Le
Saint-Suaire, icône de la souffrance
« Le
regard fixé sur le Saint-Suaire, je voudrais vous saluer tous
cordialement, fidèles de l’Église de Turin, et pèlerins qui êtes
venus de toutes les parties du monde, pendant cette période
d’ostension, pour contempler un des signes les plus bouleversants
de l’amour souffrant du Rédempteur. En entrant dans la cathédrale,
qui montre encore les blessures causées par le terrible incendie de
l’année dernière, je me suis arrêté en adoration devant
l’Eucharistie, le sacrement qui est au centre des attentions de
l’Église et qui, sous d’humbles apparences, garde la présence
véritable, réelle et substantielle du Christ. À la lumière de la
présence du Christ au milieu de nous, je me suis ensuite arrêté
devant le Saint-Suaire, le précieux Linge de lin qui peut nous aider
à mieux comprendre le mystère de l’amour du Fils de Dieu pour
nous.
Ce
linge sacré et l’histoire de Jésus
Devant
le Saint-Suaire, image intense et poignante d’un supplice
inénarrable, je veux rendre grâce au Seigneur pour ce don singulier
qui demande au croyant attention amoureuse et pleine disponibilité
pour marcher à la suite du Seigneur. Le Saint-Suaire est provocation
à l’intelligence. Il exige avant tout un effort de tout homme, en
particulier du chercheur, pour recevoir avec humilité le profond
message adressé à sa raison et à sa vie. La mystérieuse
fascination qu’exerce le Saint-Suaire pousse à poser des questions
sur le rapport existant entre ce Linge sacré et l’histoire de
Jésus. Puisqu’il ne s’agit pas d’une matière de foi, l’Église
n’a pas de compétence spécifique pour se prononcer sur ces
questions. Elle confie aux scientifiques la tâche de continuer à
enquêter pour arriver à formuler des réponses adéquates aux
interrogations liées à ce Suaire qui, selon la tradition, aurait
enveloppé le corps de notre Rédempteur après qu’il eut été
déposé de la Croix. L’Église les exhorte à affronter l’étude
du Saint-Suaire sans positions préconçues, qui donneraient pour
certains des résultats qui ne le sont pas ; elle invite les
hommes de science à agir dans la liberté intérieure et avec un
profond respect aussi bien de la méthodologie scientifique que de la
sensibilité des croyants.
Le
Suaire, miroir des récits évangéliques
Ce
qui compte surtout pour le croyant, c’est que le Saint-Suaire soit
un miroir de l’Évangile. En effet, si l’on réfléchit à ce
Linge sacré, on ne peut faire abstraction de cette considération :
l’image qu’il présente a un rapport si profond avec tout ce que
racontent les Évangiles de la Passion et de la mort de Jésus que
tout homme sensible se sent touché intérieurement et profondément
ému lorsqu’il la contemple. Celui qui l’approche est par
ailleurs conscient que le Saint-Suaire ne garde pas pour lui le coeur
des hommes, mais renvoie à Celui à qui la Providence aimante du
Père l’a donné. Aussi est-il juste d’avoir conscience du
caractère sacré de cette image, que tous voient et que personne ne
peut, pour l’instant, expliquer. Pour toute personne qui réfléchit,
elle est un motif de réflexions profondes, qui peuvent en arriver à
concerner sa propre vie. Le Saint-Suaire constitue ainsi un signe
vraiment singulier qui renvoie à Jésus, Parole véritable du Père,
et qui invite à modeler notre existence sur celle de Celui qui s’est
donné lui-même pour nous. Dans le Saint-Suaire se reflète l’image
de la souffrance humaine. Il rappelle à l’homme moderne, souvent
distrait par le bien-être et les conquêtes technologiques, le drame
de tant de nos frères, et il l’invite à s’interroger sur le
mystère de la souffrance pour en approfondir les causes. L’empreinte
du corps martyrisé du Crucifié, en témoignant de l’effrayante
capacité qu’a l’homme d’infliger la souffrance et la mort à
ses semblables, devient comme l’icône de la souffrance de
l’innocent de tous les temps : des innombrables tragédies qui
ont marqué l’histoire passée, et des drames qui continuent à se
produire dans le monde.
