Saint Paul de Tarse
L'apôtre des Nations
Fête le 29 juin
L’environnement de saint Paul
Si l'action divine sur la volonté et l'intelligence n'était qu’une impulsion mécanique, si l'homme inspiré n’était qu’un objet dans les mains de Dieu, il serait inutile de rechercher quelles furent la physionomie et l'ambiance de l’auteur sacré. Mais celui-ci n'est ni une matière inerte ni un instrument inanimé. Il sent, il veut, il pense; et ses pensées et ses sentiments ne peuvent manquer de colorer la révélation qui pénètre ces pensées et ces sentiments comme un liquide colore le rayon lumineux qui le traverse. Isaïe et Ézéchiel ne délivrent pas du même ton le même message divin. Ce n'est point une seule affaire de vocabulaire. Quelle que soit la traduction utilisée, on ne sera pas exposé à prendre un chapitre de saint Marc pour une page de saint Jean. Aussi tous les exégètes affirment-ils avec raison la nécessité d'étudier le caractère individuel des écrivains sacrés, avec leurs habitudes d'esprit, le tour ordinaire de leurs pensées, leur éducation et leur situation sociale, les circonstances extérieures de leur vie et de leur action. On n'a d'un homme, surtout d'un écrivain, qu'une connaissance bien imparfaite, tant qu'on ignore le milieu intellectuel et moral où il a grandi. Par sa naissance comme par son éducation, Saul nous fait prévoir une nature complexe où s'uniront tous les contrastes. « Juif de race, originaire de Tarse, citoyen romain », tel est l'état civil fourni par lui-même au magistrat chargé d'instruire sa cause. Au dire de saint Jérôme, Giscala en Galilée fut le berceau de sa famille.
Alors comme aujourd'hui, les Juifs étaient les plus cosmopolites des hommes, ils avaient semé de leurs colonies tous les points de l'empire romain. A cette époque, Tarse était une des villes les plus florissantes de l'Asie Mineure assez proche du nord de la Palestine. Située dans une plaine fertile donnant sur la Mer Méditerranée et adossée au Mont du Taurus. Le fleuve Cydnus qui la traversait, servait alors à l’irrigation de la plaine et au transport fluvial. Comblée de faveurs par Rome, Tarse devait à son site superbe d'être un entrepôt de premier ordre et un marché des plus actifs. Pourtant le panorama riant et grandiose que saint Paul avait eu sous les yeux, semble n'avoir laissé aucune trace dans son imagination. Plus tard il traversera les sites les plus merveilleux par les faveurs de la nature sans trahir le moindre tressaillement d’admiration, sans enrichir son style d'une comparaison d’une couleur quelconque. A ce point de vue, il est l'antipode des prophètes et des évangélistes. On a voulu expliquer ce phénomène, soit par une faiblesse congénitale de la vue, soit par le manque du don d'observation. En réalité, la nature morte ne dit rien à cet esprit replié sur lui-même. Il est beaucoup plus absorbé par le spectacle de la lutte intérieure et douloureuse dont son âme est le théâtre et le prix. Il ne voit la nature inanimée que dans ses rapports avec l'homme. Son domaine est la psychologie. On a remarqué depuis longtemps que ses métaphores sont tirées presque toutes, non du spectacle et des activités de la nature, mais des manifestations extérieures de la vie humaine. Il observe avec intérêt et décrit avec finesse les jeux du stade, les soldats romains souples et agiles sous le poids des armes, les marchés orientaux grouillants d'esclaves, et même les grands édifices, temples et palais, où se révèlent la puissance et le génie de l'homme.
L’enfance et l’éducation
Vers l'âge de six ans, l'enfant juif fréquentait l'école. Les écoles célèbres abondaient à Tarse. On s'y appliquait à toutes les sciences, surtout à la philosophie. Les Tarsiens rivalisaient sur ce point avec les philosophes d'Alexandrie et d’Athènes et passaient même pour l'emporter sur eux. Leur spécialité était de fournir des instituteurs aux gouvernants du monde. Le précepteur d'Auguste, Athénodore le Stoïcien, était de Tarse; celui de Tibère aussi. Tous deux revinrent d’ailleurs mourir dans leur ville natale, comblés d'or et d’honneurs. Ce n'est pas pourtant de ces maîtres que saint Paul apprit les éléments des lettres. Son grec n'est pas le grec des écoles : c'est une langue attrapée par l'usage, au hasard de la conversation, vive, imagée, pittoresque, remarquable d'expression, d'originalité et de mouvement, mais étrangère aux préceptes des grammairiens officiels. En effet, partout où ils étaient en nombre, les Juifs avaient leurs écoles à part. Les livres païens en étaient sévèrement bannis; l'étude principale, sinon unique, y était la Bible; seulement, dans la Diaspora, on la lisait en grec. C'est là que Saul dut être envoyé par son père qui était un pharisien rigide. Somme toute, la première jeunesse de saint Paul passée à Tarse n'a pas fait sur son intelligence une empreinte profonde. Sa famille ne s'est point laissé pénétrer par l'atmosphère ambiante. Son père, Juif de vieille souche, parait avoir médiocrement goûté la culture hellénique et les habitudes sociales du monde gréco-romain. Plus tard, Paul pourra se dire un « Hébreu fils d'Hébreux, pharisien, fils de pharisien », tant le milieu helléniste l'a peu effleuré. Cela est important à souligner, car on a accusé mal intentionnellement saint Paul d’avoir introduit la culture grecque dans la doctrine évangélique, ce qui est scientifiquement infondé.
Saint Paul connaît la Bible dans les deux langues grecque et hébraïque ; mais il la cite presque toujours en grec, soit que la version des Septante lui fût réellement plus familière, soit plutôt qu'écrivant en grec, le texte des Septante lui revint plus naturellement à la mémoire. D'après un calcul toujours sujet à révision, mais dont la donnée générale est juste, sur quatre-vingt-quatre citations, trente-quatre s'accordent exactement avec les Septante, deux seulement sont faites d'après l'hébreu, non sans supposer le texte des Septante présent à l'esprit de l'auteur. Bref, l'Apôtre n'aime pas à se départir de la version de la Septante généralement reçue et il y reste fidèle même en des cas où il semble qu'il y avait profit à l'abandonner. Au reste l'érudition de Paul n'est pas livresque : il ne possède à fond qu'une seule science, la religion révélée ; et qu'un seul livre, la Bible. En effet, l’école juive n’était qu’une annexe de la synagogue. L’instruction y était exclusivement religieuse. Mathématiques, géographie, histoire profane (et non religieuse), philosophie, tout cela n’existait pas pour le juif orthodoxe ; il n’y avait que la morale, le droit positif et l’histoire sainte : et tout cela, c’était la Bible. C’est en l’épelant qu’on apprenait à lire ; beaucoup de scribes la savaient par cœur, comme la savent peut-être, aujourd'hui encore quelques Israélites. Nous voyons Paul la citer constamment de mémoire. Même quand il ne la cite pas, son langage est un tissu de réminiscences, inconscientes ou voulues. Son style, comme celui de saint Bernard et de Bossuet, est tout imprégné d'expressions bibliques, qui jaillissent spontanément de son souvenir. Cela suppose une connaissance détaillée et minutieuse, fruit de longues années d'étude.
