Les religieuses du Cœur agonisant savent, par expérience, qu'en se séparant de leurs familles, elles obtiennent à leurs parents une fin plus chrétienne. La Mère Supérieure écrivait : « Ici c'est un vieillard qui se réjouit de l'espoir que sa fille, religieuse dans notre communauté, lui obtiendra la grâce d'une sainte mort. En effet, il conserve jusqu'à la fin, avec le parfait usage de sa raison, les dispositions les plus chrétiennes. Là c'est un homme encore dans la force de l'âge, modèle de droiture et de délicatesse, mais infidèle, malgré ses convictions de foi, à la pratique de la religion, Dès qu'il tombe malade, une de ses parentes qui vit parmi nous, nous fuit partager à toutes son anxiété ; et, comme elle, nous demandons instamment au Cœur agonisant de Jésus cette âme qui lui est si chère. Dès les premiers jours, le malade demande le prêtre pour se réconcilier avec Dieu ; et, dans toutes les phases d'une maladie rapide et douloureuse, il exprime les plus admirables sentiments de résignation et de patience. Il expire, après avoir baisé avec amour le crucifix, et en prononçant le nom de Jésus. Du reste, je crois que ce serait faire injure au Cœur du divin Maître que de douter qu'en se dévouant, pour le salut des mourants, on obtienne de sa bonté des grâces particulières à ceux qu'on n'a quittés que pour lui ». Oui, tous les religieux, par la vertu de leur holocauste, parle mérite de leur séparation volontaire, ouvrent souvent le ciel à un parent, à tin frère, à un oncle, à un père dont la vie s'écoula loin de Dieu.

 

Douzième jour

La solitude du Cœur

 

Le Sauveur voulut être seul dans une grotte, sous un rocher, pour avoir la liberté de dire, de faire et de souffrir, durant sa prière, tout ce qui conviendrait aux saints mouvements dont son Cœur était agité. Fixons nos regards sur cette grotte de l'agonie, pour apprécier les avantages de la retraite, ou de la solitude chrétienne.

 

Méditation

 

I. Solitude signifie un lieu éloigné de la vue ou delà fréquentation des hommes, et l'état d'une personne qui vit seule, qui est retirée du monde. Le lieu doit nous servir de passage pour arriver à l'état. Il ne serait pas solitaire, au sens chrétien du mot, celui qui, vivant en un lieu écarté, porterait dans son cœur tout un monde profane. La vraie solitude du cœur nous fait participer à la vie de Dieu en lui-même ; car elle est l'image de cette solitude éternelle, que le Verbe goûte dans le sein du Père. Bornée au dehors, l'action de Dieu au dedans est infinie, action de l'intelligence par la connaissance, action de la volonté par l'amour : se connaître et s'aimer lui-même, c'est sa vie. Le plus grand désir d'un cœur solitaire n'est pas non plus de faire beaucoup au dehors, mais de vivre intérieurement de la connaissance et de l'amour de Dieu. Cette vie d'union le rend très-utile aux autres, par les grâces qu'il leur obtient et les bénédictions qu'il leur attire. L'estimons-nous ?...

II. La solitude du cœur nous fait participer à la vie de Jésus agonisant. Il ne se borne pas à nous offrir l'exemple de la retraite et de la prière, il nous donne l'esprit d'oraison, l'amour de la solitude et une part à ses souffrances morales. Car la solitude a ses peines, la retraite a ses heures d'angoisses, et les âmes contemplatives sont les plus exposées à l'agonie. Plus nous nous retirons des créatures, plus le Créateur semble quelquefois prendre plaisir à se retirer lui-même de nous. Il ne nous abandonne jamais réellement ; mais nous sentons une sorte d'absence ou d'éloignement de Dieu. Une nous tient plus sensiblement compagnie, la nuit se fait autour de nous et au-dedans de nous, la tempête éclate et soulève des montagnes de tentations et de difficultés dans notre solitude, comme un vent violent soulève des montagnes de sable dans le désert. Ainsi le Sauveur fut éprouvé dans la grotte. Savons-nous souffrir et résister comme lui ?...

III. Les profanations et les impuretés, les calomnies et les rapines, Les violences et les injustices, affluent de tous les pays et de les siècles vers ce Cœur solitaire et abandonné : elles s'y ramassent comme des eaux fangeuses, qui rendent sa contrition grande comme la mer (Thren. II, 13). De même que les torrents et les fleuves, par une pente naturelle, se précipitent vers l'océan pour s'y déverser et en grossir les flots ; ainsi tous les crimes du monde, tous les torrents du vice et de l'impiété, entrent par mille canaux dans le Cœur de Jésus, pour y grossir cette mer de douleurs. Mais en se mêlant dans la mer, les fleuves perdent le nom et la qualité de leurs eaux, tandis que les eaux impures du péché, qui enflent et qui noient le Cœur agonisant, y demeurent distinctes : chaque crime y est marqué de sa laideur particulière, chaque faute y conserve sa propre difformité. Ô mes péchés, vous lui étiez donc distinctement présents, pour le tourmenter !...

Lisez dans L'Agonie de Jésus, Liv. VI, ch. III. Ce que la solitude est pour nous.

 

Pratique : Pénétrons-nous bien de cette pensée : La solitude évangélique consiste dans l'éloignement de tout ce qui est de la terre, du monde et des hommes, et dans le rapprochement du ciel et de Dieu. Bénissons le Seigneur de tous ces abandons de nos proches et de nos amis, qui font souffrira notre cœur l'isolement et l'agonie.

 

Exemple

 

La bienheureuse Françoise d'Amboise avait gardé la virginité avec son mari, Pierre II, Duc de Bretagne. Devenue veuve, elle vit se liguer son père, ses oncles et le roi Louis XI, pour la contraindre à se remarier ; ils résolurent même de l'enlever, et gagnèrent à cet effet tous ses gens. C'était au printemps de 1462, dans la ville de Nantes. Enfermée, gardée à vue, Françoise mesura le danger ; mais quelle ressource lui restait-il ? une seule, celle qui ne manque jamais à l'homme abandonné, la prière. S'agenouillant donc, l'infortunée offrit à Dieu son isolement cruel, et son cœur brisé se répandit en supplications ardentes et résignées, comme autrefois le Cœur de Jésus au jardin des Oliviers. Elle priait avec tant de larmes et d'angoisses, qu'elle perdit beaucoup de sang par les narines, et se trouva plusieurs fois toute pâmée de douleur, à ce point que ses gardiens s'en effrayèrent, craignant qu'elle ne mourût. Ils lui rendirent donc la liberté. Mais le lendemain on prépara une litière pour l'y déposer de vive force, et des bateaux sur la Loire pour l'emmener à la cour de France. Elle se mit de nouveau en prière, et après minuit la glace couvrit le fleuve, depuis Nantes jusqu'à Mauves, liant ou brisant toutes les barques. Ainsi Dieu fit triompher de la violence des hommes une femme seule et délaissée. (E. de Kersabiec, La B. Françoise d'Amboise).

 

Treizième jour

La prière du Cœur Agonisant

 

Durant toute sa vie, la veille même de sa mort, en son agonie, Notre-Seigneur pria beaucoup pour lui-même et pour les autres. C'était une prière véritable et proprement dite, qu'il adressait ainsi à son divin Père. Il priait comme homme, mais d'une manière digne d'un Dieu, et son oraison était un moyen de nous obtenir de grandes grâces, comme sa mort en croix fut le moyen choisi pour nous racheter.

 

Méditation

 

I. Telle fut l'application du Sauveur à la prière, qu'il entra en agonie et sua du sang ; pour soutenir ou accroître encore son attention, il voulut prier du cœur et de la voix en même temps, orans et dicens (Matthieu 26, 39). Jésus prie du cœur : comme l'agonie a labouré, déchiré, brisé tout son Cœur, l'encens de la prière s'exhale de tout son Cœur. Nous, au contraire, nous avons souvent dans notre cœur des plis et des replis, d'où le parfum de la prière ne s'échappe pas, mais où le monde pénètre et avec lui ce qui nous distrait, l'amour des plaisirs et des vanités. Jésus prie de la voix ; mais ce n'est point par un effort de mémoire, c'est par l'effet d'une forte émotion qu'il prie vocalement. La prière vocale est-elle toujours, pour nous, le pied de l'échelle qui sert à monter vers Dieu, le moyen de recueillir et d'exciter notre âme, de produire par l'extérieur une émotion plus grande à l'intérieur ? Nous y recourons quelquefois par paresse, parce qu'elle exige moins. d'application. Quand donc comprendrons-nous que les exercices spirituels, comme les exercices militaires, veulent de l'attention, de la vigueur et de la persévérance ?...

II. Durant la prière, l'amour pour Dieu jaillit du Cœur agonisant de Jésus, comme une flamme impétueuse. Pourquoi demande-t-il à son Père ce qu'il pourrait avoir ou faire par lui-même ? parce que l'amour se plaît à demander, comme il se plaît à accorder, parce qu'il lui est doux de tout devoir à l'être aimé. Pourquoi soumet-il à la volonté de son divin Père tous ses désirs et toutes ses demandes ? pour lui prouver plus d'amour, en abandonnant tout à son bon plaisir. Dans nos prières, il nous faut aussi l'amour, un amour tout embaumé d'abandon et de conformité ; il nous faut vouloir uniquement ce qui plaît au Seigneur. Dieu travaillait à la gloire de son Fils, en n'éloignant pas le calice d'amertume ; ne travaille-t-il pas à notre vrai bonheur, en ne nous exauçant pas comme nous l'entendons quelquefois ?...

III. La charité pour le prochain, une charité active et pleine de sollicitude, accompagne aussi la prière de Jésus agonisant, puisqu'il l'interrompt trois fois, pour visiter ses disciples et les exhorter. Que les devoirs de la vie contemplative ne nous fassent donc pas négliger les devoirs de la vie active, les obligations et les vertus de notre état. L'aumône et le jeûne, la bienfaisance et la mortification, voilà quelles sont les mains de la prière : elle doit les lever toutes deux vers le ciel, pour être plus sûrement exaucée. L'Homme-Dieu, en son oraison, s'offrait comme victime pour le salut du monde ; que notre prière soit aussi vivifiée par des sacrifices, intérieurs ou extérieurs, pour l'Église et les âmes !...