Sortir
de notre égoïsme
Devant
le Saint-Suaire, comment ne pas penser à des millions d’hommes qui
meurent de faim, aux horreurs perpétrées dans les si nombreuses
guerres qui ensanglantent les nations, à l’exploitation brutale de
femmes et d’enfants, aux millions d’êtres humains qui vivent
dans les privations et les humiliations en marge des métropoles,
spécialement dans les pays en voie de développement ? Comment
ne pas rappeler avec amertume et compassion tous ceux qui ne peuvent
pas jouir des droits civils élémentaires, les victimes de la
torture et du terrorisme, les esclaves d’organisations
criminelles ? En évoquant ces situations dramatiques, le
Saint-Suaire nous pousse non seulement à sortir de notre égoïsme,
mais il nous porte à découvrir le mystère de la souffrance qui,
sanctifiée par le sacrifice du Christ, engendre le salut pour toute
l’humanité. Le Saint-Suaire est aussi l’image de l’amour de
Dieu, tout comme celle du péché de l’homme. Il invite à
redécouvrir la cause ultime de la mort rédemptrice de Jésus. Dans
l’incommensurable souffrance qu’il atteste, l’amour de celui
qui « a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils unique »
(Jn 3, 16) se rend presque palpable et manifeste ses surprenantes
dimensions. Devant lui, les croyants ne peuvent pas ne pas s’exclamer
en toute vérité : « Seigneur, tu ne pouvais pas m’aimer
davantage ! », et se rendre compte aussitôt que le
responsable de cette souffrance, c’est le péché : ce sont
les péchés de tout être humain. En nous parlant d’amour et de
péché, le Saint-Suaire nous invite tous à imprimer dans notre
esprit le visage de l’amour de Dieu, pour en exclure l’effrayante
réalité du péché. La contemplation de ce Corps martyrisé aide
l’homme contemporain à se libérer de la superficialité et de
l’égoïsme avec lesquels, bien souvent, il traite de l’amour et
du péché. Faisant écho à la Parole de Dieu et aux siècles de
conscience chrétienne, le Saint-Suaire murmure : crois en
l’amour de Dieu, le plus grand trésor qui ait été donné à
l’humanité, et fuis le péché, le plus grand malheur de
l’histoire.
Une
image de l’impuissance et du silence
Le
Saint-Suaire est aussi l’image d’une impuissance :
l’impuissance de la mort, par laquelle se révèle la conséquence
extrême du mystère de l’Incarnation. Le drap du Saint-Suaire nous
pousse à nous mesurer avec l’aspect le plus troublant du mystère
de l’Incarnation, qui est aussi celui qui montre avec quelle vérité
Dieu s’est vraiment fait homme, prenant notre condition en toute
chose, à l’exception du péché. Chacun est profondément ému à
la pensée que le Fils de Dieu n’a pas, lui non plus, résisté à
la force de la mort, mais nous sommes tous touchés à la pensée
qu’il a tellement participé à notre condition humaine qu’il a
voulu se soumettre à l’impuissance totale du moment où la vie
s’éteint. C’est l’expérience du samedi saint, passage
important du chemin de Jésus vers la Gloire, d’où se dégage un
rayon de lumière qui affecte la souffrance et la mort de tout homme.
En nous rappelant la victoire du Christ, la foi nous communique la
certitude que le sépulcre n’est pas le but ultime de l’existence.
Dieu nous appelle à la résurrection et à la vie immortelle. Le
Saint-Suaire est une image du silence. C’est le silence tragique de
ce qui est incommunicable, qui trouve dans la mort sa plus haute
expression, et c’est le silence de la fécondité, qui appartient à
celui qui renonce à se faire entendre pour atteindre, au plus
profond, les racines de la vérité et de la vie. Le Saint-Suaire
exprime non seulement le silence de la mort, mais aussi le silence
courageux et fécond du dépassement de l’éphémère, grâce à
l’immersion totale dans l’éternelle actualité de Dieu. Il donne
ainsi l’émouvante confirmation du fait que la toute-puissance de
notre Dieu n’est arrêtée par aucune force du mal, mais sait au
contraire changer en bien la force même du mal. Notre temps a besoin
de redécouvrir la fécondité du silence, pour surmonter la
dissipation des sons, des images, des bavardages qui, trop souvent,
empêchent d’entendre la voix de Dieu.