Aux pieds de Gamaliel
Saul était âgé d'environ treize ans quand il s'achemina vers Jérusalem pour y achever son éducation. Nous ignorons si ses parents l'y accompagnèrent. Une quarantaine d'années plus tard, le fils d'une de ses sœurs, établie dans la Ville sainte, lui sauvera la vie. Nous connaissons déjà les mœurs voyageuses des Juifs à cette époque; il faut nous habituer de plus en plus à ces déplacements continuels, que l'histoire du siècle apostolique enregistre à chaque page. On destinait l’enfant au métier de scribe, profession ambiguë qui préparait à toutes les carrières et ouvrait la porte à tous les honneurs, le scribe étant à la fois, ou tour à tour, avocat et avoué, magistrat et jurisconsulte, conseiller et prédicateur, homme de loi et homme d’église, lettré, rhéteur et grammairien.Les étudiants de Jérusalem se partageaient alors entre deux écoles rivales dont les fondateurs, Hillel et Shammaï de légendaire mémoire, personnifient aux yeux de la postérité, l’un les vues étroites et la petitesse d'esprit, l'autre les idées larges d'un libéralisme éclairé ; l'école d'Hillel penchait en général vers l'interprétation la moins rigoriste. Le successeur d'Hillel, héritier de ses principes sinon de son sang, était alors Gamaliel l'Ancien. Vénérable aux yeux des chrétiens pour avoir défendu les apôtres, sa réputation posthume n'en a pas souffert auprès de ses coreligionnaires. Gamaliel est resté le type du pharisien idéal : « Depuis sa mort, dit la Mishna, le respect de la Loi n'est plus ; la pureté du pharisaïsme est morte avec lui. »
C'est donc aux pieds de Rabban Gamaliel, comme on le surnommait par honneur, que le jeune Saul vint s'asseoir. Il allait s'initier laborieusement à la science sacrée, au centre même de la vie nationale, au moment où Jésus, son aîné de sept ou huit ans, progressait en grâce et en sagesse dans un coin obscur de la Galilée. Nous avons pu nous demander si et dans quelle mesure le sol natal avait influé sur la pensée de Paul. Pour Jérusalem, le doute n'est pas possible. Tarse est sa patrie civile où il reçoit, avec le titre envié de citoyen romain, cette langue hellénique qui le fait, en quelque sorte, citoyen de l'univers; mais Jérusalem est la patrie de son âme, la patrie de son intelligence autant ou plus que celle de son cœur. C'est vers Jérusalem qu'il gravitera toujours au cours de son pèlerinage terrestre et il a pleinement conscience d'avoir reçu là l'empreinte indélébile de sa formation religieuse et morale. C'est là proprement qu'il a été instruit, élevé, aux pieds de Gamaliel. Il était à bonne école. Malgré certaines subtilités futiles et des inconséquences pratiques que Jésus relèvera, les pharisiens restaient les vrais dépositaires de la science sacrée et les interprètes les plus autorisés de la loi divine. Jésus devait leur rendre ce témoignage que s’il fallait éviter d’imiter leur conduite, il fallait cependant suivre leurs leçons. Et nous avons dans les écrits de l'Apôtre, les traces de son éducation rabbinique, à l'école de Jérusalem. C'est à la tradition juive, par exemple, qu'il doit le sens typique de l'Écriture et l'usage fréquent de l'allégorie. L'Ancien Testament portant les assises du Nouveau, il est naturel que le Saint-Esprit, auteur de toute la Bible, lui ait donné un sens prophétique ou figuratif, qui résulte soit des récits eux-mêmes soit de la manière de les raconter. Ce sens superposé à la lettre de l'Écriture s'appelle sens spirituel ; en le nommant typique, nous avons le double avantage d’écarter une équivoque et de nous conformer à la terminologie de Paul.
Saul, le pharisien persécuteur
A cette époque, il se distinguait par la rigueur de son pharisaïsme : « J'étais, dit-il, plein de zèle pour [la Loi de] Dieu. J’ai vécu en pharisien, selon la secte la plus stricte de notre religion ». Quand ses adversaires se targueront de leur fidélité scrupuleuse à la Loi, il leur répondra : « Moi aussi, j’étais pharisien, persécuteur de l'Église par zèle irréprochable au point de vue de la justice selon la Loi. » L’histoire ne nous dit pas s’il a rencontré Jésus avant Pâques. Mais sans nul doute, a-t-il entendu parler de Lui dont la renommée était répandue dans toute la Palestine. Mais comme un ennemi de la Loi de Moïse, un réformateur qui vient changer les coutumes pharisiennes. Si sa présence est absente des évangiles, il semble peu probable qu’il ait ignoré son existence. Disciple de Gamaliel qui ne paraît pas dans l’Évangile, mais dans les Actes où il se montre bienveillant à l’égard des Apôtres, on peut penser qu’à l’instar de son maître, il restait plutôt indifférent aux agitations qui entouraient Jésus. Ni disciple, ni ennemi. Par contre, après la pentecôte, son hostilité allait croître de jour en jour jusqu’à l’apparition du Christ sur la route de Damas.
Il gardait les habits des témoins qui lapidaient St Etienne sans participer lui-même à la lapidation, peut-être parce qu’il n’était pas qualifié pour être le juge et le bourreau du martyr. Mais, en son for intérieur, il sanctionnait tout, il approuvait tout. Le martyre d'Étienne ne fera qu'aiguiser sa soif de sang chrétien. Non content d'assister au supplice des victimes, il pénétrait dans les maisons, en arrachait les habitants, hommes et femmes, pour les traîner dans les cachots. Bientôt, faute d'aliment, la persécution s'éteignit à Jérusalem et Saul dut porter ailleurs sa rage inassouvie. Il supplia le grand prêtre de l'investir d'une mission officielle pour rechercher, dans les synagogues de Damas, les disciples secrets de Jésus et les amener, chargés de chaînes, devant le sanhédrin. C'est là que le doigt de Dieu l'attendait. Ce que saint Paul dit de son passé de persécuteur de l’Église est de la plus haute importance pour juger de son état psychologique au moment de sa conversion : « Je persécutais sans mesure et je ravageais l'Église de Dieu, dépassant par [l'exaltation de] mon judaïsme la plupart de mes contemporains. — Je suis le dernier des apôtres et je ne suis pas digne du nom d’apôtre, parce que j'ai persécuté l'Église du Christ — Je fus jadis un blasphémateur et un persécuteur, un insulteur; mais j’ai obtenu miséricorde parce que j'agissais par ignorance dans l'infidélité. — Pharisien selon la Loi, persécuteur de l'Église par zèle, irréprochable au point de vue de la justice qui vient de la Loi. »
La conversion
La conversion de saint Paul est, après la résurrection du Sauveur, le miracle le mieux attesté et le plus rebelle à toute explication naturelle, et par suite le plus gênant pour la libre pensée. Il n’est pas d’efforts désespérés que la critique rationaliste n’ait faits pour en atténuer la force probante. Comme pour la résurrection de Jésus-Christ, on a essayé, en vain, de mettre les témoignages en désaccord. Il existe en effet, au Livre des Actes, trois récits de la vision de Damas, l’un fait par saint Luc pour son propre compte les deux autres mis dans la bouche de saint Paul. De l'aveu de tous, les trois récits concordent sur tous les points de quelque importance : l'occasion, le lieu, l'heure de l'événement, la clarté éblouissante dont fut enveloppée soudain la caravane, le dialogue entre Saul prosterné à terre et la voix mystérieuse, sa cécité temporaire, son baptême, sa guérison, l'orientation toute nouvelle qui, subitement, d'un persécuteur fit de lui un apôtre. On a beau scruter ces textes avec la dernière rigueur pour y chercher des contradictions, on n’y relève que des détails les plus insignifiants, des minuties qu’on rougirait de relever dans un historien profane, et des circonstances extérieures au fait lui-même.
Au reste, en niant le miracle de l'apparition de Jésus, on ne se met pas en peine pour autant d'expliquer cet autre miracle d'ordre moral, plus inexplicable encore si l'on supprime le premier, la conversion de saint Paul. La vie entière de l’Apôtre, le sérieux de son pharisaïsme, la fermeté inébranlable de sa foi chrétienne, protestent contre tout système qui fait de lui un halluciné, un détraqué. De même ses écrits : ses déclarations sont formelles : « il a vu le Seigneur ; le Christ lui est apparu. » Pas d'étape dans sa conversion; pas d'acheminement graduel vers la foi. Jésus-Christ l’a saisi à l'improviste au milieu de sa course. Le coup qui le renversa fut foudroyant, irrésistible. Rien ne le présageait, rien ne le préparait : c'est un pur effet de la grâce toute-puissante. Vous lui supposez des rapports antérieurs avec les chrétiens. Il ne les connaissait que comme le bourreau connaît ses victimes. Il ne savait rien de leur doctrine si ce n'est qu'elle était incompatible avec la Loi de Moïse, inconciliable avec le judaïsme, et partant haïssable et digne d'extermination : cela lui suffisait et il ne désirait pas en savoir davantage. Vous lui prêtez des hésitations, des anxiétés, des remords. Il vous répond qu'il n'éprouvait aucun trouble, aucune inquiétude, qu'il croyait sincèrement servir Dieu, qu'il était de bonne foi et qu'il doit à son ignorance d'avoir obtenu miséricorde. C’est pourquoi, pour supprimer un miracle, on en forge autre, un miracle psychologique encore plus merveilleux. Mieux vaut donc renoncer à expliquer l'inexplicable. Certes, la grâce rencontrait dans la riche nature de Paul un terrain propice et même des germes précieux. Les convictions fortes au service de la passion sont plus faciles à tourner au bien qu'un scepticisme armé d'indifférence. Dieu entre plus aisément dans les cœurs et dans les esprits qui n'ont pas péché contre la lumière. D’autre part, le besoin inné de justice et le sentiment profond de son impuissance inclinaient spontanément l’âme de saint Paul vers la doctrine chrétienne, où ces deux tendances devaient trouver satisfaction et repos.