Lisez dans L'Agonie de Jésus, Liv. VII, ch. I, Utilité de la prière dans l'agonie.

 

Pratique : Chaque jour récitons l'oraison dominicale, dans le même esprit et avec les mêmes sentiments, que le Sauveur en agonie fit ta prière, parce qu'elles ont toutes deux de nombreux rapports. Chaque année, le mardi de la septuagésime, fête de l'oraison de Notre-Seigneur sur le mont des Oliviers, examinons nos prières et nos oraisons, pour les rendre de plus en plus conformes à celles du Cœur agonisant de Jésus.

 

Exemple

 

La prière du soir est un souvenir de la prière du divin Maître au jardin des Oliviers. En beaucoup d'endroits, les fidèles se réunissent pour la faire à l'église, et les familles chrétiennes la font en commun, ainsi que les apôtres auraient dû la faire. Saint Charles Borromée, archevêque de Milan, établit dans son diocèse, en 1572, le pieux usage de prier tous les soirs, après la première heure de nuit, au signal donné par la cloche de l'église. Les personnes de la même maison étaient invitées à se réunir, et à prier ensemble pendant un quart d'heure. Le célèbre cardinal enseigna lui-même la manière de s'occuper durant cette oraison, et il obtint du Pape Grégoire XIII des indulgences, pour toutes les personnes qui prendraient cette louable habitude. Dans son homélie sur la passion, il rappelait à ses ouailles qu'il avait établi cette pratique, en mémoire de la prière de Jésus agonisant : « Ce fut selon sa coutume que le Sauveur alla, après la cène, prier sur le mont des Oliviers (Luc 22, 39). Milanais, mes chers fils, qu'elle est belle l'institution dont vous jouissez, lorsque le soir, à la seconde heure de nuit ou à peu près, au son de la cloche, en mémoire de cette très sainte coutume du Fils de Dieu, vous êtes invités à prier ! Certes, ceux qui veulent prouver qu'ils sont enfants de Dieu, et qui désirent avoir un même esprit avec Jésus-Christ, manquent à leur devoir, s'il n'adoptent pas cette sainte pratique, ou s'ils l'abandonnent ».

 

Quatorzième jour

La Face contre terre

 

Pour prier, Jésus agonisant mit les deux genoux en terre, positis genibus (Luc 22, 41). Ensuite saint Mathieu nous apprend qu'il tomba sur sa face, procidit in faciem suam (Matthieu 26, 39), et saint Marc qu'il tomba sur la terre, super terrain (Marc 14, 35). Il se prosterna donc et s'étendit sur la poussière.

 

Méditation

 

I. Le Sauveur en agonie prosterna tout à la fois son corps, son esprit et sa prière. Il tomba sur la face, sur la terre, en signe de la plus profonde vénération, pour fortifier par la posture de son corps les mouvements de son âme, pour lutter contre la tristesse, l'ennui et le dégoût dont elle était remplie, pour offrir à Dieu cette posture modeste et respectueuse, comme une compensation de ses répugnances et de ses frayeurs. Sa prière fut longue, il la recommença trois fois, il y fut soumis à toutes les épreuves intérieures ; néanmoins il resta constamment prosterné, comme un criminel, devant la majesté d'un Dieu irrité. Quelle condamnation de nos maintiens, qui favorisent presque toujours et la mollesse du corps et la mobilité de l'esprit ! Le Fils de Dieu garde l'attitude du dernier des hommes, et cette humilité attire sur lui une rosée de bénédictions, une pluie de grâces, qui font produire à l'opprobre et à la mort la gloire et l'immortalité. Mais quand notre céleste médecin se prosterne ainsi jusqu'à terre pour prier, nous, pauvres malades, nous daignons à peine nous incliner !...

II. Jésus tombe devant Dieu, comme représentant de tous les criminels, comme chargé de toutes les iniquités du monde. Ce poids l'accable, l'écrase, l'étend par terre, tandis que le pécheur impénitent se redresse, montre une impudence intolérable, et trouve son iniquité légère. Le Sauveur voudrait cacher à tous la honte qui couvre son visage, et il rougit de lever les yeux sur son divin Père. On dirait qu'il prend par avance le plan de sa croix, ou qu'il voudrait se cacher à lui-même la vue de nos péchés, en se faisant un bandeau de toute l'épaisseur de la terre. Mais la justice vengeresse le presse de tous côtés, et montre à ses regards tous les crimes dont il s'est chargé. Il en ressent cet accablement de l'affliction, qui produit une prostration des forces physiques, aussi bien que des forces morales. Et moi je ne me courberais pas sous le poids de mes propres iniquités ? Et moi je ne me tiendrais pas si humblement devant Dieu, que je puisse dire : « Mon âme s'est collée au pavé (Psaume, 25) ?...

III. Notre-Seigneur se penche, s'abaisse jusqu'à terre, afin de mieux apaiser son Père céleste, en cueillant pour lui-même une telle moisson de myrrhe, messui myrrham (Cantique 5,1), c'est-à-dire d'afflictions et d'épreuves, qu'il n'en reste plus pour nous qu'un bouquet, qu'une poignée, fasciculus myrrhae (Cant. i, 12). Comme le moissonneur se baisse, pour couper les épis plus près de terre, Jésus se prosterne pour faire plus complète cette moisson d'amertumes, de tristesses et de tourments. Et toutes ces gerbes de souffrances il les embrasse, il les étreint, il les presse sur son Cœur, il les baise comme il baisera Judas ! Que sont toutes nos mortifications et nos peines ? une poignée d'épis. Ah ! ne craignons pas de glaner après Jésus dans le champ de la douleur. Glanons-y en souvenir de lui et par amour pour lui. Dans nos prières prévoyons les épreuves, faisons provision de courage et redisons à Dieu : « Je suis prêt à souffrir, in flagella paratus sum » (Psaume 37, 18)...

Lisez dans L'Agonie de Jésus, Liv. VI, ch. V, Jésus tombe la face contre terre.

 

Pratique : Prosternons nos prières (Jérémie, 38, 36 ; 42, 9 ; Daniel 9, 18, 20) ; expression de l'Écriture tout à la fois énergique et naturelle, qui signifie que l'esprit doit être aussi prosterné que le corps, et la prière aussi humble que l'un et l'autre. Tout appel de Dieu à élever les autres, est un appel à descendre soi-même. Avec les prêtres et les religieux prosternés la face contre terre, abaissons-nous donc comme le Sauveur, pour élever comme lui les âmes.

 

Exemple

 

Au Bréviaire romain nous lisons, le 17 mars, que saint Patrick, apôtre de l'Irlande, fléchissait les genoux trois cents fois par jour pour adorer Dieu, et qu'il le faisait encore deux cents fois durant la première partie de la nuit. Nous y lisons de même, le 10 octobre, que saint François de Borgia, général de la Compagnie de Jésus, se mettait chaque jour cent fois à genoux, pour offrir à Dieu ses adorations. On sait que des personnes pieuses et mortifiées ont l'habitude de ne s'appuyer jamais, durant les plus longues oraisons, ni sur le prie-Dieu, ni sur le dossier de la chaise qui est devant elles. D'autres, quand elles ne peuvent être vues, aiment à tenir les bras élevés ou étendus en croix, durant la prière, comme faisait saint Antoine, patriarche des cénobites. Des religieux, pour la moindre faute, comme sous le poids d'un péché énorme, se prosternent et s'étendent sur la terre, pour que d'autres leur passent sur le corps, les foulent aux pieds. Ainsi se prosternèrent saint François d'Assise, le bienheureux Thomas de Cori, la fondatrice des Filles de la Charité, etc, etc...

 

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13 février 2017

Le Mois du Coeur Agonisant de Jésus

Le Mois du Cœur agonisant

dim20mars

En guise d'introduction

 

Le temps de la Septuagésime

 

Le temps de la Septuagésime est une période de trois semaines qui précède l’ouverture du carême. Le temps de la Septuagésime commence toujours la neuvième semaine avant Pâques et compte trois dimanches qui sont respectivement appelés dimanches de la Septuagésime, de la Sexagésime et de la Quinquagésime.

Ces appellations proviennent du système de comptage en usage dans l’antiquité et désignent la décade dans laquelle tombe chacun de ces dimanches : si en effet l’on divise les neufs semaines qui précèdent Pâques en séries de dix jours, on constate que le premier de ces neuf dimanches tombe dans la septième dizaine, le deuxième dimanche dans la sixième dizaine, le troisième dimanche dans la cinquième dizaine ; de là viennent leurs noms respectifs de dimanches in Septuagesima, in Sexagesima et in Quinquagesima.

Symboliquement, on fait correspondre ces (presque) septante jours aux septante années de la captivité à Babylone. Dans le symbolisme biblique et liturgique, Babylone représente la cité terrestre corrompue, opposée à Jérusalem, la cité de Dieu. La captivité à Babylone fut un châtiment : Dieu a permis que son peuple – vaincu et asservi – soit déporté en terre païenne. C’était la conséquence de ses infidélités répétées ; mais ce fut aussi le moyen radical d’une guérison car le peuple élu ne retomba plus ensuite dans l’idolâtrie.

Ainsi nous est rappelée la gravité du péché et ses conséquences dramatiques. Ainsi nous est montrée la nécessité de lutter contre les séductions du mal. Ainsi nous est enseigné à désirer ardemment de quitter la terre de l’exil – le péché -, pour revenir vers la patrie véritable – la grâce divine! L’existence de la liturgie septuagésimale est attestée au VIème siècle par un lectionnaire conservé à la bibliothèque de l’université de Wurtzbourg : ce manuscrit montre qu’à l’époque de Saint Grégoire le Grand, les épîtres et les évangiles du temps de la Septuagésime étaient ceux que nous avons aujourd’hui encore dans nos missels (pour la forme extraordinaire du rite romain, bien entendu).