L’amour
vainqueur du désespoir
Bien
chers frères et sœurs, votre archevêque, le cher cardinal Giovanni
Saldarini, Gardien pontifical du Saint-Suaire, a proposé comme mot
d’ordre de cette ostension solennelle ces paroles : « Tous
les hommes verront ton salut ». Oui, le pèlerinage que des
foules nombreuses entreprennent vers cette Ville est vraiment une
« venue pour voir » ce signe tragique et éclairant de la
Passion, qui annonce l’amour du Rédempteur. Cette icône du Christ
abandonné dans la condition dramatique et solennelle de la mort, qui
est depuis des siècles l’objet de représentations significatives
et qui est, depuis cent ans, grâce à la photographie, répandue
sous la forme d’innombrables reproductions, nous exhorte à aller
au coeur du mystère de la vie et de la mort pour découvrir le grand
et consolant message qu’il renferme. Le Saint-Suaire nous présente
Jésus au moment de sa plus grande impuissance et il nous rappelle
que le salut du monde entier se trouve dans l’anéantissement de
cette mort. Le Saint-Suaire devient ainsi une invitation à vivre
toute expérience, y compris celle de la souffrance et de la suprême
impuissance, avec l’attitude de celui qui croit que l’amour
miséricordieux de Dieu vainc toute pauvreté, toutes limites, toute
tentation de désespoir. Que l’Esprit de Dieu, qui habite en nos
coeurs, suscite en chacun de nous le désir et la générosité
nécessaires pour recevoir le message du Saint-Suaire, et pour en
faire le critère qui inspire notre existence. Âme du Christ,
sanctifie-moi! Corps du Christ, sauve-moi! Passion du Christ,
réconforte-moi! Dans tes blessures, cache-moi ! ».
(Vénérable
Jean Paul II, le 24
mai 1998)
Litanies
en l'honneur du Saint Suaire
Seigneur,
ayez pitié de nous.
Christ,
ayez pitié de nous.
Seigneur,
ayez pitié de nous.
Christ,
écoutez-nous.
Christ,
exaucez-nous.
Dieu
le Père, du haut des cieux, ayez pitié de nous.
Dieu
le Fils, Rédempteur du monde, ayez pitié de nous.
Dieu
le Saint-Esprit, ayez pitié de nous.
Trinité
sainte, qui êtes un seul Dieu, ayez pitié de nous.
Sainte
Marie, conçue sans péché, priez pour nous.
Relique
des reliques, préservez-nous de la mauvaise mort.
Suaire
de la tète de Notre-Seigneur Jésus-Christ, préservez-nous de la
mauvaise mort.
Suaire,
que Marie-Madeleine et les deux anges virent dans le sépulcre,
préservez-nous de la mauvaise mort.
Suaire, que saint Jean vit
dans le monument séparé des autres linges, préservez-nous de la
mauvaise mort.
Suaire
d'honneur, préservez-nous de la mauvaise mort.
