Le Mois de Saint Vincent de Paul
Le Mois de Saint Vincent de Paul
Lectures de piété sur ses vertus et ses œuvres pour chaque jour du mois de juillet
Vingt-troisième jour
Charité de Vincent envers les Pauvres
Après avoir vu en général quelle était la charité de Vincent, et les exemples remarquables qu'il en a donnés en diverses rencontres, il nous la faut maintenant considérer plus en détail dans les sujets particuliers envers lesquels il l'a saintement exercée. Ceux qui se présentent les premiers sont les pauvres, qu'il a chéris avec un amour très-ardent, et pour lesquels il avait un cœur plus que paternel ; et certainement si l'on veut faire attention sur toute sa vie, particulièrement depuis le temps qu'il s'est destiné au service des autels, on trouvera qu'elle n'a été autre chose qu'un exercice continuel de charité envers les pauvres, et que ses principales œuvres et ses entreprises les plus signalées ont été pour les pauvres. C'est pour eux, qu'il a procuré la fondation de divers hôpitaux, c'est pour eux qu'il a élevé les confréries de la charité en tant de lieux, et qu'il a institué la compagnie des filles de la charité, auxquelles il a donné la qualité de Servantes des Pauvres ; c'est pour eux qu'il a fait tant d'assemblées, qu'il a obligé les siens d'entreprendre tant de voyages, et qu'il a employé ses soins, ses veilles, et tous les moyens dont il a pu aviser, pour contribuer à leur soulagement et a leur service. Enfin, on peut dire qu'il a institué la Congrégation de la Mission pour évangéliser les pauvres ; et pour ce sujet il disait souvent à ses missionnaires : « Nous sommes les prêtres des pauvres ; Dieu nous a choisis pour eux, c'est là notre point capital, le reste n'est qu'accessoire ».
En effet, il semblait que la principale affaire de ce charitable prêtre était de s'employer pour les pauvres ; c'était là, qu'il portait le plus ordinairement ses pensées, et où tendaient ses principales affections. Il portait les pauvres dans son cœur; il était vivement touché de leurs souffrances, et il avait une affliction très sensible lorsque connaissant leurs nécessités et leurs misères, il ne voyait aucun moyen de les pouvoir secourir.
Étant un jour tout saisi de douleur pour ce sujet, et parlant à l'un des siens qui l'accompagnait en ville, après quelques soupirs et exclamations sur la mauvaise saison qui menaçait en ce temps-là les pauvres de famine et de mort : « Je suis en peine, lui dit-il, pour notre compagnie, mais en vérité elle ne me touche point à l'égal des pauvres ; nous en serons quittes en allant demander du pain à nos autres maisons, si elles en ont, ou à servir de vicaires dans les paroisses ; mais pour les pauvres que feront-ils, et où est-ce qu'ils pourront aller ? J'avoue que c'est-là mon poids et ma douleur ; on m'a dit qu'aux champs les pauvres gens disent que tandis qu'ils auront des fruits ils vivront, mais qu'après cela ils n'auront qu'à faire leurs fosses, et s'enterrer tout vivants. O Dieu ! Quelle extrémité de misères ! Et le moyen d'y remédier ».
Une autre fois parlant aux siens, sur le sujet de mêmes pauvres, il fit ce raisonnement : « Dieu aime les pauvres, et par conséquent il aime ceux qui les aiment ; car lorsqu'on aime bien quelqu'un, on a de l'affection pour ses amis et ses serviteurs. Or, la petite compagnie de la Mission tâche de s'appliquer avec affection à servir les pauvres, qui sont les bien-aimés de Dieu, ainsi nous avons sujet d'espérer que, pour l'amour d'eux, Dieu nous aimera. Allons donc, mes frères, et employons-nous avec un nouvel amour à servir les pauvres et même cherchons les plus pauvres et les plus abandonnés ; reconnaissons devant Dieu que ce sont nos Seigneurs et nos maîtres, et que nous sommes indignes de leur rendre service ».
Dans une autre rencontre s'entretenant avec deux personnes ecclésiastiques de qualité, il leur dit une parole très remarquable, et qui mérite de n'être pas mise en oubli ; c'est à savoir que tous ceux qui auront aimé les pauvres pendant leur vie, n'auront à la mort aucune crainte ; qu'il en avait eu l'expérience plusieurs fois, et que pour cet effet, il avait coutume d'enseigner cette maxime dans l'esprit des personnes qu'il voyait travaillées des appréhensions de la mort, et prenait de là occasion de les exciter à l'amour des pauvres. Et parlant en l'une de ses lettres du décès d'un vertueux prêtre, il confirme la même chose. Sa mort, dit-il, a répondu à sa vie jusqu'à la fin, par un acquiescement continuel au bon plaisir de Dieu, sans avoir ressenti aucun mouvement ni aucune pensée contraire. Il avait toujours beaucoup appréhendé la mort ; mais comme il vit dès le commencement de sa maladie, qu'il envisageait sans aucune crainte et même avec plaisir, il me dit qu'assurément il en mourrait, parce que, disait-il, il m'avait ouï dire que « Dieu ôte l'appréhension de la mort à ceux qui ont volontiers exercé la charité envers les pauvres, et qui ont été travaillés de cette crainte pendant leur vie ».