Les lectures de ces trois dimanches sont particulièrement importantes : elles ont été choisies avec un très grand soin. Ce choix, leur répartition et leur progression manifestent une pédagogie remarquable tant par le sens que par son équilibre :

a) le dimanche de la Septuagésime nous fait entendre une épître fameuse rappelant la nécessité du combat spirituel (1 Cor. IX, 24-27; X, 1-5), tandis que l’Evangile nous fait méditer sur les ouvriers de la onzième heure (Matth. XX, 1-16) : de la sorte l’Eglise nous rappelle dans un même temps que nous avons à combattre avec une véritable pugnacité pour accéder au salut, mais que ce dernier sera toujours un don gratuit de Dieu, et qu’aucun homme ne pourra l’attribuer à ses mérites personnels.

b) dans l’épître du dimanche de la Sexagésime (2 Cor. XI, 19-33 ; XII, 1-9), nous entendons Saint Paul faire le résumé de toutes les épreuves qu’il a endurées mais au terme de cette énumération retentit cette sublime assurance : « Ma grâce te suffit, car Ma puissance s’accomplit dans la faiblesse ». L’Evangile de ce jour (Luc. VIII, 4-15) est celui de la parabole de la semence qui tombe en des sols variés avec l’explication donnée par Notre-Seigneur Lui-même : les hommes n’accueillent pas tous la Parole salvifique de Dieu de la même manière, ils ne sont pas égaux dans la façon dont ils lui font porter du fruit. Ces deux textes mis en parallèle nous redisent que si la toute puissante grâce de Dieu peut faire en nous des choses qui sont bien au-delà des capacités réelles de notre nature, nous ne sommes cependant pas dispensés de l’effort pour amender le terrain de notre âme si nous voulons que cette grâce y produise la plénitude de ses fruits.

c) au dimanche de la Quinquagésime, est proclamé l’hymne à la charité (1 Cor. XIII, 1-13) ; puis dans l’Evangile (Luc. XVIII, 31-43) Jésus fait l’annonce solennelle de Sa Passion et de Sa Résurrection – « Voici que nous montons à Jérusalem » – avant de guérir l’aveugle de Jéricho. Par là, l’Eglise nous engage à crier comme cet aveugle : « Fils de David, aie pitié de moi! » afin que soit guérie la cécité de nos coeurs, et pour que nous nous engagions résolument, en pleine liberté et intelligence (pas comme les apôtres dont cet Evangile nous dit qu’ils ne comprirent rien aux paroles de Jésus), dans les pas du Sauveur qui va accomplir le mystère pascal : or ce ne sont pas des déterminations, des qualités ou des prouesses humaines qui nous permettront de le faire, mais la seule charité surnaturelle.

On a pu dire du temps de la Septuagésime qu’il est le « vestibule du carême » : en effet, ces trois dimanches sont comme trois paliers qui nous conduisent, par une gradation très étudiée, jusqu’au seuil du grand temps liturgique où seront dispensées en abondance les grâces de la pénitence, de la conversion, de l’intériorité, de l’approfondissement de notre vie chrétienne et du salut... Cet « avant-carême » nous prédispose donc non seulement à y entrer mais surtout à y bien entrer. Ce n’est pas au matin du mercredi des cendres que nous devrons tout à coup nous mettre à penser aux efforts de conversion et de pénitence qui nous sont les plus nécessaires ; ce n’est pas le jour de l’entrée en carême que, de manière impromptue, nous devrons réfléchir à l’ascèse qui devra être la nôtre pendant ce temps et en déterminer les résolutions! Procéder ainsi serait le meilleur moyen de rater notre carême. Et voilà pourquoi l’Eglise – en Mère réaliste et en excellente pédagogue – a institué ce temps de la Septuagésime.

En nous mettant en face des enjeux de notre vie et de nos responsabilités,  le temps de la Septuagésime nous invite à une réflexion – raisonnable, méthodique et posée – sur la stratégie qui s’impose à chacun de nous pour faire progresser notre propre conversion à l’amour divin en vérité, en profondeur et avec efficacité.

Pendant le temps de la Septuagésime il n’y a pas encore d’obligation du jeûne, mais déjà les ornements sont violets ; les chants joyeux (Gloria in excelsis et Alleluia) sont supprimés. Aux Messes de semaine, seul le graduel est récité ; le dimanche et les jours de fête, il est suivi d’un trait qui remplace l’Alleluia. Aux Messes solennelles du temps, le diacre et le sous-diacre portent encore la dalmatique et la tunique, et l’on peut toucher l’orgue. Avant le code des rubriques de 1960, qui a aboli cet usage, le « Benedicamus Domino » remplaçait l’ « Ite, missa est » à toutes les Messes de férie.

À l’Office divin, l’Alleluia qui suit l’introduction « Deus, in adjutorium », est remplacé par « Laus tibi, Domine, Rex aeternae gloriae ». À la fin de Matines, le Te Deum est remplacé par un simple répons.

La veille de la Septuagésime, à la fin des vêpres, les chantres ajoutent deux Alleluia au « Benedicamus Domino » et le choeur deux Alleluia au « Deo gratias ». C’est la déposition de l’Alleluia, que nos pères appelaient «Clausum Alleluia» (Voir le texte de Dom Guéranger sur les adieux à l’Alléluia : http://leblogdumesnil.unblog.fr/2013/01/26/2013-12-les-adieux-a-lalleluia/)

Un chant particulier au temps de la Septuagésime est le répons « Media vita« , (dont vous pouvez – si vous le voulez – entendre un enregistrement par le moyen de la vidéo ci-dessous).

En voici la traduction :

Dès le milieu de la vie, nous voici à la mort : quel aide chercher, si ce n’est Vous, ô Seigneur? Vous, que nos péchés irritent avec raison : * ô Dieu Saint, ô Saint Fort, ô Saint Sauveur miséricordieux, ne nous livrez pas à l’amertume de la mort!

En Vous ont espéré nos pères : ils ont espéré et Vous les avez délivrés : * ô Dieu Saint…

Vers Vous crièrent nos pères : ils ont crié et ils n’ont pas été confondus : * ô Dieu Saint…

Gloire au Père et au Fils et au Saint Esprit. * Ô Dieu Saint…

 

Texte extrait du site http://leblogdumesnil.unblog.fr

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La Fête de l'Oraison de Notre Seigneur

Mardi de la Septuagésime

 

Jésus étant sorti s'en alla suivant, sa coutume au mont des Oliviers, et ses disciples le suivirent; et arrivé en ce lieu il leur dit « Priez afin de ne point entrer en tentation ». Et il s'éloigna d'eux de la distance d'un jet de pierre, et s'étant mis à genoux, il priait disant : « Père, si vous le voulez, éloignez de moi ce calice, cependant que votre volonté se fasse, et non la mienne ». Alors un ange du ciel lui apparut qui le fortifiait, et étant tombé en agonie il priait encore plus. Il eut une sueur, comme de gouttes de sang qui tombaient à terre.

L'Eglise consacre un jour de chacune des semaines qui précèdent la Passion à honorer d'un culte spécial une des parties de ce douloureux et ineffable mystère. Aujourd'hui, c'est l'oraison de Notre-Seigneur au jardin des Oliviers, qu'elle offre à la vénération et à la méditation de ses enfants. Ce qui émeut jusqu'au fond de l'âme dans le spectacle que nous offre la Passion, c'est la douceur inaltérable, le calme surhumain du Sauveur en présence de ce qui briserait le cœur le plus ferme.

Jamais on ne verra rien de semblable. C'est le sublime de la grandeur, le plus haut point d'élévation auquel l'homme puisse atteindre ; « s'en rapprocher, quoique toujours de loin, sera désormais le travail de ceux qui aspirent avec le plus d'ardeur à la perfection. Et néanmoins, comme pour les soutenir, comme pour encourager leurs efforts, cette perfection leur est montrée sous les conditions de la lutte, du combat intérieur inséparable de notre nature infirme. Aux approches de l'épreuve dernière, Jésus n'hésite pas certes, sa volonté n'est pas ébranlée un moment, mais le trouble envahit la partie inférieure de son être, il est triste jusqu'à la mort ; en proie à des angoisses, à une agonie plus terrible que le supplice même qui suivra, il ne le cache point, ne le dissimule point il veut au contraire que ses disciples en soient témoins, qu'ils en gardent le souvenir, afin d'y trouver un appui dans les involontaires défaillances de la chair, lorsque pour eux aussi viendra le jour du sacrifice ».

Le sacrifice se rencontre à chaque pas sur notre chemin. Les angoisses et les souffrances sont notre partage sur la terre le malheur est le roi d'ici-bas; et tôt ou tard, tout mortel finit par être atteint de son sceptre. Qui n'a pas ici-bas sa part aux infirmités humaines, sa croix à porter ? Toute créature est en travail, la vie humaine n'est qu'une longue plainte dont les échos montent vers le ciel. Jésus a voulu nous apprendre que la force pour supporter et souffrir se trouve dans la prière. A son exemple, adressons-nous à Dieu, il est le Tout-Puissant qui dirige tous les événements de ce monde il est la souveraine lumière qui éclaire toute intelligence.

Dieu est un bon Père, qui ne peut entendre les plaintes de ses enfants sans prêter l'oreille à leurs voix et sans apporter un soulagement à leurs misères. Mais n'oublions pas que s'il prie, que s'il arrose la terre de ses larmes et de son sang, c'est à cause des outrages dont nous nous sommes rendus coupables envers Dieu. Ce sont nos péchés qui rendent son âme triste jusqu'à la mort ; ce sont nos iniquités qui remplissent cette coupe qu'il demande à son Père d'éloigner de lui. Songeons à ne pas rendre ses souffrances inutiles, et disons-lui aujourd'hui avec l’Église : « Seigneur, qui, dans le jardin des Oliviers, nous avez appris, par votre parole et par votre exemple, à prier pour triompher des périls de la tentation, faites, dans votre bonté, qu'à travers les dangers et les obstacles de tout genre qui nous environnent, toujours appliqués à la prière, nous méritions d'en obtenir un fruit abondant, et par là, de parvenir sûrement au royaume du ciel ».

