Le Mois du Saint Sacrement
Le Mois du Très Saint Sacrement
Vingt-quatrième jour
Le Mercredi de la quatrième semaine après l'Octave de Pentecôte
Venez Esprit Saint,
O Lumière Bienheureuse,
Venez remplir jusqu'à l'intime
le cœur de tous Vos fidèles.
Je Vous salue Marie...
Nous lisons dans l'Ecriture Sainte ces paroles consolantes : « La Bénédiction de Dieu est comme un fleuve qui se déborde ». Il y a peu d'expressions qui soient plus souvent employées dans les Livres Saints que celles de Bénédiction, Bénir, Béni. Et dans l'Eglise rien aussi de plus usité que l'action de bénir. Voyez les Sacrements, que de bénédictions les accompagnent ! A la Messe, la bénédiction par le Signe de la Croix est répétée continuellement. L'Eglise bénit toutes choses. Enfin les fidèles sont bénis avec la Sainte Eucharistie. N'est-il pas très raisonnable de chercher la signification de ces mots : « Bénir, bénédiction ? » Il y a deux manières d'employer cette expression. Tantôt c'est l'homme qui bénit Dieu, tantôt Dieu qui bénit l'homme. Dans le premier sens dont nous n'avons pas à nous occuper ici, ce mot signifie que la créature loue Dieu, le remercie, et désire sa gloire, c'est-à-dire, que cette gloire soit connue et se propage dans le monde entier. Mais si c'est Dieu qui bénit l'homme, que faut-il entendre par les expressions déjà citées ? Ouvrons les livres saints ; l'Esprit de Dieu sera notre guide.
Dieu est arrivé au cinquième jour de la création et Il n'a encore rien béni de tout ce qu'Il a fait. Ce jour là, le cinquième, Il fait des êtres vivants, les animaux, Il les bénit. Le lendemain, le sixième jour, Il fait l'homme à son image et à sa ressemblance. Or, l'Ecriture dit : Il fit l'homme et la femme, et Il les bénit ». Voilà une première remarque bien importante et qui jette un grand jour sur cette question : Que fait Dieu quand Il bénit ? Or, si Dieu parle en bénissant, et surtout la première fois qu'il bénit, il est évident, qu'il doit dire ce que c'est que bénir. Eh bien! Dieu parle réellement. Voici les paroles de l'historien sacré : « Il les bénit et Il dit : « Croissez et multipliez-vous ». Donc, pour Dieu, bénir c'est donner un principe d'accroissement et de multiplication. La bénédiction est donc la communication de la vertu de fécondité. Quand Noé sort de l'arche, après le déluge, Dieu le bénit avec toute sa famille, et Il leur dit : « Croissez et Multipliez-vous ». C'est surtout dans l'histoire d'Abraham que nous découvrons toute la pensée de Dieu quand Il bénit. Si nous cherchons l'effet, le fruit de cette bénédiction que Dieu donne si souvent au Saint Patriarche, nous les trouverons dans cette magnifique promesse : « J'augmenterai et Je multiplierais ta race comme les étoiles du Ciel et comme le sable qui est sur le rivage de la mer ». La bénédiction d'Isaac, de Jacob, de Joseph, de tous les Patriarches, renferme toujours une promesse d'accroissement. Quand le Seigneur, après avoir mis à l'épreuve la fidélité de Job, voulut le récompenser, Il Le BéNit, et aussitôt ses enfants et ses troupeaux se multiplièrent.
Si de l'Ancien Testament nous passons au Nouveau, il nous sera facile de prouver que ces mots « Bénir, Bénédiction », quand c'est Dieu qui bénit Sa créature, ont toujours le même sens. Avant de le prouver, faisons une remarque. Dans l'ancien Testament, la terre était la figure du Ciel, les biens temporels la figure des biens spirituels. La bénédiction de Dieu promettait l'abondance des moissons, la multiplication des troupeaux. Depuis Jésus-Christ, il s'agit d'accroissement, de multiplication dans un ordre bien plus élevé, l'ordre surnaturel, les biens de la grâce, les richesses de l'âme. Voilà pourquoi Saint Paul ne parle pas comme Abraham, Isaac, Jacob, Moïse ; mais il dit la réalité dont les Saints Patriarches exprimaient la figure. Écoutons le grand Apôtre : « Béni soit Dieu le Père de notre Seigneur Jésus-Christ, qui nous a comblés en Jésus-Christ de toutes sortes de bénédictions spirituelles pour le Ciel ».