Conséquences théologiques
L'apparition de Damas a exercé sur la théologie de saint Paul une influence multiple dont il convient de signaler ici quelques traits : Une des théories les plus hardies et les plus originales de l'Apôtre est bien l'incorporation au Christ, en vertu de laquelle le Christ est tout en tous et tous sont un en lui. Cette théorie n'est-elle pas contenue en germe dans cette question de Jésus : « Saul, pourquoi me persécutes-tu ? » Paul ne s'attaquait pas directement à la personne du Christ : il y a donc entre Jésus et les siens une identité mystérieuse, pour qu'en frappant les disciples, on atteigne le Maître. Dans la conversion de Paul, l'œuvre de la grâce est tangible. Le revirement est instantané : c'est un éclair, un éblouissement, l'adhésion rapide à l’appel divin d'une volonté qui n'a presque pas conscience d'avoir consenti. Qui a connu pareille crise a le sentiment plus net, l'intuition plus vive que tout l'honneur du changement revient à Dieu ; il aime à se représenter l'opération de la grâce comme foudroyante, la foi comme un acte d'obéissance, libre sans doute, mais qui, une fois posé, vous jette tout d'un coup en un monde nouveau de droits et de devoirs, d'obligations et de privilèges. Voilà bien la foi de l'Épître aux Galates et de l’Épître aux Romains, cette foi agissante, où le cœur a autant de part que l’esprit, cette foi qui révolutionne tout l'être, envahit toutes les puissances de l'âme et oriente en un instant la vie tout entière. Enfin le Christ entrevu laisse dans la mémoire de Paul un inoubliable idéal. Dès lors, son regard reste éperdument fixé sur l'incomparable modèle. Il aspire et il veut qu'on aspire à la mesure, à la plénitude du Christ. On n'en approchera jamais; qu'importe! Il faut y tendre toujours. La morale paulinienne est tout imprégnée de ce souvenir vivant; et au lieu de nous proposer l’exemple de Jésus dans sa vie mortelle, elle nous invite à l'imitation du Christ ressuscité et glorieux. Il est toutefois excessif de dériver toute la théologie de saint Paul du fait de sa conversion. La vision de Damas est la plus claire et la plus intime des révélations, mais ce n'est que la première; et l'expérience religieuse ne peut tirer d'un fait que ce qu'il contient réellement. La foi chrétienne ne se réduit pas à une impression subjective et les dogmes ne sont pas les produits arbitraires et relatifs de la conscience individuelle.
Baptême de Paul
L'imagination populaire aime à rapprocher la conversion de Paul de son apostolat effectif. Le matin, c'est le loup dévorant qui ravage le bercail du Christ; le soir, c'est le conquérant qui traîne au pied de la croix, vaincus et captifs, les ennemis de l'Évangile. En réalité, ni la nature ni la grâce ne procèdent par bonds; six ou sept ans, au minimum, s'écoulent dans l'intervalle : période de gestation féconde où sa pensée se mûrit et s'achève dans la solitude, le silence et la prière; période obscure aussi, où l'histoire perd souvent sa trace et n'a pour guide que le récit plein de vie et de mouvement, mais intermittent et fragmentaire, des Actes des Apôtres. Après son baptême et sa guérison, le néophyte Saul ne resta à Damas que très peu de jours, mais suffisamment pour être instruit des premiers rudiments de la foi. L'éducation religieuse de Paul, pas plus que celle des autres apôtres, ne pouvait se faire en un jour. Après qu'une crise subite en a marqué les débuts, le développement ultérieur prend un cours normal et progressif. Si la vision de Damas fut l’amorce d'une synthèse théologique, la synthèse elle-même sera le fruit d'une révélation lente et continue, et pas forcément par apparition. En effet il ne faudrait pas aller jusqu’à rapporter à la même source divine tout ce que l'Apôtre a jamais prêché, même ce qu'il pouvait facilement apprendre par intermédiaire, comme la vie, les miracles, les discours de Jésus ? En ce cas, Paul aurait été beaucoup plus favorisé que ses collègues dans l'apostolat qui étaient réduits à apprendre par le récit des autres beaucoup de faits dont ils n'avaient pas été témoins oculaires ; il n’y a pas de raison à penser qu’il en fut autrement pour saint Paul. La providence, qui ne fait rien d’inutile, observe, jusque dans le miracle, une certaine économie de moyens. Sans doute, selon la sage remarque d'Estius, il n’en coûtait pas plus au Seigneur de lui apprendre en un instant toutes les vérités de la foi chrétienne que de le convertir miraculeusement; mais Dieu a voulu se servir du ministère d’Ananie, afin que personne ne dédaigne le magistère humain, en voyant le Docteur des nations catéchisé par un homme. Il n'y a là rien de contraire aux prétentions de Paul. « Il a reçu les éléments de la foi, comme les autres catéchumènes, au moment de son baptême; mais le Christ se réserve de lui enseigner lui-même les mystères les plus profonds du christianisme. » C’est par révélation qu'il va plaider auprès des apôtres la cause des Gentils. L'Esprit de Dieu l’empêche de prêcher en Asie, lui ferme les frontières de la Bithynie et le pousse irrésistiblement en Macédoine; il l’encourage et le console à Corinthe après l'échec d'Athènes; il le ramène de force à Jérusalem malgré la perspective d'une longue captivité; puis, quand tout espoir de voir Rome semblait perdu, il lui en renouvelle l'assurance. Bref, la providence le conduira à toute heure comme par la main.
Paul en Arabie
Mais, pour l’heure, après son baptême, Saul avait hâte de fuir le tumulte des villes. Après l'ébranlement moral qu'il venait d'éprouver, il sentait le besoin de se trouver en face de lui-même et en tête à tête avec Dieu. Il partit donc pour l'Arabie. On peut douter qu'il y fût attiré par une pensée d'apostolat; quoique destiné à porter le nom de Jésus jusqu'aux extrémités de la terre, il attendait sans impatience ni inquiétude l'heure de Dieu. Il voulait sonder son âme, méditer les Écritures, se recueillir sous l'œil du Seigneur, prêter l'oreille à cette voix intérieure qu'on perçoit d'autant plus distinctement que les échos du monde sont plus lointains et plus affaiblis. Il y passa un an, deux ans peut-être. Rien ne nous aide à percer le mystère de cette retraite. Saint Luc ne dit pas un mot de ce séjour en Arabie, bien qu'il semble indiquer un double séjour à Damas entre lequel s'intercale assez naturellement le voyage en Arabie. A son retour à Damas, Saul était armé pour la controverse. Sa prédication se fortifiait de preuves scripturaires irrésistibles. Ce n'était plus seulement, comme la première fois, la déposition du témoin oculaire, c'était l'enseignement raisonné du docteur et le message inspiré du prophète. Incapables de lui répondre, ses adversaires prirent le parti de lui fermer la bouche! L'ethnarque du roi Arétas, soudoyé par les ennemis de saint Paul, se chargea de leur vengeance. Pour déjouer la vigilance des mercenaires du gouverneur qui, nuit et jour, faisaient bonne garde aux portes de Damas, il fallut cacher l'Apôtre dans une manne et le descendre le long des murs par une poterne. Après sa pittoresque évasion, il se rendit en hâte à Jérusalem pour y voir Pierre. De nouvelles embûches l'y attendaient, cette fois de la part des Juifs hellénistes. Au bout de quinze jours, les frères alarmés l'emmenèrent à Césarée et le mirent sur le chemin de Tarse, qu'il gagna par la voie de terre. Pendant trois ou quatre ans au moins, nous le perdons de vue. Puis il reparaît à Antioche où Barnabé l’avait ramené de Tarse, pour l’aider dans l’évangélisation de la communauté chrétienne de cette grande ville impériale. En effet, les conversions y étaient nombreuses, et c’est à Antioche que commença l’évangélisation officielle des païens.
Début de l'évangélisation officielle des Gentils
Après la mort d'Étienne, quelques fugitifs de la persécution étaient venus à Antioche, et y avaient prêché le Christ Jésus aux païens eux-mêmes¹. Pour cimenter les nombreuses conversions, l'église mère de Jérusalem envoya dans la capitale de la Syrie un de ses meilleurs missionnaires, Barnabé. Barnabé avait peut-être connu Paul à l'école de Gamaliel et l'avait revu chrétien à Jérusalem ; aussi s’était-il empressé d'aller le chercher à Tarse. Une année entière, ils cultivèrent ensemble le champ que la providence avait semé pour eux. Cependant l'influence de Paul grandissait tous les jours. Quand il fallut porter à Jérusalem les aumônes de l'église d'Antioche, en prévision de la famine prédite par Agabus, Barnabé et lui furent délégués. Ils n'y trouvèrent point les apôtres. C'était au fort de la persécution d'Hérode Agrippa ; Jacques le Majeur venait de rendre à Jésus le témoignage du sang ; Pierre, miraculeusement délivré, avait quitté la ville ; les autres s'étaient dispersés. Aussi leur mission remplie, les deux envoyés rentrèrent à Antioche. C’est vers le même temps que le roi persécuteur Hérode mourut (44 ap. JC) Comme l'église d'Antioche pouvait alors se suffire, il fut décidé sous l’inspiration de l'Esprit de Dieu, d’envoyer Barnabé et Saul pour l'apostolat en grand des Gentils. Saul paraît d’abord occuper une position subordonnée. C’est par l'île de Chypre, d'où Barnabé est originaire que les deux apôtres commencent leur tournée. Le proconsul de l’île Sergius Paulus embrasse la foi, et dès lors, les rôles sont intervertis. Saul, devenu subitement Paul, prend la conduite de l'expédition évangélique, et Barnabé, avec une simplicité égale à sa modestie, s'efface derrière celui dont il reconnaît la vocation providentielle. Au changement de nom qui s’est fait à Chypre pendant cette première mission auprès des Gentils, il ne faut pas chercher de mystère. Les papyrus contemporains nous apprennent qu'un grand nombre de personnages portaient alors deux noms, l'un indigène, l'autre romain. Saul, citoyen de Rome, prend son nom latin, Paul, au moment où il entre en rapports avec les Romains. Plus remarquable est le changement de rôles : la caravane apostolique s'appellera désormais « la suite de Paul ». Tandis qu'autrefois Barnabé avait la primauté, c'est maintenant le contraire. Il y a cependant quelques exceptions ; mais celles-ci sont seulement apparentes et s'expliquent aisément : à Lystres par l'opinion des Lycaoniens frappés de la prestance de Barnabé; à Jérusalem par le fait que Barnabé est nommé le premier dans la lettre du concile et prend le premier la parole. En ce cas, Luc n'est que rapporteur des évènements ; mais, quand saint Luc exprime sa propre pensée, il renverse les rôles et attribue toujours à Paul la place d'honneur.