(Extrait des Petits Bollandistes, Abbé Guérin, Volume XVI)

 

Préface

 

Préparée à Paris, éclose à Vais près Le Puy, la dévotion au Cœur agonisant du Sauveur fut approuvée par le pape Pie IX, alors en exil ; le 2 février 1850, Sa Sainteté enrichit d'indulgences une prière rédigée par le R. P. Lyonnard, de la Compagnie de Jésus. Des confréries se formèrent bientôt en plusieurs villes ; celle de Jérusalem fut érigée en 1864, et transformée en archiconfrérie le 23 août 1867.

Plusieurs publications sont venues en aide à cette pieuse association, en ont expliqué les pratiques et entretenu l'esprit. Dans ce but, nous publiâmes nous-même plusieurs volumes,. « L'Agonie de Jésus » et « Le Cœur Agonisant » ; nous publions aujourd'hui un livre moins gros et plus populaire, en adoptant la forme d'un de ces Mois, qui sont si chers aux fidèles et si utiles aux âmes.

Toute époque où l'on se sent plongé dans l'affliction, est favorable pour faire le Mois du Cœur Agonisant. Le mois de juin, qui est le mois du sacré Cœur, paraît convenir aussi. Mais le mois de février convient mieux encore, parce qu'il devient ainsi une heureuse transition, entre les plaisirs du renouvellement de l'année et les austérités du carême. Nous conseillons même fortement de se régler sur la sainte quarantaine, de commencer ce Mois le quatrième jeudi avant le carême, le second avant la septuagésime, de manière que la fête de l'archiconfrérie du Cœur agonisant, l'oraison de Notre-Seigneur sur le mont des Oliviers, qui ne tombe jamais plus tôt que le 20 janvier, ni plus tard que le 24 février, toujours le mardi de la septuagésime, se rencontre le treizième jour, et que ces pieux exercices servent à s'y préparer, au moins durant une neuvaine. Ils se termineront le premier samedi de carême, par un hommage rendu au Cœur compatissant de Marie.

Chrétiens dévoués au Cœur agonisant de Jésus, méditez-en les angoisses, partagez-en les souffrances, et laissez votre cœur devenir un autel et un calvaire. La dévotion n'est-elle pas l'embonpoint spirituel d'une âme engraissée de charité ? Pendant un mois engraissez-vous d'amour, de compassion, de générosité, de dévouement et de patience, pour continuer l'œuvre du Cœur sacré du Rédempteur, en nous obtenant l'application des mérites de son agonie. Restez ensuite toute votre vie, comme durant ce mois, à l'école du divin agonisant, pour apprendre à compatir efficacement aux douleurs des autres, et à faire de vos propres agonies un apostolat fécond.

 

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Le Mois du Cœur agonisant de Jésus

 

Veille du premier jour

 

Lecture préparatoire

 

La dévotion au douloureux mystère du jardin des Oliviers, et la dévotion au Cœur de Jésus, ont une commune origine, les révélations de Notre-Seigneur à Sainte Marguerite-Marie, qui reçut de lui la pratique de l'Heure Sainte, et la mission de répandre le culte de son divin Cœur. Le Cœur agonisant c'est le Cœur même de l'Homme-Dieu, considéré dans son état passif, dans ses souffrances, ses angoisses, ses tristesses, ses craintes et ses ennuis, L'expression de Cœur agonisant était usitée dès les premières années du XVIIIe siècle.

Les peines intérieures commencèrent et finirent pour Jésus avec sa vie mortelle, et il y fait allusion quand il nous dit par la bouche du Psalmiste : « J'ai été dans le trouble, l'anxiété, les travaux dès ma jeunesse » (Psaume16). Mais il modérait à son gré cette agonie morale, et ce ne fut qu'à Gethsémani qu'il la laissa tourmenter pleinement son Cœur, et même déborder sur son corps. Aussi est-ce au jardin des Oliviers que tous les chrétiens fervents accourent en esprit, pour partager les souffrances de Jésus, pleurer avec Jésus, unir leurs cœurs au Cœur agonisant de Jésus.

Par la dévotion au Cœur agonisant du bon Maître, nous voulons d'abord lui offrir nos hommages et nos réparations, l'honorer dans ses douleurs et réparer les outrages qu'il reçoit. Nous voulons même prévenir ces outrages, les empêcher, en travaillant à convertir les pécheurs qui l'offensent, et surtout ceux que la mort va jeter dans l'éternelle damnation. Préserver de l'enfer, préserver de l'impénitence finale les quatre-vingt mille mourants de chaque jour, voilà l'objet principal de notre intercession, de nos supplications au Cœur agonisant de Jésus. Qui n'en voit l'opportunité ? Autrefois tout chrétien qui se sentait mourir, voulait se réconcilier avec Dieu, et en prenait lui-même les moyens. Mais aujourd'hui beaucoup de malades à l'extrémité ne veulent pas même voir le ministre de la réconciliation ; la société satanique des Solidaires travaille nuit et jour, à réaliser sa devise : Plus de prêtre, ni à la naissance, ni au mariage, ni à la mort. Elle séduit les faibles et les pauvres, par l'appât d'un enterrement civil où le nombre augmente le scandale.

Enfin le Cœur agonisant de l'Homme-Dieu est pour nous un objet d'imitation. Au dernier jour de sa Vie mortelle , le Sauveur voulut endurer trois passions, une passion eucharistique et sacramentelle sur le mont Sion, une passion mystique et intérieure sur le mont des Oliviers, une passion extérieure et sanglante sur la colline du Calvaire. Ces trois passions se continuent ou se réitèrent à travers tous les siècles. Tous les jours dans nos temples et sur nos autels Jésus lui-même continue, par le ministère du prêtre, sa passion eucharistique. Souvent au milieu des peuples civilisés ou barbares, dans les prisons ou sur les places publiques, la sanglante passion du Sauveur a été renouvelée, dans la personne des martyrs, par le ministère des bourreaux. En qui donc se réitérera sa passion intérieure ? En quelques âmes privilégiées, dont le cœur est tantôt un autel et tantôt un calvaire, mais quelquefois aussi une montagne et un jardin des Oliviers, où, sous la pression des épreuves mystiques et des souffrances morales, qui les réduisent à une agonie pire que la mort, coule l'huile de la prière et de la résignation, du renoncement et de la charité.

Le même religieux qui répandit la dévotion au Cœur agonisant de Jésus, publia « L'Apostolat de la souffrance », et propagea la société des victimes volontaires. N'est-ce pas le désir d'imiter le Cœur agonisant du Sauveur, qui a fait naître cette société, pour les besoins actuels de l'Église et des nations catholiques ? Plus un pays est souillé par les iniquités de ses habitants, plus il convient de le purifier et de l'assainir, en y introduisant les plantes salutaires issues du sang de Jésus-Christ, qui répandent autour d'elles une suave odeur de vie et de pureté ; plus il importe d'y établir des paratonnerres, qui détournent loin des têtes coupables les foudres de la divine justice, prête à éclater sur elles. Ces plantes, ces paratonnerres, ce sont toutes les communautés ferventes, ce sont particulièrement les victimes volontaires.

Dieu choisit indistinctement ces victimes spéciales, dans tous les rangs de la société chrétienne, et leur donne une large participation aux souffrances de son Fils unique, par conséquent à son titre de victime, à sa fonction de sauveur. La tendre prédilection qu'il a pour elles, le dispose à leur accorder des miracles de grâce, quand elles lui présentent leurs prières mêlées aux larmes, au sang et aux agonies de Jésus, ainsi qu'à leurs propres larmes et à leurs propres agonies. La Vierge-Mère fut au premier rang dans cette généreuse phalange ; vint ensuite saint Jean, le disciple bien-aimé du Cœur agonisant de Jésus, et l'enfant privilégié du Cœur compatissant de Marie. Puis, à toutes les époques de crise religieuse et sociale, le Seigneur suscita en nombre plus ou moins grand ces victimes cachées, dont l'action latente, comme celle de la grâce en chacun de nous, opère avec elle et par elle d'une manière intime et vitale.

Le but de ce Mois est de faire de nous des apôtres par la souffrance, aussi bien que par la prière. Soyons intercesseurs et suppliants, mais en même temps acceptons patiemment nos peines, nos maladies, toutes nos tribulations, la mort même pour l'Église et pour les âmes. Cet emploi apostolique de nos afflictions nous fera puiser, dans le Cœur agonisant de Jésus, les plus fortes et les plus suaves consolations. Peut-on mieux se consoler dans ses propres agonies, qu'en méditant les agonies d'un Dieu, et en soulageant les agonies des hommes ?

 

Premier jour

L'agonie continuelle

 

La continuité de l'agonie du Cœur en Jésus-Christ, depuis le premier instant de sa conception jusqu'à son dernier soupir, est attestée par les auteurs les plus graves, qui s'appuient sur le titre d'homme de douleurs donné au Messie parle prophète (Isaïe. 53, 3), et sur plusieurs paroles du psalmiste (Ps. 30, 11 ; 37, 18 ; 87, 16). Au jardin des Oliviers, il éprouva toute l'intensité de cette agonie.

 

Méditation

 

1. Pendant que les anges chantaient au-dessus de sa crèche : « Gloire à Dieu au plus haut des cieux, et paix sur la terre aux hommes de bonne volonté (Luc. 2, 14), Jésus disait en son Cœur ce qu'il devait redire sur le mont des Oliviers : « Mon Père, que votre volonté soit faite, et non pas la mienne (Luc 23, 42). Anges du ciel, pouvait-il ajouter, vous applaudissez à mon humiliation volontaire pour la gloire de Dieu et la paix des hommes. Vous êtes les avant-coureurs du céleste esprit, qui viendra me visiter dans une humiliation plus grande encore, dans la lutte de ma nature humaine contre ma volonté divine, lorsque je serai prosterné sur la terre, en proie à l'agonie et tout sanglant. En pensant à vous, je ne puis m'empêcher de penser à lui ». De même voyait-il des victimes ? Il savait qu'elles étaient la figure du sacrifice, qu'il consommerait par son immolation sur le Calvaire. Voyait-il Jérusalem ? Il savait que dans cette ville il perdrait la vie, au milieu des opprobres et des tourments. Regardait-il sa Mère bien-aimée ? Il s'imaginait la voir déjà debout au pied de sa croix. C'était pour son Cœur une continuelle torture. Pourquoi la vue d'un jardin, d'une fleur, d'un bouquet, ne vous ferait-elle pas aussi penser à ce jardin des Oliviers, à cette fleur des champs, à ce bouquet de myrrhe (Cant. 1, 12 ; 2, 1), tout arrosés de sueur et de sang ?...