Nous concluons de ces paroles de Saint Paul, que la Bénédiction, sous la Loi nouvelle, produit les mêmes effets que dans l'ancien Testament, mais dans un ordre de choses bien supérieur. Sainte Elisabeth dit à Marie : « Vous êtes bénie parmi toutes les femmes ». Cette bénédiction, tout le monde la comprend. C'est un accroissement, une abondance, une multiplication que l'Ange Gabriel avait déjà annoncée ; car après avoir dit : « Vous êtes bénie parmi toutes les femmes », il ajoute : « Vous avez trouvé grâce devant Dieu. Vous concevrez dans Votre Sein, et Vous enfanterez un Fils, a qui Vous donnerez le Nom de Jésus. Il sera grand, et sera appelé le Fils du Très-haut. Le Seigneur Dieu Lui donnera le trône de David son Père : Il Régnera éternellement sur la Maison de Jacob, et Son Règne n'aura pas point de fin ».
Voilà donc ce fils d'Abraham, le vrai Isaac par qui tous les peuples de la terre seront comblés de bénédictions. Il vient avec la bénédiction de Dieu Son Père ; quel Royaume ! Quel empire va devenir le sien !... Si Jésus-Christ multiplie les pains dans le désert, c'est en les bénissant. Au moment d'instituer la Divine Eucharistie, Il bénit le pain, et Saint Marc nous dit que ce fut en le bénissant qu'Il le distribua à Ses Disciples, et qu'Il prononça ces sublimes paroles : « Ceci est Mon Corps ». Avant de monter au Ciel, Jésus-Christ bénit solennellement ses Apôtres et tous ses Disciples. Nous connaissons les suites et les conséquences de cette bénédiction. Elle signifiait : « Croissez et multipliez-vous ». On sait aujourd'hui si le genre humain l'a reçue.
Nous devons estimer la Bénédiction du Saint Sacrement
Il est certain que si nous avions vu Jésus-Christ de nos yeux, si nous l'avions entendu de nos oreilles et touché de nos mains, comme s'exprime le Disciple bien-aimé, nous aurions regardé comme un grand honneur de pouvoir nous prosterner aux pieds de cet Homme-Dieu, pour Lui demander Sa bénédiction. Tous les jours, nous demandons aux Prêtres et aux Religieux, mais surtout aux Évêques de nous bénir. Nous regardons comme un grand bonheur de voir le Souverain Pontife, et d'être béni par le vicaire de Jésus-Christ. Mais les Prêtres, les Évêques, le Pape lui-même, que font-ils lorsqu'ils nous bénissent ? Ils agissent comme ministres de Jésus-Christ, ils demandent à Dieu de nous bénir Lui-même. Voilà pourquoi ces formules consacrées par la Liturgie : « Que le Dieu Tout-puissant, le Père, le Fils et le Saint Esprit, vous Bénisse », ou bien : « Que la Bénédiction du Dieu Tout-puissant, le Père, le Fils et le Saint Esprit descende sur vous ». C'est un vœu formé en notre faveur, c'est une prière qui monte au Ciel et qui attire toujours sur nous quelque grâce spéciale.
Mais la Bénédiction du Très Saint Sacrement est quelque chose de bien plus grand et que nous devons estimer davantage. Ici c'est Jésus-Christ Lui-même qui nous bénit. C'est la raison pour laquelle le prêtre, suivant les prescriptions de l'Eglise, ne doit prononcer aucune parole, lorsqu'il bénit les fidèles avec le Corps de Jésus-Christ. Après le Saint sacrifice de la Messe et la Communion, peut-on concevoir quelque chose de plus grand, une cérémonie plus auguste, que la Bénédiction du Saint Sacrement ? Quand le prophète Isaïe a vu de loin une Bénédiction au milieu de la terre, ne pourrions-nous pas dire qu'il a annoncé ce grand acte par lequel le Sauveur, dans le monde entier, bénit tous ses enfants ? Quand le grand Prêtre Melchisedech, offrant le pain et le vin, bénit le Saint Patriarche Abraham, ne Figurait-il pas le Sauveur caché sous les espèces Eucharistiques, et bénissant les fidèles qui sont les vrais enfants d'Abraham ?