Or, ce grand amour que Vincent avait pour les pauvres opérait deux effets dans son cœur : l'un était un grand sentiment de compassion de leur indigence et de leur misère, car il avait le cœur extrêmement tendre à leur égard, et l'on a remarqué que lorsqu'en disant les litanies de Jésus, il proférait ces paroles : « Jésus père des pauvres », c'était ordinairement d'un ton de voix qui témoignait l'attendrissement de son cœur : et toutes les fois qu'on lui venait parler de quelque misère ou nécessité particulière, on le voyait soupirer en fermant les yeux et haussant les épaules, comme un homme qui se sent pressé de douleur ; et son visage abattu faisait bien paraître que son cœur était navré de la compassion qu'il avait pour les souffrances des pauvres ; c'est dans ce sentiment que, parlant un jour aux siens sur le sujet de cette compassion : « Quand nous allons voir les pauvres, leur dit-il, nous devons entrer dans leurs sentiments pour souffrir avec eux, et nous mettre dans les dispositions de ce grand Apôtre, qui disait : « Je me suis fait tout à tous; en sorte que ce ne soit pas sur nous que tombe la plainte qu'a faîte autrefois le Seigneur par un prophète: J'ai attendu pour voir si quelqu'un ne compâtirait point à mes souffrances, et il ne s'en est trouvé aucun » ; et pour cela, il faut tâcher d'attendrir nos cœurs et de les rendre susceptibles des souffrances et des misères du prochain, et prier Dieu qu'il nous donne le véritable esprit de miséricorde qui est le propre esprit de Dieu; car, comme dit l'église, c'est le propre de Dieu de faire miséricorde et d'en donner l'esprit. Demandons donc à Dieu, mes frères, qu'il nous donne cet esprit de compassion, qu'il nous en remplisse, qu'il nous le conserve; en sorte que qui verra un missionnaire puisse dire : « Voilà un homme plein de miséricorde » ; pensons un peu combien nous avons besoin de miséricorde, nous qui devons l'exercer envers les autres, et porter la miséricorde en toutes sortes de lieux, et souffrir tout pour la miséricorde ».
Or, Vincent tenait cette maxime, dans les services et assistances qu'il rendait aux pauvres, d'étendre plus particulièrement ses soins sur ceux qui étaient les plus abandonnés, et pour cette raison, il s'appliquait avec une affection toute spéciale à pourvoir aux besoins des pauvres petits enfants trouvés, comme de ceux qui étaient les plus délaissés et les moins capables de s'aider : il avait un amour très tendre pour ces pauvres petites innocentes créatures, et un amour non-seulement affectif mais encore plus effectif. « N'est-ce pas le devoir des pères, disait-il un jour aux siens, sur ce sujet, de pourvoir aux nécessités de leurs enfants, et puisque Dieu nous a substitués au lieu de ceux qui les ont engendrés, afin que nous prenions soin de leur conserver la vie, et de les faire élever et instruire en la connaissance des choses de leur salut, prenons bien garde de ne nous point relâcher dans une entreprise qui lui est si agréable; car, si après que leurs mères dénaturées les ont ainsi exposés et abandonnés, nous venons à négliger le soin de leur nourriture et de leur éducation, que deviendront-ils ? Pourrons-nous consentir à les voir périr tous comme autrefois, dans cette grande ville de Paris ? »
Une personne de vertu qui connaissait particulièrement les peines que Vincent prenait pour la conservation de ces pauvres petites créatures, lors même que les Dames les plus charitables qui en avaient pris le soin perdaient presque courage, à cause de la grande dépense qu'il fallait soutenir, en a rendu le témoignage qui suit, plusieurs années avant sa mort : « Dieu sait combien de soupirs et de gémissements Monsieur Vincent a poussés vers le ciel au sujet de ces pauvres petits enfants! quelles recommandations il a faites à sa compagnie de prier Dieu pour eux ! Quels moyens il a employés, et quelles voies il a tentées pour les faire nourrir à peu de frais, et quels soins il a pris de les envoyer visiter les années passées chez leurs nourrices, en divers villages, par les filles de la charité, et en cette année 1649 par un frère de sa congrégation, lequel a employé près de six semaines à faire cette visite ».
Or, avoir charité pour les enfants, et prendre soin d'eux, c'est en quelque façon se faire enfants : et pourvoir aux besoins des enfants trouvés, c'est prendre la place de leurs parents, ou plutôt celle de Dieu même, qui a dit si la mère venait à oublier son enfant, que lui-même en prendrait soin, et qu'il ne le mettrait pas en oubli. Si notre Seigneur vivait encore parmi les hommes sur la terre, et qu'il vit des enfants abandonnés, penserions-nous qu'il voulût aussi les abandonner ? Ce serait sans doute faire injure à sa bonté infinie d'avoir une telle pensée ; et nous serions infidèles à sa grâce, si, ayant été choisis par sa providence pour procurer la conservation corporelle et spirituelle de ces pauvres enfants trouvés, nous venions à nous en lasser, et les abandonner à cause de la peine que nous y avons.
« La charité du prochain est un signe de prédestination, puisqu'elle montre que nous sommes de vrais disciples de Jésus-Christ. C'est cette divine vertu qui a porté le Sauveur à mener une vie pauvre et à mourir nu sur une croix ; c'est pourquoi, quand nous nous trouvons dans les occasions de souffrir pour la charité, nous devons en bénir Dieu ». (Saint Vincent De Paul).
« Oh ! que l'amour que le Fils de Dieu porte aux pauvres, doit être grand ! Il a choisi l'état du pauvre ; il a voulu être le père des pauvres ; il regarde comme fait expressément à lui-même, tout ce qu'on fait à ses pauvres. Il convient donc d'aimer les pauvres d'un amour tout spécial, voyant en eux la personne même de Jésus-Christ, et faisant d'eux tout le cas qu'il en faisait ». (Saint Vincent De Paul).
Pratique : Ne laissez passer aucune occasion aujourd'hui d'exercer la charité, soit corporellement, soit spirituellement, envers les pauvres. Priez pour les plus abandonnés.
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