II. Par la prévision de ses maux, Jésus endura dans son Cœur et pendant trente ans toutes les afflictions à la fois. De tous les organes de sa sainte humanité, son Cœur fut le premier et le dernier à souffrir : toutes les souffrances des autres membres s'y étaient ramassées. Il se faisait un flux et reflux continuel des peines de l'esprit au Cœur, et des peines du Cœur à l'esprit. C'était un calice qui se remplissait à tout moment, et que le Sauveur buvait aussi sans relâche et jusqu'à la lie. Ce qui rendait ce calice plus amer, c'était la certitude que ses peines seraient en partie inutiles ; ce qui rendait cette agonie plus poignante, c'était de savoir qu'après tant de combats il ne remporterait pas une victoire plus achevée, Il pensait non-seulement aux idolâtres, aux juifs, aux mahométans, à qui les mérites de sa passion ne seraient point appliqués ; il pensait encore aux chrétiens qui foulent aux pieds le Fils de Dieu, et souillent le sang du Testament (Heb. 10, 29). Ne pensait-il point aussi que, devenu notre juge, il nous demanderait un compte sévère du sang que nous avons profané ?...

III. Notre-Seigneur avait sans cesse sous les yeux les supplices de tous les martyrs, et il en discernait les détails les plus horribles ; il voyait les tribulations de tous les affligés, toutes les indigences et toutes les persécutions. Combien ne souffre pas une mère qui voit souffrir son enfant ! Or, Jésus nous aimait incomparablement plus qu'une mère. Si la tendresse de toutes les mères se réunissait en un seul cœur, ce serait moins qu'une étincelle en comparaison de l'incendie de charité qui dévorait le Cœur de l'Homme-Dieu. Chacune de nos souffrances faisait une plaie à cet aimable Cœur, qui, percé de tant de blessures, ne conservait la vie que par miracle. Il était devenu le confluent de toutes nos douleurs, et le calvaire où toutes nos croix étaient plantées. Jamais l'esprit humain ne comprendra quelle agonie, quel martyre, le Cœur du Fils de Dieu endura, depuis l'incarnation jusqu'à la mort, par sympathie et commisération pour nous. Quand nous sommes affligés, est-ce une consolation de savoir que toutes nos peines ont passé par le Cœur de Jésus, qu'il les a le premier ressenties et portées par amour pour nous ? En sommes-nous plus généreux à les porter par amour pour lui ?...

Lire dans l'Agonie de Jésus du Père Blot, livre I, le chapitre II « L'agonie de Nazareth »

 

Pratique : Ne nous faisons pas un christianisme mitigé, un christianisme à concessions, un christianisme sans combat. Ne nous plaignons plus de la longueur de nos souffrances et de nos épreuves. Mais consentons que notre vie soit comme celle des saints, comme celle de Jésus, une continuelle agonie.

 

Exemple

 

« Je trouve dans la vie de sainte Catherine de Gênes, dit le P. Eudes, qu'un jour Dieu lui fit voir l'horreur du moindre péché véniel, et elle assure que, quoique cette vue ne durât qu'un moment, elle vit néanmoins un objet si effroyable que le sang lui glaça dans les veines, qu'elle tomba dans l'agonie, et qu elle serait morte si Dieu ne l'avait conservée miraculeusement, pour raconter aux autres ce qu'elle avait vu. Ensuite de quo elle disait que, si elle était dans le plus profond d'une mer de feux et de flammes, et qu'il fût en son pouvoir d'en sortir à la condition de voir encore une fois en sortant de là une chose si épouvantable, elle aimerait mieux y demeurer que d'en sortir à cette condition. Or, si la vue du moindre péché véniel a mis cette sainte dans un tel état, que faut-il penser de l'état auquel notre Sauveur a été réduit par la vue de tous les péchés de l'univers ? Car il les avait tous continuellement devant les yeux, et sa lumière étant plus grande infiniment que celle de sainte Catherine, il y avait plus d'horreur infiniment qu'elle n'y en voyait. Tous ces péchés et toutes ces vues navraient son Cœur d'une infinité de plaies ». (Eudes, le Cœur admirable, T. II, liv. VI, ch. 10).

 

Deuxième jour

Une coutume de Jésus

 

Accomplissant les figures et les prophéties, Jésus sort de Jérusalem, traverse le torrent et la vallée du Gédron, malgré les ténèbres de la nuit, et va là où il sait qu'on viendra le trahir et le prendre. Pourquoi ? Pour rester fidèle à son habitude d'aller prier Dieu, le soir, sur le mont des Oliviers.

 

Méditation

 

1. Notre-Seigneur avait coutume de rendre grâces publiquement, de prier, après chaque repas ; il le fit encore la veille de sa mort, après avoir mangé l'agneau pascal et institué l'Eucharistie. Les religieux l'imitent, en nourrissant leur esprit par une lecture durant le repas, et en visitant aussitôt après le Saint Sacrement ou quelque pieuse image, pour nourrir leur cœur par la prière. Imitons-le aussi, en prenant la nourriture du corps avec tempérance et modestie, afin que l'âme puisse toujours se nourrir d'oraison, afin que nos repas mêmes glorifient le Seigneur. Soit que vous mangiez, soit que vous buviez, dit l'Apôtre, faites tout pour la gloire de Dieu (1 Cor. 10, 31). Le fait-on d'ordinaire parmi nous ? Parfois ne contentons-nous pas nos sens, de manière que l'excès de la nourriture appesantisse notre âme et l'empêche de prier ? Combien même de chrétiens aujourd'hui qui, comme les païens d'autrefois, ont l'idolâtrie du ventre, adorent le dieu ventre, (Philippiens 3, 19), se montrent plus fidèles à servir leur ventre qu'à servir Jésus-Christ (Romains 16, 18) ?...

II. Sous le coup des plus dures épreuves, le Sauveur n'interrompt ni ne change ses pieuses habitudes. Il n'ignorait rien de ce qui l'attendait au jardin des Oliviers, et saint Jean nous fait remarquer que c'était un lieu bien connu de Judas, parce que le Maître et les disciples s'y étaient fréquemment réunis (Jean 18, 2). La certitude d'y être facilement trouvé, pris, garrotté, ne suffit pas pour que Notre Seigneur manque à une sainte coutume. En est-il ainsi de nous ? Une mince contrariété, une légère fatigue, un malaise imaginaire, la moindre crainte, celle d'une critique, d'une raillerie, d'un regard ou d'un sourire désapprobateur, nous font interrompre nos meilleures coutumes, omettre nos exercices de dévotion, quelquefois même nos devoirs de religion, comme l'assistance à la messe, la communion, l'abstinence...

III. Les habitudes du divin Maître venaient d'une conviction si profonde et d'une volonté si ferme, qu'il allait, sortait, entrait, priait selon sa coutume, et non point par coutume. Nous, au contraire, que de choses nous faisons par simple habitude, par routine, machinalement, sans élan ni entrain, sans esprit intérieur ni générosité spirituelle ! Si nos lèvres récitent une formule, notre mémoire seule y prend part, notre cœur est loin de Dieu (Matthieu 15, 8). N'est-ce pas même parce que notre piété est comme un corps sans âme, que nous sommes souvent renversés par le choc de la tentation, ou du moins arrêtés dans notre marche Vers la perfection ? Cœur agonisant de Jésus, venez combattre le sensualisme et la mollesse de notre siècle ; venez nous aider à prendre des habitudes austères et viriles, qui nous fassent avancer encore, comme par la force d'une vitesse acquise, quand les résistances de la nature et du monde voudraient nous ralentir et nous entraver !...

Lisez dans L'Agonie de Jésus, liv. IV, chap. II, Le passage du Cédron.

 

Pratique : Mettons autant de régularité à nourrir notre âme qu'à nourrir notre corps. Durant l'agonie morale, le trouble et l'obscurité, ne faisons aucun changement à nos bonnes résolutions, mais changeons-nous courageusement nous-mêmes. Soyons fidèles à passer chaque année un mois au jardin des Olives, à faire l'Heure Sainte chaque semaine, malgré les dégoûts, les contradictions, les ennuis et les tristesses.

 

Exemple

 

La pratique de l'Heure Sainte, dont le parfum suave et discret embaume aujourd'hui toute l'Église, nous vient de Sainte Marguerite-Marie Alacoque, religieuse de la Visitation, à laquelle Notre-Seigneur confia le soin de cette plante bénie. Elle rapporte ainsi le commandement qu'il lui donna : « Toutes les nuits du jeudi au vendredi, je te ferai participer à cette mortelle tristesse, que j'ai bien voulu ressentir au jardin des Oliviers, et cette participation à ma tristesse te réduira à une espèce d'agonie plus rude à supporter que la mort. Tu m'accompagneras dans cette humble prière, que je présentai alors à mon Père parmi toutes mes angoisses, et pour cela tu te lèveras entre onze heures et minuit, et tu demeureras prosternée avec moi pendant une heure la face contre terre, tant pour apaiser la divine colère, en demandant miséricorde pour les pécheurs, que pour honorer et adoucir en quelque façon l'amertume que je sentis alors de l'abandon de mes apôtres ; ce qui m'obligea de leur reprocher qu'ils n'avaient pu veiller une heure avec moi. Tu feras pendant cette heure-là ce que je t'enseignerai ». (Mémoire de Sainte Marguerite-Marie, n° 37).