Mais n'allons pas chercher des figures. Ces enfants que le Sauveur caressait en les bénissant; ces malades qu'Il bénissait, en imposant Ses mains divines sur leur tête accablée de douleur; ces saintes femmes qui tombèrent à ses pieds après la Résurrection, et voulurent être bénies ; les Apôtres et tous les Disciples, sur lesquels il éleva ses mains pour les bénir, avant de quitter la terre, ont-ils été plus honorés que nous ? Et si nous le voulons, les faveurs qui leur furent accordées, ne les recevrons-nous pas nous-mêmes ? Ah ! Si la grâce est comme un Paradis de délices dans les bénédictions. Si saint Paul nous annonce une moisson abondante dans les bénédictions. S'il est écrit que le juste sera plein des bénédictions du Seigneur, qui pourra dire ce qui est donné à l'âme fidèle quand elle est bénie par la Sainte Eucharistie ? Comment concevoir l'effet de cette parole du Sauveur quand il nous bénit : « Croissez, c'est Moi qui le veux, croissez en mérites, en vertus, en richesses spirituelles. Montez, élevez-vous, vers les collines éternelles ; multipliez vos fruits, que votre moisson soit abondante ; c'est Moi qui vous le dis, en vous bénissant. Cet accroissement, cette multiplication de tous les biens, c'est Ma bénédiction qui les donne !...
O Ciel ! je n'ai jamais bien pensé à ce trésor inépuisable de grâces et de sainteté, la Bénédiction du Très Saint Sacrement ! Désormais je l'estimerai davantage, et ma conduite prouvera que je regarde comme un très grand honneur de recevoir souvent cette bénédiction.
Deuxième point
Nous devons désirer la Bénédiction du Saint Sacrement
Plus un bien est grand, plus il est estimable, plus aussi on doit le désirer. Ce désir se manifeste par les moyens que l'on emploie et les efforts que l'on fait pour arriver à une pleine possession. Un Chrétien qui estime et qui regarde comme un grand bonheur la Bénédiction du Saint Sacrement, ne néglige rien pour la recevoir souvent. Il saisit, avec un saint empressement, toutes les occasions qui se présentent d'être béni par Jésus-Christ. L'Eglise qui connaît notre profonde misère a voulu multiplier en notre faveur les Bénédictions du Saint Sacrement. Elle nous invite à ne pas négliger ce moyen de sanctification et de Salut. Elle veut que nous soyons bénis souvent par Jésus-Christ ; et comme le Divin Sauveur a laissé à son Épouse la libre disposition de Son Corps et de Son Sang, dans le Sacrement de l'Eucharistie ; cette mère tendre et toujours riche en amour à l'égard de ses enfants, les appelle fréquemment au pied des Saints Autels, pour prier son Céleste Époux de les bénir. Tantôt c'est un office solennel qui se termine par la Bénédiction du Très Saint Sacrement ; tantôt cette Bénédiction nous est donnée en récompense de notre zèle et de notre empressement à accompagner le Saint Viatique; d'autres fois ce sont des faveurs encore plus signalées. Il nous est permis d'élever des autels sur les places publiques, dans nos rues et contre les murs de notre propre maison ; Jésus-Christ vient, Il se repose un instant sur ces autels si bien nommés, « les reposoirs », et de là le Divin Maître bénit tout un peuple, Il bénit notre famille, nos enfants !.... O amour de Jésus !...