Après Chypre, les missionnaires, repassant sur le continent asiatique, évangélisent tour à tour Antioche de Pisidie, Iconium, Lystres, Derbé. Leur méthode de prédication est toujours la même. Ils s'installent dans la synagogue tant que les Juifs et les prosélytes veulent leur prêter audience. Quand on leur en ferme les portes ou que l'émeute les en bannit, ils s'adressent aux Gentils. Les intrigues et les complots des Juifs les chassent d'Antioche et d'Iconium ; à Lystres, Paul est lapidé et laissé pour mort ; à Derbé on leur barre sans doute le chemin, car au lieu de rentrer en Syrie par la voie directe de Cilicie, ils font à rebours la même route, et évangélisent Pergé qu'ils n'avaient fait d'abord que traverser et s'embarquent finalement à Attalie pour Antioche¹. Ainsi, dans un laps de temps qui ne doit pas avoir dépassé quatre ou cinq années, ils ont fondé au moins sept chrétientés : deux à Chypre, Salamine et Paphos, deux dans la Pisidie phrygienne, Antioche et Iconium, deux en Lycaonie, Lystres et Derbé, une en Pamphylie, Pergé. Rentrés à Antioche qui les avait « livrés à la grâce de Dieu », ils racontent aux frères, convoqués en Assemblée plénière, ce que Dieu a fait avec eux et par eux et comment ils ont ouvert aux Gentils la porte de la foi. C'était là un événement dont il est impossible d'exagérer la portée, car c’était la conquête du monde qui commençait à se réaliser. Mais en même temps une terrible épreuve faillit l’anéantir dès sa naissance si la thèse de Paul n'avait pas finalement triomphé.
L’Église et la synagogue
Il s'agissait de savoir à quelles conditions les Gentils seraient admis dans l'Église et quelle place ils y occuperaient. L'église mère de Jérusalem se rattachait encore si étroitement à la synagogue qu'elle aurait pu passer pour une secte juive. Distinction des aliments purs et impurs, visites au Temple, sacrifices, purifications légales: tout cela confondait presque, au dehors, les nouveaux disciples du Christ avec les Israélites dévots. Les chrétiens de Jérusalem cherchaient visiblement à ménager leurs compatriotes juifs et anciens coreligionnaires ; au reste, une rupture violente, en coupant court à tout espoir de prosélytisme, eût atrophié l'Église au berceau. Confiné d'abord dans les cercles judaïques, l'Évangile ne s'en dégagea qu'insensiblement. Il avait fallu un ordre exprès du ciel pour décider saint Pierre à baptiser le centurion Corneille ; et malgré l'éclatant miracle qui la sanctionna, cette exception n'alla pas sans quelque étonnement de la part des fidèles. L'admission des Samaritains, circoncis et à moitié Juifs en dépit de leur hérésie et de leurs haines héréditaires ne souleva pas de difficulté sérieuse : à la première annonce de leur conversion, Pierre et Jean leur furent dépêchés. La première église mixte fut Antioche. Des chrétiens dispersés par la bourrasque qui suivit la mort d'Étienne, y avaient prêché le Christ même aux Grecs. C'était un fait sans précédent mais que les apôtres s'empressèrent de ratifier en déléguant Barnabé à Antioche. Là, Juifs et Grecs convertis, désignés maintenant sous le nom de chrétiens, qui les distingue comme association religieuse spéciale, semblent avoir bien frayé ensemble. Peut-être les Juifs d'Antioche étaient-ils moins intransigeants que leurs frères de Palestine; ou les fidèles venus du paganisme plus accommodants; peut-être aussi se fit-on des concessions mutuelles.
Mais la question de savoir à quelles conditions les Gentils devaient être admis dans l'Église, se dressa soudainement quand Paul et Barnabé annoncèrent qu'ils avaient ouvert toutes grandes les portes de la foi et que les païens s'y précipitaient en masse, que se fondaient des chrétientés d'où l'élément juif était à peu près absent et qui prétendaient vivre sur le pied d'égalité avec les autres. Sur ces entrefaites, vinrent de Jérusalem à Antioche des personnages qui devaient jouir d'un certain crédit. Ils prêchaient hautement que la circoncision était une condition essentielle pour être admis dans l'Église et pour espérer le salut. Grande fut l'émotion. Paul et Barnabé s'élevèrent avec force contre ces prétentions nouvelles. Le moment était solennel. Maintenir la circoncision, avec l'observation intégrale de la Loi qu'elle implique, c'était renoncer à l'espoir de conquérir le monde. Jamais le monde ne se serait fait juif. Mais la question de principe était plus grave encore. Faire d'une pratique mosaïque la condition essentielle du salut, c'était nier virtuellement le caractère transitoire de l'ancienne économie, nier la suffisance de la rédemption et la valeur du sang et des mérites du Christ; c'était renverser le dogme fondamental du christianisme. Il fut donc décidé que la question serait soumise à l'église mère de Jérusalem. Paul et Barnabé furent choisis pour représenter l’église d'Antioche. Sans doute Paul, tout désigné d'ailleurs par sa situation prépondérante et par le rôle capital qu'il venait de jouer dans l'évangélisation des Gentils, s'offrit-il spontanément, car une révélation lui enjoignait d'aller plaider lui-même sa cause comme il l’écrit dans sa lettre aux Galates.
Le concile de Jérusalem
Presque tous les critiques et tous les exégètes, estiment que le récit de saint Paul dans sa lettre aux Galates et celui de saint Luc au chapitre 15 des Actes relatif au concile de Jérusalem, se rapportent au même événement. En effet, les acteurs sont les mêmes, Paul et Barnabé d'un côté, Pierre et Jacques de l'autre. Les lieux sont les mêmes : Antioche et Jérusalem. Le débat est le même : on veut obliger les Gentils à la circoncision, malgré les protestations de Paul et de Barnabé. La date est la même. Enfin le dénouement est le même : les idées de Paul triomphent. On ne trouve rien à reprendre dans sa prédication et les colonnes de l'église sanctionnent pleinement son évangile. Cette première victoire de Paul fut éclatante. Après ce coup d'autorité, il était facile à saint Paul de faire prévaloir sa thèse. Il réclamait pour les Gentils le privilège d'être exonérés des observances légales. Saint Pierre abonda dans son sens, en rappelant que la liberté des Gentils avait été proclamée également par le Saint-Esprit lui-même. Mais ce fut Jacques qui eut l'honneur de proposer une solution vraiment pratique, à laquelle tout le monde se rallia. Il fut d'avis de déclarer les Gentils exempts de la Loi mosaïque, sauf quatre restrictions, destinées à faciliter leurs rapports avec les judéo-chrétiens. On devait leur interdire les viandes immolées aux idoles, la fornication — c'est-à-dire, selon toute apparence, les mariages entre consanguins défendus par la Loi mosaïque — les chairs étouffées et le sang. Ces quatre points étaient jadis prescrits sous peine de mort à tous les étrangers fixés en Israël. Mais ces quatre prohibitions — idolothytes, fornication, sang et chairs sanglantes — leur sont imposées, non de par la Loi de Moïse, mais en vertu de l'autorité des apôtres. On choisit les observances qui devaient rendre possibles les rapports de table et de société entre les deux fractions de la communauté chrétienne; car on ne pouvait pas espérer voir les fidèles issus du judaïsme dépouiller de sitôt leur horreur instinctive pour les idolothytes et les viandes non saignées. Enfin le décret apostolique concernait seulement l'église mixte d'Antioche, où la controverse s'était élevée, et les églises de Syrie et de Cilicie, qui se trouvaient dans des conditions analogues, et non pas l’église de Jérusalem et celles de Palestine. En somme, c'était le triomphe complet des idées de Paul. La liberté des Gentils reconnue en principe, leur évangélisation approuvée explicitement, les églises pauliniennes maintenues dans leur statu quo. Saint Paul peut dire en toute rigueur de vérité que les grands apôtres n'ont rien changé ni rien ajouté à son évangile.