 

Troisième jour

Le Mont des Oliviers

 

Où se rend le divin Maître, en sortant de Jérusalem, suivi de ses disciples ? Sur le mont des Oliviers. Comme l'olive sous le pressoir, son Cœur veut y être serré, pressé, torturé par toutes les douleurs morales, pour répandre plus abondamment l'huile de la miséricorde et de la paix, l'huile de l'espérance et de l'amour.

 

Méditation

 

I. Pourquoi le Sauveur choisit-il une montagne, pour en faire le lieu de sa prière ? Il nous avertit de rechercher dans nos prières ce qui est haut et sublime, c'est-à-dire de faire des biens célestes, des intérêts éternels, l'objet principal de nos demandes. A mesure qu'il gravit la hauteur sur laquelle il va prier durant trois heures, il nous crie : « Les cœurs en haut ! Ne permettez pas que vos cœurs soient appesantis ou abaissés par le soin des choses inférieures ; mais que la sainte prière soit toujours pour vous une ascension de l'âme vers Dieu, une élévation des pensées et des désirs ! Hélas ! combien de fois nos prières ont-elles été boiteuses, ou se sont-elles traînées sur la terre ?...

II. Pourquoi l'Homme-Dieu choisit-il une montagne, pour y commencer sa passion, pour y livrer son Cœur à l'agonie ? Il nous apprend que son corps mystique doit se transfigurer sur le mont des Oliviers, comme son corps réel se transfigura sur le Thabor ; il nous apprend que les lieux où nous souffrons, sont pour nous le chemin de la gloire, et que la douleur prépare nos corps eux-mêmes à l'ascension glorieuse. Car de ces mêmes sommets où ils vont le voir souffrir cruellement, ses disciples le verront bientôt remonter glorieusement dans les deux. Partout où nous souffrons, disons donc avec saint Pierre sur le Thabor : « Il est bon que nous soyons ici » (Matthieu 17, 4). Ne nous tarde-t-il pas, au contraire, de changer de lieu ou d'emploi ? Nous descendons du mont des Olives, où la patience nous aurait transfigurés, nous rampons dans la plaine , nous restons des chrétiens vulgaires, parce que nous ne voulons faire effort ni pour rectifier notre conduite, ni pour élever nos sentiments, ni pour mettre notre cœur en harmonie avec le Cœur agonisant de Jésus...

III. Pourquoi encore le mont des Oliviers ? Parce que l'olivier est le symbole de l'espérance et de la paix. Des hauteurs du mont des Oliviers, le Sauveur découvre tout l'univers et l'histoire de tous les siècles, tous les lieux et tous les temps où nous serons agités, battus, brisés par les tempêtes ; il promène ses regards sur la mer orageuse du monde, où il voit tant d'âmes en péril, où il compte tant de malheureux qui ont déjà sombré, par imprudence et par faiblesse. Il leur crie : « Espérance, espérance, ô pauvres naufragés ! Je vous apporte la paix et le pardon, je vous envoie deux planches de salut, qui sont la souffrance et la prière : profitez-en, vous reviendrez tranquillement au port ! En profitons-nous ? Savons-nous espérer, souffrir et prier ?...

Lisez dans L'Agonie de Jésus, liv. III, ch. IX L'Espérance

 

Pratique : Quels que soient mes troubles, mes tentations, mes adversités, j'espérerai en Dieu quand même. Dans mes prières pour moi et les autres, je demanderai surtout les biens spirituels et célestes. Après mes exercices de piété, si agonisant que soit mon cœur, je montrerai à tous quelque chose de plus pacifique et de plus confiant, aux miens plus d'amabilité, aux malheureux plus de dévouement.

 

Exemple

 

 

L'exercice de l'Heure Sainte fleurit maintenant dans l'Église entière. Il a donné naissance à une archiconfrérie, dont le siège est à Paray-le-Monial, et que le pape Grégoire XVI, en 1831, dota de précieuses indulgences. Chaque semaine, au jour et à l'heure où le Fils de Dieu, prosterné la face contre terre, répandait une sueur de sang, un grand nombre d'âmes pieuses se dérobent aux douceurs du sommeil, pour tenir compagnie à Jésus agonisant, pour appliquer activement toutes leurs facultés à ses souffrances intérieures, et pour échapper au reproche qu'il adressa aux premiers témoins de son agonie : « Quoi ! Vous n'avez pu veiller une heure avec moi ? » (Matth. 24, 40). En certaines paroisses, comme à Bréauté, au diocèse de Rouen, cet exercice se fait collectivement le jeudi soir par les hommes seuls, par les confrères, qui passent une heure devant le saint Sacrement, en prières ou méditations, à genoux ou assis. Ils se proposent, de consoler ainsi le Cœur du bon Maître, et d'obtenir une part de ses miséricordes. Dans plusieurs communautés, comme celle du Cœur agonisant, à Lyon, toutes les religieuses se rendent à la chapelle vers le milieu de la nuit. L'une d'elles lit à haute voix ce que les Évangélistes nous apprennent, sur l'agonie de Notre-Seigneur au jardin des Oliviers. Toutes se prosternent, unissent leur prière à sa prière, leur sacrifice à son sacrifice, et s'offrent avec lui comme victimes à son divin Père. Avant de se retirer, on l'ait une amende honorable au Cœur agonisant de Jésus, qu'on adore dans le tabernacle, comme dans la grotte de Gethsémani.

 

Quatrième jour

Le jardin de l'Agonie

 

Sur le mont des Oliviers, Notre-Seigneur laissa huit de ses apôtres dans une ferme nommée Gethsémani, en leur permettant de s'asseoir ; il prit Pierre, Jacques et Jean, leur recommanda de veiller avec lui, et les introduisit dans un jardin, ubi erat hortus (Jn 28, 1). Le premier Adam nous avait fait tomber avec lui dans le jardin de délices : le second Adam nous releva par ses expiations volontaires, dans le jardin de l'agonie.

 

Méditation

 

I. Dans le paradis terrestre, nos premiers parents laissèrent s'allumer en eux cette soif de jouissances, qui ne devait plus s'éteindre dans leur postérité ; pour jouir ils foulèrent aux pieds leur devoir, leur bonheur et le nôtre. Jésus-Christ fait du jardin des Oliviers le lieu de sa pénitence, le temple et l'autel de son sacrifice ; il est lui-même le prêtre et la victime de son holocauste. Comme le premier châtiment infligé par le Seigneur à nos coupables parents, fut de les abandonner à eux-mêmes, en sorte qu'ils devinssent leurs premiers bourreaux, et que le remords fût leur première peine : ainsi le divin Réparateur veut paraître abandonné, se tourmenter lui-même, être son propre sacrificateur. N'hésitons pas non plus à nous imposer à nous-mêmes, par esprit de pénitence, des sacrifices et des privations...

II. Dans le jardin de délices, l'homme se cacha et Dieu se montra, l'homme par honte et Dieu par justice. Dans le jardin de l'agonie, c'est l'homme qui se montre et Dieu qui se cache. Dieu se cache, Deus abscondilus (Isaïe 45, 15), pour laisser souffrir son Fils notre Rédempteur ; l'homme se montre, vir dolorum (Isaïe 53, 3), pour endurer toutes les souffrances morales, être garrotté par les bourreaux et conduit au supplice. Quand aurai-je le courage de dire à Dieu : Cachez-vous pour moi, Seigneur ? Retirez-moi vos consolations, vos douceurs, toutes les délices sensibles de la dévotion, le sentiment même de votre assistance, pour que je souffre davantage, pour que mon sacrifice et ma fidélité soient plus méritoires !...

III. Au milieu de l'Éden, nous étions en Adam comme les rameaux dans l'arbre, et il nous communiqua le virus du péché originel. Chacun de nous n'est plus qu'un olivier sauvage, oleaster, suivant l'expression de saint Paul ; Jésus-Christ seul est l'olivier franc, sur lequel il faut que nous soyons entés pour porter de bons fruits (Romains 11, 17, 24). Pourquoi dans le jardin des Oliviers ouvre-t-il toutes ses veines, tous ses pores ? Pour s'unir et s'incorporer par toutes ces ouvertures, pour enter sur sa propre tige, tous ces oliviers sauvages et stériles qui sont les rejetons d'Adam. Il entre en agonie pour nous rendre participants de sa sève vitale, pour nous remplir du suc de sa grâce et de son amour. Demeurons en lui pour porter du fruit, et souffrons avec lui pour en porter plus encore. Cœur agonisant de Jésus, mon âme est devant vous comme une terre sans eau (Psaume 142, 6) ; visitez-la par votre miséricorde, pour l'enivrer de générosité, pour la rendre de plus en plus féconde !...

Lisez dans « L'Agonie de Jésus », Liv. IV, ch v Le jardin de délices et le jardin de l'agonie

 

Pratique : Me bien convaincre que, si Dieu paraît m'abandonner ou se cacher dans mes épreuves, c'est pour mieux les marquer au coin de son Fils, c'est pour en faire une monnaie qui ait plus de valeur. — Ne jamais blâmer les austérités des saints, mais estimer le droit à la souffrance innocente et libre, en user même quelquefois comme le divin agonisant.