Suaire,
fait par les mains de la Bienheureuse Vierge Marie,
Suaire
royal,
Suaire,
vêtement précieux,
Suaire,
où reposa après sa mort la chair immaculée du roi du monde,
Suaire,
notre louange,
Suaire,
notre salut,
Suaire,
notre joie,
Suaire,
notre sanctuaire,
Suaire,
tabernacle du Pasteur des pasteurs,
Suaire,
sépulcre nouveau et pur du Seigneur,
Suaire,
sépulcre glorieux,
Suaire, sépulcre précieux,
Suaire,
sépulcre adorable,
Suaire, sépulcre vénérable,
Suaire,
sépulcre digne d'honneur,
Suaire, trône du pacifique Salomon,
Suaire, couche fleurie de l'épouse,
Suaire, couche de
Salomon gardée par soixante vaillants,
Suaire, où l'Agneau sans
tache, le Christ immolé, a reposé pendant trois jours,
Suaire,
tabernacle d'alliance,
Suaire, arche du Testament,
Suaire,
miroir de patience,
Suaire, miroir d'obéissance,
Suaire,
miroir de pauvreté,
Suaire, miroir de pitié,
Suaire, miroir
insigne de dévotion,
Suaire, miroir de la mort du Christ,
Suaire, plein d'amabilité,
Suaire, plein de célébrité,
Suaire, orné de miracles,
Suaire, faisant des prodiges,
Suaire, lumière des aveugles,
Suaire, oreille des sourds,
Suaire, langue des muets,
Suaire, bâton des boiteux,
Suaire, médecine des infirmes,
Suaire, salut des malades,
Suaire, consolation de ceux qui souffrent,
Suaire, qui chasse
la peste,
Suaire, soutien des obsédés,
Suaire, terreur des
démons,
Suaire, résurrection des morts,
Suaire
incorruptible, que le feu ne toucha pas,
Suaire, drapeau
triomphant,
Suaire impénétrable aux traits,
Suaire,
bouclier du salut,
Suaire, fort inexpugnable,
Suaire, honneur
des princes,
Suaire, magnificence, des rois,
Suaire, gloire
des peuples,
Suaire, trésor des chrétiens,
Suaire,
semblable au sein de Marie,
Suaire, rempli de grâces,
Suaire,
gardant le Seigneur,
Suaire, avec nous dans la vertu,
Suaire,
avec nous dans le combat,
Suaire, avec nous dans le secours,
Suaire, miroir de la divine justice,
Suaire,
paradis de délices,
Suaire, jardin fermé de l'Epoux et de
l'Epouse,
Suaire, rempli de parfums,
Suaire, répandant
l'odeur du baume,
Suaire, précieux comme l'encens,
Suaire,
empourpré de sang,
Suaire, qui donne la componction à l'âme,
Suaire, pressoir de la charité,
Suaire, manteau d'Elie
laissé sur la terre,
Suaire, où le Christ en mourant a détruit
la mort,
Suaire, où en ressuscitant il a réparé notre vie,
Suaire, d'où il est monté des enfers en vainqueur,
Suaire,
cause de notre joie,
Suaire, siège de sagesse,
Suaire,
escabeau des pieds du Christ,
Suaire, corporal très sacré,
Suaire, où reposa l'humanité du Christ,
Suaire, robe
d'allégresse,
Suaire, gage de la gloire éternelle,
Suaire,
notre ombrage au jour du jugement,
Suaire, doux rafraîchissement,
Suaire, repos de ceux qui sont dans la tribulation,
Suaire,
refuge des affligés,
Suaire, consolation des malheureux,
Suaire, port des naufragés,
Suaire, voile des matelots,
Suaire, espoir de l'Eglise,
Suaire, couronne des Chrétiens,
Suaire, défense des royaumes,
Suaire, protection de tous
ceux qui recourent à vous,
Agneau
de Dieu, qui effacez les péchés du monde, pardonnez-nous, Seigneur.
Agneau
de Dieu, qui effacez les péchés du monde, exaucez-nous, Seigneur.
Agneau
de Dieu, qui effacez les péchés du monde, ayez pitié de nous,
Seigneur.
Prions
O
Seigneur Jésus, qui, parmi les insignes marques de votre amour, nous
avez laissé le très saint Suaire, accordez-nous, qu'après l'avoir
vénéré sur la terre, nous puissions mériter votre gloire dans le
ciel. Vous qui vivez et régnez dans les siècles des siècles. Ainsi
soit-il.
Suaire
de Notre Seigneur Jésus-Christ, préservez-nous.
Suaire
de Notre Seigneur Jésus-Christ, préservez-nous.
Suaire
de Notre Seigneur Jésus-Christ, préservez-nous.
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