Altercation entre Paul et Pierre
Cependant le décret de Jérusalem ne levait pas tous les doutes. Les Gentils, officiellement dispensés de la Loi, ne restaient-ils pas libres de l'observer dans toute sa teneur ? N'y avait-il pas pour eux mérite et perfection à le faire ? Les quatre articles qu'on leur imposait par nécessité, sans spécifier la nature de cette nécessité, semblaient les assimiler aux prosélytes juifs de second rang. N'étaient-ils pas ainsi placés, par rapport aux fidèles issus du Judaïsme, dans un état d'humiliante infériorité, qu'ils feraient cesser en assumant l'observation intégrale de la Loi ? Bien que formellement déchargées du fardeau de la Loi, les recrues de la gentilité ne se trouvent-elles pas de ce fait placées dans un état d'infériorité, par rapport aux recrues du judaïsme ? D'autre part, si la mesure prise par les apôtres donnait satisfaction aux judéo-chrétiens modérés, elle ne supprimait pas les objections des judaïsants stricts qui prétendaient que la tolérance du concile concernait les seuls Gentils et que tout le fardeau de la Loi continuait à peser sur les Juifs de race. De là cet incident qui suivit l’assemblée de Jérusalem et que saint Paul raconte : « quand je vis qu'ils ne marchaient pas droit selon la vérité de l'Évangile, je dis à Képhas devant tout le monde : "Si toi, qui es Juif, tu vis comme les Gentils et non comme les Juifs, pourquoi forces-tu les Gentils à judaïser ?" ».
Sur la question de principe, les deux apôtres Pierre et Paul étaient pleinement d'accord. En effet, dans l'église d'Antioche, où les Juifs n'étaient qu'une minorité, Pierre avait coutume de manger avec les Gentils. Son changement d'attitude fut provoqué par l'arrivée des judaïsants de Jérusalem. Pierre eut peur de ces croyants intransigeants de l’entourage de saint Jacques et jugea bon de les ménager. Aussi, à partir de ce jour, il prit l'habitude de décliner les invitations des fidèles issus de la gentilité et d'éviter même leur commerce. L'esprit de conciliation le poussait trop loin. Sa conduite était une dissimulation véritable, comme saint Paul le lui reprocha, puisqu'il agissait au rebours de ses convictions intimes; de plus, elle eut deux fâcheux résultats qu'il n'avait pas prévus: Les autres Juifs d'Antioche et Barnabé lui-même, qui auparavant ne se faisaient pas scrupule de manquer aux prescriptions légales, crurent nécessaire de l'imiter, tant son exemple avait de poids; Par contre, les païens convertis, dont la liberté venait d'être reconnue, se virent menacés d'isolement s'ils ne vivaient pas à la juive : placés dans l'alternative de renoncer à leurs privilèges ou de n'être plus les convives des apôtres et de leurs frères Hébreux, ils étaient moralement contraints de judaïser. Saint Paul sonda d'un coup d'œil les conséquences plus ou moins lointaines, mais fatales, de cette fausse situation. Il comprit que la « dissimulation » de Pierre et de ses imitateurs, bien que s'inspirant de motifs avouables, lésait, sous couleur de charité, les droits d'une portion de l'Église; elle pouvait amener une scission dans la communauté chrétienne. Paul connaissait la loyauté, l'humilité, la grandeur d'âme du chef des apôtres. Il ne craignit pas de lui reprocher publiquement, non pas une faute mais un exemple dangereux, non pas une erreur mais une inconséquence. Pierre se rendit certainement aux raisons de Paul.
La prédication de saint Paul
Les premiers sermons des apôtres durent être coulés dans un moule uniforme. Il comprenait deux points essentiels : la conversion sincère et la foi en Jésus-Christ Sauveur. A son tour, la conversion supposait :1) un acte de l'esprit et 2) un mouvement du cœur : l'adoration exclusive du vrai Dieu et le repentir du passé, inspiré par la perspective des jugements divins. Devant un auditoire juif, déjà imbu de monothéisme, la prédication se résumait donc en ces deux mots : pénitence et foi. Mais la foi au Christ prenait un caractère spécial ; ce n'était plus seulement la foi en Jésus mort pour nos péchés, dont Dieu avait sanctionné par le miracle de la résurrection la mission rédemptrice; c'était la foi au Messie prédit par les prophètes, espérance d'Israël et couronnement des promesses. Rupture complète avec le passé, profession du monothéisme, attente du salut par la médiation du Fils: tels étaient les actes de volonté et d'intelligence que saint Paul cherche à inculquer à ses auditeurs et qui les constitueraient chrétiens. A l'origine, l'article relatif au jugement de Dieu prenait volontiers la forme dramatique de la parousie : consolation des croyants, épouvante des infidèles. Dès qu'un auditeur touché de la grâce avait dit : Je crois, commençait pour lui la catéchèse proprement dite. Le dogme primordial était celui de la résurrection du Christ, qui appartient plutôt aux préliminaires de la foi, parce qu'il renferme la preuve la plus solide, comme la plus accessible, de la divinité du christianisme. Paul y appuyait avec une insistance particulière, car c'était pour lui la clef de la valeur sacramentelle du baptême et l'un des fondements de sa morale. C'est aux Gentils que Paul a reçu mission spéciale de prêcher. Son éducation helléniste et sa vive sympathie pour les Grecs l'y préparaient mieux que les autres. Il savait que la conscience veille toujours au cœur de l’homme et il percevait, au fond du sentiment religieux le plus dégradé, une sorte de monothéisme latent qu’il s’agissait de dégager. Dieu est le Dieu des Gentils aussi bien que des Juifs et il n'y a qu'à le montrer à la raison bien disposée pour le lui faire reconnaître. Ce problème de l’universalisation de l’évangile est donc un thème important de la théologie de saint Paul. Elle est souvent présente dans ses lettres.
Bien que les nouveaux croyants vinssent en majeure partie de la gentilité, les premières instructions religieuses leur avaient été d’abord données dans la synagogue. Cela explique pourquoi le dogme chrétien fondamental leur est présenté comme la réalisation des prophéties : le Nouveau Testament faisant suite à l'Ancien. L'auteur de l'Épître aux Hébreux range parmi les vérités élémentaires qu'aucun chrétien n'est censé ignorer, et qui devaient donc constituer le premier objet de la catéchèse, les articles suivants : 1 pénitence des œuvres mortes, 2 foi en Dieu, 3 doctrine du baptême, 4 imposition des mains, 5 résurrection des morts et 6 jugement éternel. En réalité, les deux premiers articles et les deux derniers entraient toujours dans les sermons adressés aux infidèles pour les amener à croire; seule, l'explication relative au baptême et à l'imposition des mains pouvait être réservée aux catéchumènes. Les Actes des apôtres nous donnent un intéressant spécimen de la prédication de saint Paul devant un auditoire où l'élément juif prédominait. Arrivés à Antioche de Pisidie, les missionnaires allèrent s'asseoir, dès le premier sabbat, au milieu des Juifs et des prosélytes qui remplissaient la synagogue. Après la lecture de la Loi et des prophètes, on invita saint Paul à prendre la parole. C'était une politesse qu'on ne manquait pas de faire aux étrangers de distinction. Paul y comptait. Aussi quand on lui proposa de prendre la parole, il se leva aussitôt et, d'un geste réclama l’attention et le silence. Que son exorde lui ait été suggéré ou non par la lecture du jour, il se mit à développer une des idées favorites de l'Écriture: la vocation divine d'Israël et la providence spéciale dont il fut l’objet, au temps des patriarches, en Égypte, dans le désert, sous les Juges, lors de l'institution de la royauté. Jusqu'ici rien ne pouvait exciter la défiance des auditeurs et le pharisien le plus orthodoxe n’aurait point parlé autrement. Mais, parvenu à David, l'orateur imprime insensiblement à son discours une autre direction, sans sortir toutefois du terrain prophétique. C'est de la race de David que doit naître, selon la promesse, le Sauveur d'Israël; et ce Sauveur est apparu il s’appelle Jésus, il a eu pour précurseur et pour garant un homme dont ils ne sauraient récuser le témoignage, puisqu’il leur appartient, puisqu'ils l'ont vénéré comme un thaumaturge et comme un prophète, saint Jean-Baptiste.