 

Exemple

 

Une âme pieuse qui a expérimenté la manière passive défaire l'heure-sainte, écrivait à son directeur : « Je commence par me rendre en esprit au jardin de l'agonie, et je m'offre tout entière à Notre-Seigneur avec mon âme, mon esprit, mon cœur, mon corps, pour éprouver tout ce qu'il voudra pendant cette heure. A peine ai-je fait cette offrande, que mon âme est saisie d'effroi, d'épouvante ; elle se sent comme mourir, à la pensée des tourments qu'elle commence à endurer, et qui ne sont rien pourtant en comparaison de ceux qu'elle aura à souffrir, vers le milieu et vers la fin de cette heure d'angoisses. Le péché universel se montre à ma vue, et Notre-Seigneur me fait comprendre l'outrage qu'en reçoit la Majesté divine. C'est là le plus grand des supplices ; car il nous semble que Dieu nous revêt de ce péché, qu'il est nôtre, et qu'il nous en reste l'expiation. Je ne saurais vous dire ce qui se passe alors. On se sent accablé de tout le poids de ce péché, une sueur froide s'étend sur tout le corps, et l'âme est livrée aune telle torture intérieure que l'enfer semblerait un paradis, s'il était permis d'échanger un instant les tourments de l'enfer, pour ce supplice absolument inexprimable. L'esprit est enveloppé de ténèbres, livré à la crainte, à la tristesse, au dégoût, sans savoir précisément de quoi. On se sent plutôt écrasé par la justice du Père éternel, que sous la dépendance de Notre-Seigneur lui-même, pour partager toute son agonie. Il est rare que, dans ces moments indicibles, j'aie le sentiment de moi-même ; je ne sais plus si j'existe, je suis comme transsubstantiée en douleur ».

 

Cinquième jour

L'affliction du Cœur de Jésus

 

Le Cœur de l'Homme-Dieu avait toujours été agonisant ; mais dès qu'il entre au jardin des Oliviers, avec trois disciples choisis, il commence à sentir plus vivement la tristesse et le chagrin, cœpit contristari et mœstus esse (Matthieu 26, 37), parce que rien ne l'y soulage plus de ses ennuis et de ses craintes, de ses dégoûts et de ses douleurs.

 

Méditation

 

I. Pourquoi Notre-Seigneur veut-il tant souffrir au jardin des Oliviers, sans même attendre son arrestation ? Victime totale et universelle, il aurait voulu souffrir depuis le commencement du monde jusqu'au dernier jugement, afin d'égaler le plus possible sa souffrance à son amour. Ce vœu ne pouvant être exaucé, il entre volontairement en agonie, pour compenser la durée par l'intensité, pour récapituler en soi toutes les afflictions, et faire de son Cœur le confluent de toutes les douleurs. Il s'enferme dans le jardin comme dans une prison, afin que toutes les tortures morales viennent l'y assaillir, comme les soldats viendront l'y prendre. Nous aussi, quand nous avons moins longtemps à souffrir, désirons-nous souffrir plus violemment ? Ne cherchons-nous pas à diminuer la violence comme la durée de nos peines ?...

II. Si pour cette Agonie le Sauveur choisit le temps, qui précède immédiatement son arrestation, c'est afin de mettre plus en évidence et la générosité de sa conduite, et la liberté de son sacrifice : sa générosité, quand il ira lui-même au-devant de ses persécuteurs ; sa liberté, quand il achèvera sur le Calvaire, au milieu clés bourreaux, le sacrifice qu'il commence lui-même, sans nulle violence du dehors, sur le mont Olivet. Il est le maître des agitations de son Cœur, et tandis que ce sont nos passions qui nous remuent, c'est lui qui remue ce qui dans son Cœur tient lieu de nos passions ; il souffre quand il lui plaît, autant qu'il lui plaît et de la manière qu'il lui plaît. Il s'émeut comme un homme, mais avec la générosité et la liberté d'un Dieu. Nous, au contraire, nous usons le plus souvent de la liberté qui nous est laissée, pour nous soustraire à la peine, à la souffrance...

III. Durant tout le cours de sa vie, le bon Maître avait parlé de sa passion avec joie, comme d'un baptême désiré, Gomme d'une heure impatiemment attendue. Maintenant il avoue que son âme est troublée, il prie son Père de le préserver de cette heure-là (Jean 12, 27). Mais ne faut-il pas qu'il aille à la mort avec tremblement, puisqu'il doit y aller comme un criminel ? Sur la croix il montrera la grandeur de son pouvoir divin ; au jardin il veut montrer la faiblesse de sa nature humaine. Là nous le verrons dans l'acte même de sacrificateur ; ici nous le voyons dans l'état de victime. Aimons-nous cet état de victime ? Pour mieux ressembler à Jésus agonisant, acceptons-nous volontiers d'être victimes des événements, de l'injustice et de la calomnie ?

Lisez dans « L'Agonie de Jésus », liv. Il, chap II Jésus a vraiment souffert intérieurement

 

Pratique : Baisons quelquefois la terre avec respect, en souvenir de cette terre bénie sur laquelle Notre-Seigneur colla ses lèvres, et répandit la précieuse rosée de son sang : il s'en exhalera un parfum de patience et d'humilité, qui embaumera notre âme et ranimera notre courage. — Pour mieux puiser un surcroît de forces dans le Cœur agonisant, tenons-lui compagnie, veillons souvent avec lui, dans nos joies comme dans nos peines.

 

Exemple

 

Plusieurs âmes illustres ont éprouvé dans l'extase les afflictions du Cœur de Jésus, ont fait l'Heure-Sainte d'une manière extatique. Marguerite du Saint-Sacrement, carmélite de Beaune, fut transportée dans un ravissement au jardin des Oliviers, où le Sauveur lui communiqua la tristesse de son âme, ses craintes, sa sueur de sang, son agonie, et les imprima en elle autant qu'elle fut capable de les supporter. Pendant les deux premières heures, elle demeura le visage collé contre terre, versant des larmes avec tant d'abondance que toute la communauté en était vivement émue. Elle se releva ensuite, se tint droite pendant un quart d'heure, les yeux élevés au ciel, tremblante et paraissant fort effrayée ; après quoi elle se prosterna de nouveau. Insensiblement on vit son corps se courber, et sa tête se pencher à terre avec une indicible expression de terreur, jusqu'à ce que ne pouvant soutenir le spectacle déchirant de l'agonie et des douleurs infinies de son Maître, elle retombât la face contre terre, s'abandonnant à Dieu, comme avait fait Jésus-Christ, pour porter sa croix et le fardeau des péchés du monde. Au moment où elle aperçut en esprit la troupe conduite par Judas, elle se leva calme, sereine, avec un front plein de majesté. Peu d'instants après, ses mains se fixèrent Tune sur l'autre, comme si elles eussent été liées avec des cordes, dont les marques s'imprimèrent si fortement dans les chairs, que les carmélites apercevaient très-distinctement deux longues enflures, qui semblaient suivre toutes les sinuosités de la corde et former deux espèces de bourrelets. (Louis de Cissey, Vie de, Marguerite du St Sacrement).

 

Sixième jour

Les craintes du Cœur de Jésus

 

Celui que l'Écriture appelle le lion de la tribu de Juda (Apocalypse 5, 5), daigne commencer son agonie par la crainte, cœpit pavere (Marc 14, 33). Tel est l'excès de sa frayeur qu'il en est ébranlé, qu'il implore l'assistance de ceux mêmes dont il n'espère rien. C'est ainsi qu'il expie notre présomptueuse sécurité.

 

Méditation

 

I. Si le démon avait connu la divinité du Fils de Marie, s'il avait su que sa mort serait le salut du monde, il n'aurait point poussé les Juifs à le mettre en croix. Mais trompé par les apparences, il crut qu'il ne risquait rien en traînant au supplice un homme, dont la doctrine et les vertus excitaient sa haine. La crainte de Jésus est un appât pour prendre Satan à l'hameçon. Quel est cet hameçon ? la divinité, que le Sauveur cache sous le ver de son corps timide et tremblant. Le démon tout joyeux accourt pour dévorer l'humanité, le ver qu'il voit plongé dans les eaux de la douleur et de la crainte ; mais il est pris lui-même par l'hameçon, par la divinité. En manifestant son effroi, sa crainte de la mort, le Fils de Dieu provoque ses ennemis invisibles à le faire mourir, par un supplice qui anéantira leur empire. Et nous, dans nos combats pour la conquête du ciel, ne négligeons-nous point la prudence, le discernement, l'habileté ?...

II. Pour nous, la crainte et l'abattement du Sauveur sont une lumière et une force, dans toutes nos appréhensions, spécialement à notre dernière heure. N'a-t-on pas vu des saints trembler, comme lui, aux approches de la mort ? Que la crainte qu'il éprouve nous remplisse nous-mêmes d'une sainte frayeur pour ce redoutable passage ; qu'elle nous stimule à mieux nous y préparer, qu'elle nous console de nos répugnances et les sanctifie ! Si la nature en nous craint, tremble, murmure, ne nous en inquiétons pas ; mais que notre cœur, qui seul est en notre disposition, s'unisse au Cœur du divin agonisant, pour s'effrayer avec lui, espérer avec lui, se résigner avec lui. Avons-nous jusqu'ici pratiqué cette union ?

III. Nous ne saurions avoir tant de défaillances au cœur, que Jésus n'en ait ressenti plus encore pour nous obtenir du courage. Il a tremblé, pour que ses martyrs allassent au supplice comme aune fête. L'intrépidité humaine commence par une forcé audacieuse et superbe, mais se termine souvent à la crainte et à la faiblesse. L'intrépidité que la grâce inspire, commence par un abattement de l'âme, par une vive appréhension, par un humble aveu de notre insuffisance. Mais la vraie valeur, la valeur chrétienne, après avoir considéré tous les justes motifs de craindre le péril, passe et s'élève au-dessus de tous les obstacles pour l'affronter. Ainsi Jésus sera d'autant plus courageux qu'il a paru plus timide : après avoir tremblé à la vue d'iniquités qui ne sont pas les siennes, il n'hésitera pas à souffrir la passion la plus ignominieuse et la mort la plus cruelle, pour en faire pénitence. Ah ! prenons, prenons dans son Cœur le courage et l'humilité qu'il nous faut, pour n'hésiter jamais à laisser voir le repentir et la crainte, que nous causent des péchés qui sont les nôtres !

Lisez dans L'Agonie de Jésus, Liv. V chap. III Utilité de cette crainte

 

Pratique : Combattons la timidité comme la présomption, et ne reculons jamais devant une difficulté à vaincre pour accomplir un devoir. Foulons aux pieds toutes ces vaines terreurs, qui représentent à notre imagination nos plus saints projets comme impraticables. Que la peine ressentie en entreprenant une chose ardue, ne nous fasse pas différer ni remettre au lendemain.