Mais tous les hommes correspondent-ils à cet amour ! Oh ! non. On en voit un grand nombre qui sont appelés et qui ne viennent pas. L'Eglise les invite et ils refusent de se rendre aux pieds de l'adorable Sauveur. Malheureux ! il est écrit : « Il n'a pas voulu la bénédiction, elle s'éloignera de lui ». La Bénédiction de Jésus aurait ouvert le sein de la Divine Miséricorde : elle a été refusée, la Miséricorde s'éloigne. Pour moi, Seigneur Jésus, il n'en sera plus ainsi. Partout où je serai appelé pour être béni par vous, on me verra accourir avec un saint empressement. Mille fois plus heureux de recevoir, ne fût-ce que sur votre passage, la Bénédiction que Vous donnez à Vos enfants, mille fois plus heureux que si le monde ouvrait devant moi ses trésors. Bénissez-moi, Divin Sauveur, afin que j'éprouve ce que dit le Prophète : « Vous l'avez prévenu de la douceur de Vos bénédictions ». Je prends en particulier la résolution de ne jamais passer devant une Eglise sans y entrer pour Vous demander de me bénir ; et quand je quitterai le Lieu Saint, ce sera encore après Vous avoir prié de me donner Votre bénédiction, que je recevrai en esprit, et avec un vif sentiment de reconnaissance. Seigneur, je ne Vous quitte point sans que Vous m'ayez béni !
Dispositions pour recevoir la Bénédiction du Saint Sacrement
Qui dira les sentiments de Foi, de dévotion, de confiance et d'amour dont l'âme de Marie était pénétrée lorsqu'elle demandait à son Divin Fils de la bénir, et que Jésus plein de Tendresse pour Sa Sainte Mère, plaçait ses mains divines sur le front de cette Auguste Vierge !... Qui dira le respect profond et tous les sentiments de piété tendre, affectueuse dont furent inondés les cœurs des pasteurs de Bethléem, des mages venus de l'Orient, lorsque prosternés devant le berceau de l'Enfant-Dieu, Marie plaça les mains de Jésus sur leur front ? Je sais que l'Évangile ne raconte pas ces choses, mais est-ce une illusion de ma piété de me les représenter ! Pourquoi donc recourir à des suppositions ? Madeleine est venue chez le Pharisien, où Jésus se trouvait ; elle est tombée aux pieds du Sauveur ; Jésus l'a bénie par ces paroles : « Vos Péchés vous sont remis, votre Foi vous a sauvée ; allez en paix ». Or, pénétrons, si la chose est possible, dans l'âme sublime de Madeleine, et imaginons la joie, la reconnaissance, la dévotion de cette illustre pénitente, demandant à l'Homme-Dieu de la bénir !...
Le juste et le pécheur doivent être avides des Bénédictions de Jésus-Christ ; l'un et l'autre doivent y apporter des dispositions relatives à l'état de leur âme. Il me semble voir Jacob béni par Isaac et recevant la promesse de tous les biens que le Seigneur avait montrés de loin à Abraham. Esaü apprend cette préférence donnée à son frère. Quel désespoir ! Quelle désolation ! Mais Isaac est toujours son père; il tombe à ses pieds : « Mon Père, n'avez-vous pas réservé pour moi une bénédiction ? » et son Père le bénit. Le pécheur viendra comme Esaü, il dira à Jésus-Christ : « Seigneur, toutes Vos grâces sont-elles pour les justes ? Je m'étais éloigné de Vous, c'est vrai, mais n'avez-Vous pas réservé pour moi une bénédiction ? » Le Cœur de Jésus sera touché, et le pécheur sera béni, et il entendra dans le fond de son âme, cette parole délicieuse : « Va, Mon fils, et ne pèche plus ». Le juste vient avec une Foi vive, il se prosterne, il demande au Sauveur d'étendre Sa main, et de le toucher, et Jésus lui répond : « Mon fils, sois béni !... »
O Jésus, je préparerai mon âme, j'irai à Vous avec une vraie dévotion ; Vous me bénirez. Vous direz sur moi : « Que la rosée du Ciel inonde ton âme ; que le froment préparé pour Mes élus, que le vin délicieux dont j'enivre les vierges, Mes épouses chéries, te soient donnés avec abondance ». Et votre bénédiction deviendra la source de toutes les grâces qui devront me conduire au Salut. Amen.
Lauda, Sion, Salvatorem,
Lauda ducem et pastorem,
In hymnis et canticis,
Loue, Sion, ton Sauveur,
Loue ton chef et ton Pasteur,
Par des hymnes et des cantiques.
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