Ici commence proprement le corps du sermon, dont saint Luc ne nous donne sans doute qu'un bien court résumé. Saint Paul suit exactement la marche qu'il nous dit avoir adoptée dans l'évangélisation de Corinthe, tactique d'ailleurs si naturelle et si conforme à sa doctrine qu'on pouvait la soupçonner a priori. Il prouve par l’Écriture que la mort, la sépulture et la résurrection du Christ étaient prédites depuis longtemps, que les bourreaux de Jésus ont contribué, sans le savoir et sans le vouloir, à remplir les prophéties, que Dieu y a mis le sceau en ressuscitant son Fils. Le fait même de la résurrection se démontre comme toujours par la déposition de témoins oculaires encore vivants dont tout le monde peut contrôler l'attestation. La démonstration achevée, l'Apôtre conclut en ces termes : « Sachez donc, frères, que par lui la rémission des péchés vous est annoncée. La justification que vous n'avez pas pu obtenir par la Loi de Moïse, tout croyant la trouve en lui. » Il est impossible de ne pas sentir ici la touche de saint Paul. Pas une idée, presque pas un mot qui ne soit de son style et de sa langue. Tout y est caractéristique: l'opposition entre la foi et la Loi, l'impuissance de cette dernière, la rémission des péchés par la médiation du Christ, la justification par la foi en la personne du Rédempteur.
Portrait de l’Apôtre
De tous les personnages de l'âge apostolique, saint Paul est, sans contredit, celui que nous connaissons le mieux. Saint Luc, dans les Actes, et plus encore lui-même dans ses Épîtres ont dépeint sa personne et son caractère. Il était de taille médiocre. « Il avait trois coudées, dit saint Chrysostome, et pourtant il touchait le ciel. » Sa physionomie avait plus de finesse que de majesté, aussi les Lycaoniens le prirent-ils pour Mercure, tandis qu'ils regardaient saint Barnabé comme Jupiter, à cause de sa prestance extérieure. Ses ennemis de Corinthe reconnaissaient la force et l'énergie de son âme dans ses lettres; mais ils étaient étonnés de la faiblesse de son corps et de son apparence chétive. Aux yeux de quelques gens d'un goût raffiné et difficile, son élocution paraissait quelquefois embarrassée, quoiqu'elle fût ordinairement abondante et suffisamment ornée. Absorbé par des pensées sérieuses, il ne faisait pas beaucoup de cas de l'éloquence; mais sa diction était empreinte d'une certaine fierté, et, à l'occasion, son langage devenait entraînant, persuasif, noble et sublime. Ce qui donnait plus de force à son discours, c'est qu'il avait la conviction de posséder l'esprit de Dieu et que Jésus-Christ parlait par sa bouche : de là la confiance qui l'anime, sans jamais lui faire défaut. Mais, sous cette frêle enveloppe est cachée une âme forte, un esprit généreux, un cœur que rien ne saurait abattre, que le danger n'étonne et n’épouvante jamais. Si son corps est débile, si la souffrance l'accable, il se glorifie de ses infirmités. Il sent sa propre faiblesse, mais il est fort de la force de Dieu. Il montre comme des souvenirs glorieux les cicatrices des coups et des blessures qu'il a reçus dans l'exercice de l'apostolat et dont son corps est couvert. Ce sont les stigmates auxquels on reconnaît qu'il est serviteur de Jésus-Christ. Quatre fois, comme il nous l'apprend lui-même, saint Paul fut consolé et fortifié par des visions célestes; il eut même une extase où il fut transporté en présence de la majesté divine, et entendit des paroles mystérieuses qui ne pouvaient être répétées. Dix ans environ avant sa mort, il avait déjà été flagellé cinq fois par les Juifs. En violation de ses droits de citoyen romain, trois fois il fut battu de verges. A Lystre, après avoir voulu lui rendre les honneurs divins, le peuple, par suite d'un changement inconcevable, le lapida et le laissa pour mort. Dans ses voyages sur mer, trois fois il fit naufrage; une fois il passa un jour et une nuit à la merci des flots, soutenu sur un débris de navire. Durant ses pérégrinations apostoliques, il fut enchaîné et jeté sept fois en prison. Dans les tribulations qu'il endure, au milieu des douleurs qui l'accablent, il voit la continuation et le complément des souffrances de Jésus-Christ dans sa Passion. Peu lui importe la vie ou la mort, pourvu que sa vie ou sa mort contribue à la glorification de Jésus. Il eût préféré mourir pour être uni au Christ, mais il accepte de grand cœur la nécessité du travail pour remplir sa mission. Vrai modèle de l'Apôtre et du pasteur des âmes, saint Paul se fait tout à tous, se plie aux circonstances, s'identifie avec les sentiments et les besoins de ceux qu'il a convertis à la foi. Il garde toujours la dignité de l'Apôtre, il est ferme dans le maintien de la foi et les pratiques importantes; mais pour le reste il est indulgent, facile, miséricordieux. Pour ses néophytes il a des entrailles de mère. Il pense, il sent, il souffre, il se réjouit avec eux. Au lieu de leur imposer sèchement des lois, il s'efforce, en usant de toute la condescendance possible, de les amener à ne pas avoir d'autre volonté que la sienne. Rarement il use du commandement. Il semble toujours calculer d'avance l'effet de ses paroles, guidé par son expérience des hommes, et par son amour pour les nouveaux chrétiens. Nous pouvons le suivre prêchant depuis Jérusalem jusqu'en Illyrie et dans les régions environnantes, avant même d'avoir mis les pieds en Italie, comme il l'écrivait lui-même aux Romains. L'Arabie, la Séleucie, le pays de Damas, la région d'Antioche, les villes de l'île de Chypre, de la Pamphylie, de la Pisidie, de la Lycaonie, de la Syrie, de la Cilicie, de la Phrygie, de la Galatie, de la Mysie, de l'Achaïe, de l'Épire et des autres contrées situées entre Jérusalem et l'Illyrie, ont entendu sa parole apostolique ; ces régions l'ont vu créant des Églises en courant, et faisant surgir du sein de l'idolâtrie le peuple fidèle, destiné à adorer Dieu en esprit et en vérité.
Le martyre
Averti par une révélation divine, que le temps de sortir de ce monde approchait, saint Paul acheva ses itinéraires apostoliques. Il reprit le chemin de Rome en compagnie de Luc, de Tite, et d'autres coopérateurs. Saint Astère pense que saint Paul retrouva saint Pierre à Rome, et s'appliqua, de concert avec lui, à instruire les Juifs dans les synagogues, et à convertir les païens. Surtout ils réconfortèrent les chrétiens qui avaient échappé jusqu'alors à la persécution de Néron. Arrêté et mis en prison à son tour, saint Paul comparut devant l’empereur. Il fut alors abandonné de ses amis qui le considéraient comme perdu à leurs yeux et qui craignirent, en lui prêtant leur appui, d'être entraînés dans sa perte. Mais si tout secours humain fit défaut à l'Apôtre, Dieu lui donna un courage surhumain, et le rendit invincible. Il échappa momentanément à la mort, mais il demeura vraisemblablement en prison. La prison, malgré ses murs épais, ne mit aucun obstacle sérieux à sa prédication apostolique. Que Jésus-Christ fût glorifié, le reste le préoccupait peu. Saint Paul écrivait plus fréquemment ; il multipliait ses Épîtres, ses avis, son enseignement ; vrai testament de son inépuisable charité, dernière expression de sa foi ferme et constante, c'était comme la dernière étincelle du désir ardent qu'il avait de voir achevée son œuvre de l'établissement de la foi parmi les Païens. Le martyre de saint Pierre et de saint Paul mit le comble à la persécution de Néron. Saint Paul suivit la voie d'Ostie jusqu'à un lieu nommé les Eaux salviennes. Là il eut la tête tranchée par le glaive ; en qualité de citoyen romain il devait périr ainsi et non par la croix, supplice réservé par Rome aux personnes de basse condition. D’après la Tradition, le martyre de saint Paul arriva le 29 juin de l'an 66. Toujours d’après une tradition respectable, à peine tranchée, la tête de saint Paul rebondit trois fois, et à chaque fois elle fit jaillir de terre une source d'eau vive. Ces trois sources ont donné leur nom à ce lieu du martyre qu’on appelle les Trois-Fontaines. Les reproductions anciennes placent souvent derrière l’image de saint Paul un phénix sur un palmier, double emblème de la résurrection qui a, en grec, le même nom. On peut en voir de nombreux exemples dans des mosaïques. Cette particularité avait sans doute pour but d'honorer le principal prédicateur de la résurrection future. Saint Paul porte quelquefois comme attribut le livre de ses Épîtres. Ainsi le voit-on dans une mosaïque du VI° siècle, de Sainte-Marie in Cosmedin, de Ravenne, paraissant offrir deux volumes roulés au trône de l'Agneau, tandis que saint Pierre, de l'autre côté, a ses clefs dans les mains. L'attribut du glaive, qui fut l'instrument de sa mort, est postérieur aux premiers siècles de l'Église.