 

Exemple

 

Saint Pierre Paschal, né à Valence en Espagne, l'an 1227, religieux de l'ordre de Notre-Dame de la Merci, évoque de Jaën, eut la tête tranchée par les Maures de Grenade, le 6 décembre de l'an 1300. Il se prépara avec joie à ce sacrifice, qu'il avait tant désiré. Son ange gardien l'ayant averti qu'il serait massacré le lendemain matin, il passa toute la nuit en prières ; il offrit sa vie à Dieu pour le salut des esclaves chrétiens, et pria même pour les Maures qui avaient résolu de le faire mourir. Il sentit néanmoins des craintes et des frayeurs en sa partie inférieure, et il souffrit une agonie pareille à celle de Jésus-Christ dans le jardin des Oliviers ; mais il se calma bientôt par un parfait abandon aux dispositions de la divine Providence. Le Sauveur lui apparut alors et lui dit : « Pierre, j'ai été sensible comme toi, et j'ai enduré d'horribles tourments pour ton amour ». Ces paroles répandirent une telle onction dans l'âme du saint, qu'il ne respira que le martyre. Il en reçut la couronne, pendant qu'il faisait son action de grâces après la messe.

Sainte Félicité, se trouvant enceinte au moment de sa condamnation à mort, vit différer l'exécution. Elle avait peur des douleurs de l'enfantement, et nullement des tortures du martyre. Comme le geôlier s'en étonnait, elle 'lui répondit : « Maintenant c'est moi qui souffre ce que j'endure ; mais alors ce sera un autre qui en moi souffrira pour moi, parce que moi aussi je souffrirai pour lui ». Cet autre était Jésus-Christ agonisant dans ses membres.

 

Septième jour

Les ennuis du Cœur de Jésus

 

Avec la crainte, le Sauveur éprouva dans le jardin des Oliviers une autre peine, la fatigue, le dégoût, l'ennui, et tœdere (Marc, xiv, 33.) C'est une consolation pour nous tous, qui avons tant de dégoûts et d'ennuis à dévorer : l'Homme-Dieu n'en a-t-il pas eu lui-même sa part ?

 

Méditation

 

I. Lorsqu'ils sont à leur comble, les dégoûts et les ennuis nous font haïr et abhorrer toutes choses, notre vie même. Tel est l'état du Fils de Dieu en son agonie. Devant lui une mort ignominieuse et cruelle ; à sa droite un petit nombre d'âmes, qui consentent à être rachetées par le prix infini de ce trépas ; à sa gauche, l'immense multitude des pécheurs endurcis et des damnés, qui ne s'en servent que pour aggraver leurs torts. Son Cœur devient comme une cire fondue, et sa force se dessèche comme la terre cuite au feu (Psaume 21, 15, 16.) La vie lui est à charge, et plus malheureux que Job il redit mieux que lui : « Je m'ennuie de vivre, mon âme est dégoûtée de la vie, tœdet animam meam vitœ meœ » (Job 10, 1.) A la vue de nos péchés, plus que de nos douleurs et de nos épreuves, disons aussi : « Mon âme est ennuyée de ma vie, de ma vie tiède, de ma vie peu chrétienne, de la vie mondaine ou criminelle que je mène depuis longtemps ! »...

II. En éprouvant le dégoût et l'enfui les plus accablants qui furent jamais, le Sauveur expiait les coupables dégoûts des uns, et consolait les autres dans leurs ennuis involontaires. Il se proposait de me réveiller, de secouer mon indolence, de changer ma lâcheté en courage, de rallumer dans mon âme une noble et sainte ardeur, pour tout ce qui est vrai et beau, grand et saint. Il voulait nous donner à tous sa persévérance, sa promptitude, sa vivacité, son empressement à prier, à parler, à agir, à souffrir pour le bien. Plus généreux que saint Martin, le voici qui se dépouille de son manteau tout entier, du manteau de sa gloire et de sa félicité, pour nous revêtir de la plénitude de ses contentements et de ses joies. Il prend pour lui le dégoût et l'ennui suprêmes, afin que son allégresse passe en nous, remplisse et fasse déborder notre âme, comme celle de l'Apôtre qui s'écriait : « Je surabonde de joie en toutes mes tribulations ! » (2 Corinthiens 7 , 4) Quel reproche pour moi qui ne fais rien, ne donne rien, ne souffre rien, dans le but d'épargner aux autres un peu de dégoût et d'ennui !...

III. Suite nécessaire de l'inquiétude d'un cœur qui n'est point à sa place, et qui ne peut l'être tout à fait ici-bas, les ennuis et les dégoûts sont inévitables en cette vie. Parce que notre nature est sujette au caprice et à l'inconstance, parce que la piété contrarie nos anciens goûts et nos premiers penchants, nous éprouvons au service de Dieu des répugnances et des amertumes, qui mettent notre patience ou notre fidélité en péril. Le désir de changement, si commun dans notre siècle, fait que la stabilité même nous ennuie. Tenons ferme, et l'expérience nous apprendra que, dans la piété, les ennuis et les dégoûts sont moins amers qu'on ne se le figure, moins amers que ceux des mondains, qu'ils ont des ressources que ceux-ci n'ont pas, et que la vertu n'a point de peine qui n'ait sa consolation. Mais comment nous conduisons-nous dans l'agonie du dégoût et de l'ennui ?...

Lisez dans l'Agonie de Jésus, Liv. v, ch. v. Le dégoût et l'ennui dans les membres mystiques de Jésus.

 

Pratique : Ne laissons pas voir aux autres, surtout à ceux qui pourraient en être scandalisés ou refroidis, les ennuis et les dégoûts que nous éprouvons parfois au service de Dieu. Afin de les diminuer, donnons-nous purement en sacrifice au Seigneur, sans en attendre rien d'extraordinaire et de sensible.

 

Exemple

 

Sainte Madeleine de Pazzi désirait si vivement souffrir sans aucune consolation, qu'elle conjurait souvent le Seigneur de lui retirer tous les goûts et plaisirs spirituels. Elle fut si bien exaucée qu'elle se comparait à un morceau de bois, à une pierre insensible. Mais jamais son visage ne parut ni troublé ni altéré ; on y vit toujours cette grâce angélique et cette douce paix, qu'elle avait dans le cœur. Néanmoins, pour échapper à toute illusion, pour ne point aggraver par ses négligences son tourment le plus cruel, l'extrême aridité d'esprit, elle redoublait ses macérations et ses efforts, afin de s'exciter à la dévotion, de réveiller en son cœur le goût des choses spirituelles. Pour sauver des âmes en péril, elle s'offrit à rester privée de tout sentiment, dépouillée même de toute grâce, excepté de la grâce principale qui est l'amour de Dieu et la volonté de le servir. Le Seigneur l'exauça encore, en l'éprouvant par de longues et atroces souffrances dans le corps et dans l'âme. Mais plus la sainte souffrait pour le salut des pécheurs, plus elle désirait souffrir.

 

Vous pouvez retrouver et télécharger les 3 volumes de L'Agonie de Jésus du Père François Blot,

pour compléter votre méditation quotidienne

(Les références seront indiquées chaque jour)

En cliquant sur les liens suivants

Volume 1

Volume 2

Volume 3

 

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Téléchargez les méditations du Mois du cœur Agonisant (pdf) en cliquant ici

 

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12 février 2017

La Servante de Dieu Dora del Hoyo

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La Servante de Dieu Dora del Hoyo

Numéraire auxiliaire de l'Opus Dei

1914-2004

 

Dora del Hoyo Alonso naquit à Boca de Huérgano (León, Espagne) le 11 janvier 1914. Dès son enfance, ses parents, chrétiens exemplaires, l'ont éduquée pour qu'elle soit une bonne fille de Dieu.

Elle a demandé l'admission dans l'Opus Dei à Bilbao, le 147 mars 1946. dès le premier moment, elle a su répondre avec fidélité à l'appel divin. La dévotion eucharistique – la Sainte Messe était le centre et la racine de sa vie intérieure –, un amour tendre envers la Très Sainte Vierge et Saint Joseph et le recours confiant à son ange gardien étaient les traits caractéristiques de sa vie intérieure. Le 27 décembre 1946, sur l'invitation de Saint José Maria, elle s'est installée à Rome, où elle a vécut jusqu'à la fin de sa vie.

Elle a su découvrir la valeur sanctifiante et apostolique cachée derrière toute activité, si ordinaire soit-elle, en alliant l'esprit de service et la compétence professionnelle. De Rome, elle a participé à la formation de femmes venant du monde entier, contribuant ainsi au travail apostolique de l'Opus Dei dans tous les milieux de la société. Rappelée à Dieu le 140 janvier 2004, elle repose dans la crypte de l'église prélatrice de Sainte Marie de la Paix, près de Saint José Maria et du Bienheureux Alvaro del Portillo, 75, viale Bruno Buozzi, à Rome. Sa cause de béatification a été ouverte en 2012.

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Prière pour demander sa glorification

(Pour la dévotion privée)

 

Seigneur, Toi qui as appelé Dora à réaliser le même travail que celui de la Bienheureuse Vierge Marie au foyer de Nazareth, aide-moi à Te trouver dans mes activités quotidiennes et à créer autour de moi une ambiance de vie de famille chaleureuse comme elle a su le faire, par son travail joyeux et sacrifié, selon les enseignements de Saint José Maria. Glorifie Ta servante Dora et accorde-moi par son intercession la faveur que je Te demande... Amen.

 

Notre Père, je Vous salue Marie, Gloire au Père.

 

Conformément aux Décrets du Pape Urbain VIII, nous déclarons ne prétendre en rien le jugement de l'autorité ecclésiastique, et n'en destiner en aucune façon cette prière au culte publique.

Nous serions reconnaissants à toutes personnes ayant obtenu des grâces par son intercession d'en faire part à la Prélature de l'Opus Dei, Bureau pour les Causes des Saints, 7, rue Dufrénoy, 75116 Paris. (Mail : osc@opusdei.fr)

 

Téléchargez le texte de cette prière (pdf) en cliquant ici

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