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Neuvaine à Saint Paul de Tarse
Neuvaine écrite par Florence Saillen
Chaque jour
Faire le signe de croix
Réciter le Credo
Credo
Je crois en Dieu, Le Père Tout-Puissant, Créateur du Ciel et de la Terre et en Jésus-Christ, Son Fils unique, notre Seigneur, qui a été conçu du Saint Esprit, est né de la Vierge Marie, a souffert sous Ponce Pilate, a été crucifié, est mort, a été enseveli, est descendu aux enfers. Le troisième jour est ressuscité des morts, est monté aux Cieux, est assis à la Droite de Dieu, le Père tout puissant, d’où il viendra juger les vivants et les morts. Je crois en l’Esprit Saint, à la Sainte Église Catholique, à la communion des saints, à la rémission des péchés, à la Résurrection de la chair, à la Vie Éternelle. Amen
Prière à Saint Paul
Apôtre de Jésus Christ, Dieu t'a appelé alors que tu étais encore un persécuteur.... Infatigable missionnaire, tu as parcouru villes et pays pour annoncer à tous la Bonne Nouvelle. Puissent nos vies être disposées à une conversion profonde du cœur et de l’esprit. Apprends-nous la persévérance et la joie simple qui vient de la certitude d’être aimés et sauvés par le Seigneur. Donne-nous de ne jamais perdre de vue Celui auprès duquel nos cœurs aspirent. Saint Paul, toi qui fus dans les larmes et dans les drames un guide et un pasteur, aide-nous à cheminer chaque jour, avec une foi et une espérance inébranlables, conduits par Jésus le Christ, Notre Seigneur.
Premier jour
Fruit demandé : La paix du Christ dans nos vies
«Béni soit le Dieu et Père de notre Seigneur Jésus Christ, qui nous a bénis par toutes sortes de bénédictions spirituelles, aux cieux, dans le Christ. C’est ainsi qu’Il nous a élus en lui, dès avant la fondation du monde, pour être saints et immaculés en sa présence, dans l’amour, déterminant d’avance que nous serions pour Lui des fils adoptifs par Jésus Christ. Tel fut le bon plaisir de sa volonté, à la louange de gloire de sa grâce, dont Il nous a gratifiés dans le Bien-aimé. En lui nous trouvons la rédemption, par son sang, la rémission des fautes, selon la richesse de sa grâce, qu’Il nous a prodiguée, en toute sagesse et intelligence : Il nous a fait connaître le mystère de sa volonté, ce dessein bienveillant qu’Il avait formé en lui par avance, pour le réaliser quand les temps seraient accomplis : ramener toutes choses sous un seul Chef, le Christ, les êtres célestes comme les terrestres. (Ep 1, 3-10) Car c’est lui qui est notre paix, lui qui de deux réalités n’a fait qu’une, détruisant la barrière qui les séparait, supprimant en sa chair la haine, cette Loi des préceptes avec ses ordonnances, pour créer en sa personne les deux en un seul Homme Nouveau, faire la paix et les réconcilier avec Dieu, tous deux en un seul Corps, par la croix : en sa personne il a tué la Haine. Alors il est venu proclamer la paix, paix pour vous qui étiez loin et paix pour ceux qui étaient proches : par lui nous avons en effet, tous deux en un seul Esprit, libre accès auprès du Père.»
(Ep 2, 14-18)
Temps de silence et de réflexion
Paul, par ton intercession, obtiens-nous la grâce d’être toujours plus à l’écoute de la Parole de Dieu afin que nos vies lui rendent gloire et louanges éternelles. Que la Paix de Dieu rayonne pleinement sur nos visages, dans nos existences et aussi dans nos relations avec notre prochain, par Jésus le Christ, Notre Seigneur.
Un Notre Père, un je Vous salue Marie, un Gloire au Père et la Prière à Saint Paul
Notre Père
Notre Père qui es aux cieux, que Ton Nom soit sanctifié, que Ton Règne vienne, que Ta Volonté soit faite sur la terre comme au ciel. Donne-nous aujourd'hui notre pain de ce jour. Pardonne-nous nos offenses, comme nous pardonnons aussi à ceux qui nous ont offensés. Et ne nous soumets pas à la tentation, mais délivre-nous du Mal. Amen.
Je vous salue Marie
Je vous salue, Marie pleine de grâces; le Seigneur est avec vous. Vous êtes bénie entre toutes les femmes et Jésus, le fruit de vos entrailles, est béni. Sainte Marie, Mère de Dieu, priez pour nous pauvres pécheurs, maintenant et à l'heure de notre mort. Amen.
Gloire au Père
Gloire au Père et au Fils et au Fils et au Saint Esprit comme il était au commencement, maintenant et toujours, et dans les siècles des siècles. Amen.
Deuxième jour
Fruit demandé : Se laisser guider par l’Esprit Saint
«Vous en effet, mes frères, vous avez été appelés à la liberté ; seulement, que cette liberté ne se tourne pas en prétexte pour la chair, mais par la charité mettez-vous au service les uns des autres. Car une formule contient toute la Loi dans sa plénitude : Tu aimeras ton prochain comme toi-même. Mais si vous vous mordez et vous dévorez les uns des autres, prenez garde que vous allez vous entre-détruire. Or je vous dis : laissez-vous mener par l’Esprit et vous ne risquerez pas de satisfaire la convoitise charnelle. Car la chair convoite contre l’esprit et l’esprit contre la chair ; il y a entre eux antagonisme, si bien que vous ne faites pas ce que vous voudriez.» (Ga 5,13-17)
Temps de silence et de réflexion
Paul, toi qui t’es laissé mener par l’Esprit, aide-nous aussi à nous abandonner entièrement en la Providence, sans doute ni crainte et dans la certitude absolue de marcher main dans la main avec le Père, quoi qu’il nous arrive, dans les bons comme les mauvais moments, par Jésus le Christ, Notre Seigneur.
Un Notre Père, un Je vous salue Marie, un Gloire au Père et la Prière à Saint Paul
Troisième jour
Fruits demandés : Charité et don de soi
«Songez-y : qui sème chichement moissonnera aussi chichement ; qui sème largement moissonnera aussi largement. Que chacun donne selon ce qu’il a décidé dans son cœur, non d’une manière chagrine ou contrainte ; car Dieu aime celui qui donne avec joie. Dieu d’ailleurs est assez puissant pour vous combler de toutes sortes de libéralités afin que, possédant toujours et en toute chose tout ce qu’il vous faut, il vous reste du superflu pour toute bonne œuvre, selon ce qu’il est écrit : Il a fait des largesses, il a donné aux pauvres ; sa justice demeure à jamais. Celui qui fournit au laboureur la semence et le pain qui le nourrit vous fournira la semence à vous aussi, et en abondance, et il fera croître les fruits de votre justice. Enrichis de toutes manières, vous pourrez pratiquer toutes les générosités, lesquelles par notre entremise, feront monter vers Dieu l’action de grâces. Car le service de cette offrande ne pourvoit pas seulement aux besoins des saints ; il est encore une source abondante de nombreuses actions de grâces envers Dieu.» (2 Co 9, 6-11)
Temps de silence et de réflexion
Paul, par ton intercession, obtiens-nous la grâce de pouvoir semer avec la même générosité que Dieu exerce envers nous. Que nos récoltes soient riches d’amour, de partage et de solidarité, à l’exemple même de ta vie, par Jésus le Christ, Notre Seigneur.
Un Notre Père, un je Vous salue Marie, un Gloire au Père et la Prière à Saint Paul
Quatrième jour
Fruit demandé : L’humilité
«Bénissez ceux qui vous persécutent ; bénissez, ne maudissez pas. Réjouissez-vous avec qui est dans la joie, pleurez avec qui pleure. Pleins d’une égale complaisance pour tous, sans vous complaire dans l’orgueil, attirés par ce qui est humble, ne vous complaisez pas dans votre propre sagesse. Sans rendre à personne le mal par le mal, ayant à cœur ce qui est bien devant tous les hommes, en paix avec tous si possible, autant qu’il dépend de vous, sans vous faire justice à vous-mêmes, mes bien-aimés, laissez agir la colère ; car il est écrit : C’est moi qui ferai justice, moi qui rétribuerai, dit le Seigneur.» (Rm 12, 14-19) «Ne te laisse pas vaincre par le mal, sois vainqueur du mal par le bien.» (Rm 12, 21)
Temps de silence et de réflexion
Paul, toi qui as cheminé pour annoncer l’Évangile, parfois au péril de ta propre vie, obtiens-nous la grâce de l’humilité. Que nous ne cherchions pas à nous justifier nous-mêmes, mais que nous comptions sans cesse sur l’océan de miséricorde de Dieu pour nous relever de nos tombeaux, par Jésus le Christ, Notre Seigneur.
Un Notre Père, un je vous salue Marie, un Gloire au Père et la Prière à Saint Paul
Cinquième jour
Fruit demandé : Le respect de nos corps
«Pour moi, frères, je n’ai pas pu vous parler comme à des hommes spirituels, mais comme à des êtres de chair, comme à des petits enfants dans le Christ. C’est du lait que je vous ai donné à boire, non une nourriture solide ; vous ne pouviez pas encore la supporter. Mais vous ne le pouvez pas davantage maintenant, car vous êtes encore charnels. Du moment qu’il y a parmi vous jalousie et dispute, n’êtes-vous pas charnels et votre conduite n’est-elle pas tout humaine ?» (1 Co 3, 1-3) «Ne savez-vous pas que vous êtes un temple de Dieu, et que l’Esprit de Dieu habite en vous ? Si quelqu’un détruit le temple de Dieu, celui-là, Dieu le détruira. Car le temple de Dieu est sacré, et ce temple, c’est vous.» (1 Co 3, 16-17)
Temps de silence et de réflexion
Paul, aide-nous à prendre conscience du respect que nous devons à nos propres corps. Et qu’à travers la multitude des gestes quotidiens, nous sachions percevoir ce qui nous grandit, ou au contraire, ce qui nous avilit et nous rend indignes du Temple de Dieu au milieu de nous, par Jésus le Christ, Notre Seigneur.
Un Notre Père, un je vous salue Marie, un Gloire au Père et la Prière à Saint Paul
Sixième jour
Fruit demandé : Le courage de porter nos croix
«Toi donc, mon enfant, fortifie-toi dans la grâce du Christ Jésus. Ce que tu as appris de moi sur l’attestation de nombreux témoins, confie-le à des hommes sûrs, capables à leur tour d’en instruire d’autres. Prends ta part de souffrances, en bon soldat du Christ Jésus. Dans le métier des armes, personne ne s’encombre des affaires de la vie civile, s’il veut donner satisfaction à qui l’a engagé. De même l’athlète ne reçoit la couronne que s’il a lutté selon les règles. C’est au cultivateur qui travaille dur, que doivent revenir, en premier lieu, les fruits de la récolte. Comprends ce que je veux dire. D’ailleurs le Seigneur te fera tout comprendre. Souviens-toi de Jésus Christ, ressuscité d’entre les morts, issu de la race de David, selon mon Evangile. Pour lui je souffre jusqu’à porter des chaînes comme un malfaiteur. Mais la parole de Dieu n’est pas enchaînée. C’est pourquoi j’endure tout pour les élus, afin qu’eux aussi obtiennent le salut qui est dans le Christ Jésus avec la gloire éternelle. Elle est sûre cette parole : si nous sommes morts avec lui, avec lui nous vivrons. Si nous tenons ferme, avec lui nous régnerons. Si nous le renions, lui aussi nous reniera. Si nous sommes infidèles, lui reste fidèle, car il ne peut se renier lui-même.» (2 Tm 2, 1-13)
Temps de silence et de réflexion
Paul, toi l’apôtre des nations, aide-nous à rendre témoignage de l’espérance qui est en nous, et qu’en toutes circonstances nous ne dévions pas. Puissions-nous, à la suite du Christ, prendre nos croix courageusement, afin de le suivre, lui qui vit et règne pour les siècles des siècles.
Un Notre Père, un Je vous salue Marie, un Gloire au Père et la Prière à Saint Paul
Septième jour
Fruits demandés : Confiance et abandon
«Que dire après cela ? Si Dieu est pour nous, qui sera contre nous ? Lui qui n’a pas épargné son propre Fils mais l’a livré pour nous tous, comment avec lui ne nous accordera-t-il pas toute faveur ? Qui se fera l’accusateur de ceux que Dieu a élus ? C’est Dieu qui justifie. Qui donc condamnera ?» (Rm 8, 31-33) «Qui nous séparera de l’amour du Christ ? La tribulation, l’angoisse, la persécution, la faim, la nudité, les périls, le glaive ?» (Rm 8, 35) «Oui, j’en ai l’assurance, ni mort ni vie, ni anges ni principautés, ni présent ni avenir, ni puissances, ni auteur ni profondeur, ni aucune créature ne pourra nous séparer de l’amour de Dieu manifesté dans le Christ Jésus notre Seigneur.» (Rm 8, 38-39)
Temps de silence et de réflexion
Paul, obtiens-nous la grâce de la confiance et de l’abandon. Et que rien ne puisse jamais nous éloigner du feu d’amour que Dieu a pour l’humanité tout entière. Choisissons d’être «pour Dieu» comme Lui, qui est fidèlement et depuis la nuit des temps «pour nous», au point de livrer son propre Fils, pour la rémission de tous nos péchés, Lui qui vit et règne pour les siècles des siècles.
Un Notre Père, un je Vous salue Marie, un Gloire au Père et la Prière à Saint Paul
Huitième jour
Fruit demandé : Un esprit de prière tout au long du jour
«Je vous exhorte donc, frères, par la miséricorde de Dieu, à vous offrir vous-mêmes en sacrifice vivant, saint, agréable à Dieu : c’est là le culte spirituel que vous avez à rendre. Et ne vous modelez pas sur le monde présent, mais que le renouvellement de votre jugement vous transforme et vous fasse discerner quelle est la volonté de Dieu, ce qui est bon, ce qui lui plaît, ce qui est parfait. Au nom de la grâce qui m’a été donnée, je le dis à tous et à chacun : ne vous surestimez pas plus qu’il ne faut vous estimer, mais gardez de vous une sage estime, chacun selon le degré de foi que le Seigneur lui a départi.» (Rm 12,1-4)
Temps de silence et de réflexion
Paul, par ton intercession, obtiens-nous de distinguer la volonté de Dieu à travers tout ce qui nous arrive chaque jour. Pour cela, aide-nous à persévérer dans la prière, moment privilégié avec Dieu, où tout notre être est en communion intime avec Lui, par Jésus le Christ, Notre Seigneur.
Un Notre Père, un je Vous salue Marie, un Gloire au Père et la Prière à Saint Paul
Neuvième jour
Fruit demandé : L’amour, comme moteur de vie
«Quand je parlerais les langues des hommes et des anges, si je n'ai pas la charité, je ne suis plus qu'airain qui sonne ou cymbale qui retentit. Quand j'aurais le don de prophétie et que je connaîtrais tous les mystères et toute la science, quand j'aurais la plénitude de la foi, une foi à transporter des montagnes, si je n'ai pas la charité, je ne suis rien. Quand je distribuerais tous mes biens en aumônes, quand je livrerais mon corps aux flammes, si je n'ai pas la charité, cela ne me sert de rien. La charité est longanime ; la charité est serviable ; elle n'est pas envieuse ; la charité ne fanfaronne pas, ne se gonfle pas ; elle ne fait rien d'inconvenant, ne cherche pas son intérêt, ne s'irrite pas, ne tient pas compte du mal ; elle ne se réjouit pas de l'injustice, mais elle met sa joie dans la vérité. Elle excuse tout, croit tout, espère tout, supporte tout. Les prophéties ? Elles disparaîtront. Les langues ? Elles se tairont. La science ? Elle disparaîtra. Car partielle est notre science, partielle aussi notre prophétie. Mais quand viendra ce qui est parfait, ce qui est partiel disparaîtra. Lorsque j’étais enfant, je parlais en enfant, je pensais en enfant, je raisonnais en enfant ; une fois devenu homme, j’ai fait disparaître ce qui était de l’enfant.» (1 Co 13, 1-11) «Maintenant donc demeurent foi, espérance, charité, ces trois choses, mais la plus grande d’entre elles, c’est la charité.» (1 Co 13, 13) «J’ai eu grande joie dans le Seigneur à voir enfin refleurir votre intérêt pour moi ; il était bien toujours vivant, mais vous ne trouviez pas d’occasion. Ce n’est pas mon dénuement qui m’inspire ces paroles ; j’ai appris en effet à me suffire en toute occasion. Je sais me priver comme je sais être à l’aise. En tout temps et en toutes manières, je me suis initié à la satiété comme à la faim, à l’abondance comme au dénuement. Je puis tout en Celui qui me rend fort. Cependant, vous avez bien fait de prendre part à mon épreuve.» (Ph 4, 10-14) «La grâce du Seigneur soit avec votre esprit !»
Temps de silence et de réflexion
Paul, par ton intercession, aide-nous à imprégner d’amour notre quotidien. Que rien ne soit fait de manière automatique ou machinale, mais qu’au contraire, un esprit de charité nous anime sans cesse, quelque soit nos humeurs ou les circonstances de nos vies. Et qu’à la dernière heure, nous puissions sans honte aucune, nous dire que le moteur de nos vies fut l’amour, qui nous est donné par Jésus le Christ, Notre Seigneur.
Un Notre Père, un je Vous salue Marie, un Gloire au Père et la Prière à Saint Paul
Imprimatur de Mgr Norbert Brunner le 30 octobre 2008
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